Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour en télécopie le 7 mai 2010 sous le n° 10BX01116, et en original le 11 mai 2010, présentée pour Mlle Daphné A et M. Alain A, demeurant ... ; Mlle A et M. A demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601204 en date du 11 mars 2010, par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté en date du 8 août 2006 pris, au nom de l'Etat, par le maire de Marcillac-La-Croze, accordant à M. et Mme Jean-Pierre B un permis de construire un bâtiment à usage de remise ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) de surseoir à statuer jusqu'à ce que la cour d'appel de Limoges statue sur leur appel formé à l'encontre du jugement du tribunal de grande instance de Brive du 2 octobre 2009 ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Marcillac-La-Croze la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la communication de pièces, enregistrée le 31 août 2011, faite par M. et Mme Jean-Pierre B ;
Vu le code civil ;
Vu le code rural ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2011 :
- le rapport de Mme D. Boulard, président assesseur ;
- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;
Considérant que, par un arrêté en date du 8 août 2006 pris au nom de l'Etat, le maire de Marcillac-La-Croze a accordé à M. et Mme Jean-Pierre B un permis de construire un bâtiment à usage de remise sur la parcelle cadastrée section B n° 1068 au lieu-dit La Brousse ; que Mlle A et M. A, voisins de cette parcelle, font appel du jugement du 11 mars 2010, par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur recours pour excès de pouvoir dirigé contre cet arrêté ;
Sur la légalité du permis de construire en litige :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 161-1 du code rural : Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ; que selon l'article L. 161-2 du même code : L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale. (...) ; que l'article L. 161-3 de ce code dispose : Tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ;
Considérant, en premier lieu, que, pour écarter le moyen tiré par les requérants de ce que la parcelle en litige ne peut être légalement desservie par un chemin dont ils soutiennent qu'il ne constitue pas un chemin rural mais un chemin d'exploitation leur appartenant, les premiers juges relèvent qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des différents extraits de plan cadastral produits, que, même si elle débouche en impasse au droit de la parcelle cadastrée section B n° 1068 constituant l'assiette du projet litigieux, la portion de chemin séparant les parcelles cadastrées section B n° 758 et n° 769, et dont les requérants s'estiment propriétaires, fait partie intégrante d'un chemin menant lui-même à deux voies de desserte du lieu-dit La Brousse , lequel comprend une dizaine de parcelles ainsi que plusieurs maisons d'habitation, et que sur ce chemin, non classé en voie communale, circulent notamment des véhicules et des piétons ; qu'ils estiment que alors même que la partie litigieuse de ce chemin ne serait utilisée que par les propriétaires riverains, ce chemin doit, dans son ensemble, être considéré comme une voie de passage ; qu'ils énoncent que ce chemin, pour lequel l'autorité municipale a, par ailleurs, et notamment sur l'emprise dont les requérants s'estiment propriétaires, pris, le 27 avril 2006, soit antérieurement au 8 juin 2006, date de dépôt de la demande de permis de construire des époux B, un arrêté mettant en demeure M. A de procéder à l'enlèvement des obstacles qu'il y avait déposés et ainsi d'y rétablir le passage et a, le 29 juin 2006, assigné M. A et Mlle A devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Brive en vue d'obtenir cet enlèvement, doit être ainsi regardé comme étant affecté à l'usage du public au sens des dispositions précitées du code rural et, par suite, présumé appartenir à la commune de Marcillac-La-Croze ; qu'ils relèvent encore que Mlle A et M. A ne produisent aucun acte juridique constitutif d'un titre de propriété sur ce chemin et qu'à supposer qu'il soit, comme ils le soutiennent, un chemin d'exploitation, cette partie du chemin serait, en vertu de l'article L. 162-1 du code rural définissant les chemins d'exploitation, présumée, en l'absence de titre, appartenir à l'ensemble des propriétaires riverains, donc également à M. et Mme B, qui disposeraient ainsi d'un droit d'usage de ce chemin ; que, s'agissant du moyen tiré de la prescription acquisitive trentenaire invoquée par Mlle A et M. A, les premiers juges l'écartent en relevant que, si