Vu la requête, enregistrée le 12 août 2011, présentée pour M. Bruno X, demeurant ..., par Me Tournaire ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000514 du 16 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 15 décembre 2009 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales l'a révoqué de ses fonctions ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté en date du 15 décembre 2009 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance fixant en dernier lieu la clôture de l'instruction au 29 novembre 2011 à 12h00 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, relative aux droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu le décret n° 84-961 du 25 mars 1984, relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires de l'Etat ;
Vu le décret n° 95-654 du 9 mai 1995, fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs de la police nationale ;
Vu le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004, portant statut particulier du corps d'encadrement et d'application de la police nationale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2012 :
- le rapport de M. Jean-Emmanuel Richard, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;
Considérant que M. X fait appel du jugement du 16 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 15 décembre 2009 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales l'a révoqué de ses fonctions ;
Considérant qu'aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 "En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit sans délai, le conseil de discipline. Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement (...) sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si à l'expiration de ce délai aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales est rétabli dans ses fonctions" ; que lesdites dispositions, qui ont imparti à l'administration un délai de quatre mois pour statuer sur le cas d'un fonctionnaire, ont pour objet de limiter les conséquences de la suspension ; qu'aucun texte n'enferme dans un délai déterminé l'exercice de l'action disciplinaire ; que M. X, qui a fait l'objet d'une mesure de suspension le 31 mars 2009, n'est fondé à soutenir ni que l'expiration du délai de quatre mois faisait obstacle à la saisine du conseil de discipline, ni qu'une sanction disciplinaire ne pouvait légalement lui être infligée après l'expiration de ce délai ;
Considérant que la circonstance que M. X se trouvait en position de congé de maladie ne faisait pas obstacle à ce que lui soit infligée une sanction disciplinaire ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration de statuer sur ses droits à la retraite, en même temps qu'elle prenait à son encontre une sanction disciplinaire ;
Considérant que si M. X fait valoir que, lors de la réunion du conseil de discipline, il se trouvait en congé de maladie en raison d'un état dépressif, il ne ressort pas du dossier que les troubles dont il souffrait le mettaient hors d'état de présenter utilement sa défense ; qu'au surplus, l'intéressé n'a pas demandé expressément un report de la séance du conseil de discipline ; que le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que l'arrêté prononçant sa révocation serait intervenu en méconnaissance des droits de la défense ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : " L'organisme siégeant en conseil de discipline lorsque sa consultation est nécessaire, en application du second alinéa de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou d'un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet. Ce rapport doit indiquer clairement les faits reprochés au fonctionnaire et préciser les circonstances dans lesquels ils se sont produits " ; que ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposent à l'administration de faire mention des faits reprochés dans la convocation au conseil de discipline ;
Considérant que la procédure disciplinaire dont M. X a fait l'objet n'entre pas dans le champ d'application de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de cet article est inopérant ;
Considérant que, si le conseil de discipline s'est réuni le 29 septembre 2009, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'a jamais sollicité avant la tenue de ce conseil de discipline la communication de son dossier administratif, et n'a présenté une première demande en ce sens que le 12 novembre 2009 ; que, dans ces conditions, l'arrêté litigieux n'a pas été pris en violation des articles 12 et 19 du statut général, de l'article 1er du décret du 25 octobre 1984, et de l'article 4 de la loi du 17 juillet 1978 ;
Considérant que l'article 29 du décret du 9 mai 1995 dispose que : " Le fonctionnaire actif des services de la police nationale doit, en tout temps, qu'il soit ou non en service, s'abstenir en public de tout acte ou propos de nature à porter la déconsidération sur le corps auquel il appartient ou à troubler l'ordre public " ;
Considérant qu'une décision administrative fondée sur plusieurs motifs demeure légale, même si certains de ses motifs sont illégaux, si les autres motifs, légaux, suffisent à la fonder ;
Considérant que le ministre de l'intérieur a révoqué M. X aux motifs qu'il avait jeté le discrédit sur l'institution policière le 13 mars 2009, qu'il avait pris son service en état d'ébriété le 28 mars 2009, qu'il n'avait pas déféré à une convocation à une contre-visite médicale qui lui avait été notifiée le 14 avril 2009, et qu'il s'était défavorablement signalé par le passé ;
Considérant, toutefois, que l'administration n'établit pas que M. X aurait reçu la convocation à la contre-visite médicale organisée le 17 avril 2009 ; que le motif tiré de son absence à cette contre-visite est donc infondé ; qu'en outre, le motif tiré de ce que le requérant s'était défavorablement signalé par le passé est insuffisamment caractérisé pour justifier une sanction ;
Considérant, néanmoins, qu'il ressort des pièces du dossier que, le 13 mars 2009, M. X, alors qu'il était sous imprégnation alcoolique, a importuné avec insistance certains clients d'un établissement de restauration et de boissons tout en se prévalant de sa qualité de policier, ce qui était de nature à jeter le discrédit sur l'institution policière ; que ces faits doivent être regardés comme établis, même s'ils n'ont été portés à la connaissance de l'administration qu'à l'issue d'une enquête non contradictoire, et même si le conseil de discipline ne s'est pas prononcé explicitement sur leur exactitude matérielle ; qu'en outre, M. X a, le 28 mars 2009, pris son service en état d'ébriété, ainsi qu'il ressort des résultats de l'éthylotest pratiqué par son supérieur hiérarchique, et ainsi que le confirment les témoignages recueillis auprès de ses collègues, qui ont décrit son comportement ; que, dans les circonstances de l'affaire, alors qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'imposait à l'administration de pratiquer une prise de sang, et nonobstant la circonstance, à la supposer établie, que l'intéressé prenait des médicaments, ces faits doivent être regardés comme matériellement exacts ; que leur gravité ne saurait être atténuée par le prétendu état pathologique de l'intéressé ;
Considérant que l'arrêté prononçant la révocation litigieuse à raison des faits des 13 mars et 28 mars 2009, qui doivent s'apprécier compte tenu des obligations déontologiques de dignité et d'exemplarité qui s'imposaient à M. X, tout particulièrement alors qu'il était en service, n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, entaché d'une disproportion manifeste ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, M. GUERRER0 n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 16 juin 2011, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à verser à l'Etat la somme que le ministre de l'intérieur demande sur le même fondement ;
DECIDE
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du ministre de l'intérieur tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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No 11BX02308