Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 3 août 2010 sous le n°10BX01996, présentée pour la SOCIETE GAGNE, société anonyme dont le siège est Les baraques, BP 62, Le Puy en Velay (43002) par la SCP d'avocats Beal Astor ;
La SOCIETE GAGNE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0801358 en date du 30 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 325 212,18 euros, majorée des intérêts moratoires à compter de l'enregistrement de la requête correspondant au règlement de prestations complémentaires et aux indemnités qui lui sont dues au titre du marché de réalisation des viaducs OA 15, 16 et 18 dans le cadre des travaux d'aménagement de la RN 149 entre le Maine-et-Loire et Bressuire (Deux-Sèvres) ;
2°) de condamner l'Etat à lui régler le solde à valoir sur le montant du marché initial pour un montant de 1 069,20 € hors-taxes, à lui verser une somme de 191 587,49 € hors-taxes au titre de l'incidence des hausses du prix de l'acier, à lui payer le surcoût des études d'exécution pour un montant de 12 000 € hors-taxes, les coûts complémentaires de soudure pour un montant de 25 700 € hors-taxes, le coût de la venue d'engins de levage plus puissants sur le chantier pour un montant de 34 100 € hors-taxes et des frais financiers pour un montant de 7 459,85 € hors-taxes soit un total de 271 916,54 € hors-taxes ou 325 212 €,18 TTC, outre intérêts moratoires de droit à compter du 29 novembre 2006, date de transmission du décompte final concernant la demande de paiement ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 12 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code des marchés publics ;
Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2011 ;
le rapport de M. Cristille, premier conseiller ;
et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;
Considérant que, par un marché signé le 15 décembre 2004, le directeur départemental de l'équipement des deux Sèvres, agissant au nom de l'Etat, a confié au groupement d'entreprises solidaires Demathieu et Bard, Razel et GAGNE représenté par la société Demathieu et Bard, dans le cadre de l'aménagement de la RN149 section Maine et Loire-Bressuire, la réalisation des viaducs OA 15, OA 16 et OA 18 pour un montant total de 7 531 825,55 euros toutes taxes comprises ; que la SOCIETE GAGNE était chargée de la construction des ouvrages métalliques ; que le mandataire du groupement a adressé le 5 septembre 2005 au maître d'oeuvre un mémoire en réclamation tendant à l'allocation d'une rémunération complémentaire en compensation de la hausse des prix de l'acier qui a fait l'objet d'un refus du maître d'ouvrage ; que les travaux ont été réceptionnés le 6 octobre 2006 ; que le 29 novembre 2006, le mandataire du groupement a adressé au maître d'oeuvre le projet de décompte final incluant la demande indemnitaire relative à la hausse du prix de l'acier ainsi qu'une demande d'indemnisation pour des sujétions techniques imprévues induites par l'augmentation sensible du poids des ouvrages ; que cette demande a été rejetée par le maître d'ouvrage ; que le décompte général définitif notifié le 20 août 2007 au groupement d'entreprise a été contesté par la SOCIETE GAGNE qui a transmis un mémoire le 18 septembre 2007 reprenant les précédentes réclamations et demandant, en outre, une somme au titre de la correction du montant du marché et le paiement de frais financiers ; que la société demandait ainsi l'allocation d'une indemnité d'un montant total de 325 212,18 euros ; que le maître d'ouvrage lui ayant opposé un refus, la SOCIETE GAGNE a saisi le Tribunal administratif de Poitiers de conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser cette somme ; qu'elle fait appel du jugement rendu par ce tribunal le 30 juin 2010 qui a rejeté sa demande ;
Sur la correction du montant du marché :
Considérant que la société requérante réclame une indemnité d'un montant de 1 069,20 euros hors taxes en réparation d'une erreur de métré qui aurait été commise par le maître d'oeuvre sur les quantités d'acier consommées, dès lors qu'elle en aurait utilisé 648 tonnes et non les 647 tonnes qui ont été payées ; que toutefois, il résulte de l'instruction que le projet de décompte final transmis par le mandataire du groupement d'entreprise le 26 novembre 2006 et qui lie l'entrepreneur, fait état d'un total de 647 tonnes d'acier utilisés pour les ouvrages OA15 et OA 18 ; que par suite la demande de la société GAGNE qui, au demeurant n'établit pas la réalité de l'erreur qu'elle a invoquée pour la première fois dans sa réclamation du 18 septembre 2007, ne peut qu'être rejetée ;
Sur l'indemnisation des coûts supplémentaires liés à l'augmentation du poids des ouvrages de charpente métallique :