M. A a acquis la pleine propriété de la parcelle cadastrée section B n° 758 en 1972, Mlle A n'est devenue propriétaire de la parcelle cadastrée section B n° 769 qu'en 2003, soit trois ans avant la délivrance du permis de construire attaqué ; qu'ils ajoutent en citant les dispositions de l'article 2229 du code civil, suivant lesquelles pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire , que M. A qui a, à deux reprises, en 2004 et 2005, demandé en vain à la commune de procéder au déclassement de cette partie du chemin, qu'il a alors qualifié lui-même de chemin rural, et qui n'a pas contesté l'arrêté du 27 avril 2006 précité, ne saurait être ainsi regardé comme ayant possédé à titre de propriétaire au sens de ces dispositions la partie du chemin en cause, qui est par ailleurs également empruntée par les époux B et que les mentions de la transaction jointe au rapport d'expertise en date du 9 mai 2005 établi dans le cadre d'un litige de bornage des parcelles cadastrées section B n° 769 et n° 1068 ne font apparaître, contrairement à ce que soutiennent les requérants, aucune reconnaissance de la part des époux B de ce que la partie du chemin en cause appartiendrait à Mlle A et M. A ; qu'ils estiment alors que ces derniers n'apportent aucun élément de nature à faire naître une difficulté sérieuse quant au droit de propriété dont peut se prévaloir la commune de Marcillac-La-Croze sur le chemin litigieux et à justifier ainsi qu'il soit sursis à statuer, sur le fondement de l'article L. 161-4 du code rural prévoyant que les contestations qui peuvent être élevées par toute partie intéressée sur la propriété ou sur la possession totale ou partielle des chemins ruraux sont jugées par les tribunaux de l'ordre judiciaire, jusqu'à ce que le juge judiciaire ait tranché cette question de propriété ; qu'en appel devant la présente cour, et tandis que la commune se prévaut encore de travaux d'entretien qui lui ont été facturés en 1985, les consorts A n'apportent pas d'éléments de nature à infirmer la qualification juridique retenue, sans surseoir à statuer, par les premiers juges au terme d'une motivation qu'il y a lieu d'adopter ; que n'est pas de nature à infirmer cette qualification non plus que le refus de surseoir à statuer, l'appel que les requérants ont formé auprès de la cour d'appel de Limoges contre le jugement du 2 octobre 2009 par lequel le tribunal de grand instance de Brive, devant lequel ils avaient assigné la commune et Mme B, dit que le chemin en litige est un chemin rural et rejette l'application de la prescription acquisitive de ce chemin au profit des consorts A ;
Considérant, en second lieu, que, pas plus en appel qu'en première instance, il ne ressort des pièces du dossier que les caractéristiques du chemin en question, au regard notamment de sa pente ou de sa largeur, d'environ trois mètres pour la partie en litige ainsi que l'a retenu le tribunal, ne permettraient pas le passage de véhicules dans des conditions répondant aux exigences des dispositions précitées de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme ; que, eu égard à la destination de la construction projetée, le permis de construire contesté n'est pas entaché, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges, d'une appréciation manifestement erronée quant aux conditions de desserte de la construction projetée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées à leur requête d'appel, que les consorts A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 août 2006 du maire de Marcillac-La-Croze, accordant, au nom de l'Etat, à M. et Mme B un permis de construire ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en tout état de cause, obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Marcillac-La-Croze, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts A demandent en remboursement des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme que la commune réclame en remboursement des frais de même nature exposés par elle ; qu'en revanche, il y a lieu, dans ces mêmes circonstances, de mettre à la charge des consorts A le versement à M. et Mme B de la somme de 1 300 euros au titre des frais de même nature exposés par ces derniers ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mlle A et M. A est rejetée.
Article 2 : Mlle A et M. A verseront, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à M. et Mme B la somme de 1 300 euros.
Article 3 : Les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la commune de Marcillac-La-Croze sont rejetées.
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No 10BX01116