Considérant que la SOCIETE GAGNE fait valoir que l'augmentation du poids des ouvrages de charpente métallique consécutive à un redimensionnement de l'ouvrage, lui-même induit par les erreurs ayant affecté le dossier de consultation des entreprises, a rendu plus onéreuse l'exécution du marché en entraînant des études d'exécution supplémentaires, des temps de soudure plus longs et des moyens de levage de plus grande capacité ; que, toutefois, le cahier des clauses techniques particulières du marché prévoyait un article 5.2.7 énonçant au sujet des éléments fonctionnels et caractéristiques de l'ouvrage OA15 que : les données géométriques sont fournies à titre indicatif, l'entrepreneur devra lors de ses études d'exécution optimiser toutes les valeurs ; que les mêmes dispositions étaient prévues pour les viaducs OA16 et OA18 par les articles 5.2.8 et 5.2.9 du même document contractuel ; qu'il appartenait, dès lors, à l'entreprise d'optimiser les quantités d'ouvrage en matière de dimensions géométriques seulement fournies à titre indicatif dans les pièces du dossier; que, par ailleurs, la société requérante n'établit pas que ces prestations ne relevaient pas de l'exécution normale du marché ou que les sujétions invoquées présentaient un caractère anormal ; que le coût de ces prestations doit ainsi entrer dans le prix forfaitaire convenu au marché qui inclut une part d'aléa ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a refusé d'accorder à la société requérante une indemnité pour ces dépenses supplémentaires ;
Sur les charges supplémentaires liées à la hausse des prix de l'acier :
Considérant que faisant valoir que la hausse des cours de l'acier et ses répercussions sur le prix des matériaux a entraîné, pendant la période des travaux, un coût très supérieur à la majoration pour révision des prix prévue au contrat, la société requérante a demandé au maître de l'ouvrage au titre de l'imprévision une indemnité totale de 191 587 euros en compensation de la perte qu'elle aurait subie ;
Considérant que dans l'hypothèse où un événement extérieur aux parties, imprévisible au moment de la conclusion du contrat, a pour effet de bouleverser l'économie du contrat, le titulaire du marché est en droit de réclamer au maître d'ouvrage une indemnité représentant la part de la charge extra contractuelle qu'il a supportée en exécutant les prestations dont il avait la charge ;
Considérant que, d'une part, le cahier des clauses administratives particulières du marché comportait en son article 3-3-4 une clause de révision de prix prévoyant la répercussion sur les prix du marché, des variations des éléments constitutifs du coût des travaux et réglant ces variations par une formule de révision ayant pour référence l'indice TP 02 ouvrage d'art en site terrestre, fluvial ou maritime ; que si la société requérante soutient que du fait du caractère inadapté de l'indice auquel fait référence la formule de révision de prix, l'augmentation brutale du prix des aciers durant la période d'exécution des travaux n'a pas été prise en compte, elle ne pouvait ignorer en tant que professionnelle avisée que la formule de variation de cet indice, eu égard à sa composition, ne permettait de prendre en compte que de manière très partielle les hausses des prix de l'acier utilisé qui devaient ainsi entrer dans ses prévisions ; que, d'autre part, il résulte de l'instruction, en particulier du tableau INSEE, que la variation à la hausse de l'indice TP 02 qui a été de 6,54% sur la période de 9 mois ayant précédé l'établissement des prix du marché n'a été, en comparaison, pendant les 21 mois de la période d'exécution du contrat de septembre 2004 à décembre 2006 que de 8,06% ; que par suite, le moyen tiré d'une augmentation brutale et imprévisible du prix de l'acier postérieurement à la signature du marché ne peut qu'être écarté ; qu'en tout état de cause, la charge supplémentaire alléguée de 191 587 euros HT imputable à la hausse du prix de l'acier correspond à 3% du montant global du marché qui doit être pris comme base de référence dès lors que les membres d'un groupement solidaire d'entreprises sont engagés pour la totalité du marché qui était un marché unique ; que cette augmentation de 3% n'a pas modifié l'économie du contrat dans une proportion suffisante pour ouvrir droit, au profit de l'intéressée, à l'allocation d'une indemnité pour charges extracontractuelles ; qu'ainsi, la société requérante n'est pas fondée à obtenir une indemnisation de l'Etat à ce titre ;
Sur les frais financiers liés au retard de notification du décompte général :
Considérant que la société GAGNE fait valoir que la notification tardive du décompte général au groupement a fait courir des intérêts moratoires à son profit appliqués au montant des rémunération complémentaires sollicitées ; qu'elle réclame, à ce titre, une indemnité de 7 459,85 euros ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, aucune rémunération complémentaire n'est due à la société en exécution du marché ; que par suite et comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, les conclusions présentées par la SOCIETE GAGNE qui ne justifie d'aucun préjudice à ce titre doivent être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE GAGNE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la SOCIETE GAGNE de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SOCIETE GAGNE est rejetée
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N° 10BX01996