Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 février 2010, présentée pour l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE (ASPP) dont le siège social est 2 rue de Macayran à Boe (47550), par la SCP d'avocats Millet, Barthélémy et associés ;
L'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 10 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 février 2006 de l'inspectrice du travail de la 2ème section de Lot-et-Garonne refusant l'autorisation de licencier M. Bernard X, et de la décision en date du 2 août 2006 par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, sur recours hiérarchique, après avoir annulé la décision du 9 février 2006 de l'inspectrice du travail a, par la même décision, maintenu le refus d'autorisation de licenciement de M. X ;
2°) d'annuler la décision du 2 août 2006 ;
3°) de condamner les parties intimées à lui verser une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2011 :
- le rapport de M. Bentolila, premier conseiller ;
- les observations de Me Millet, avocat de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE ;
- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;
Considérant que l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE relève appel du jugement du 10 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 février 2006 de l'inspectrice du travail de la 2ème section de Lot-et-Garonne refusant l'autorisation de licencier M. X, et de la décision en date du 2 août 2006 par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, sur recours hiérarchique, après avoir annulé la décision du 9 février 2006 de l'inspectrice du travail a, par la même décision, maintenu le refus d'autorisation de licenciement de M. X ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le Tribunal administratif, pour écarter le grief tiré de l'existence du harcèlement moral dont M. X se serait rendu l'auteur, s'est borné à indiquer qu' alors que M. X nie les agissements de harcèlement moral qui lui sont reprochés, les témoignages produits ne précisent aucune date relative aux faits en cause et sont, pour certaines, fortement sujettes à caution ; que faute de préciser en quoi les attestations produites par l'employeur seraient fortement sujettes à caution , une telle motivation ne saurait être regardée comme suffisante ; que par suite, l'association requérante est fondée à demander pour ce motif l'annulation du jugement attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE devant le Tribunal administratif de Bordeaux ;
Sur les conclusions à fins d'annulation :
Sur les conclusions dirigées contre la décision de l'inspecteur du travail du 9 février 2006 :
Considérant que compte tenu de ce que la décision du ministre du travail du 2 août 2006 annule la décision de l'inspectrice du travail refusant l'autorisation de licencier M. X, les conclusions dirigées contre la décision du 9 février 2006 de l'inspectrice du travail sont irrecevables ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du ministre du 2 août 2006 :
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis d'un mandat de délégué du personnel, les membres du comité d'entreprise, les membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et les délégués syndicaux, bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables à son contrat de travail et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un acte ou un comportement du salarié survenu en dehors de l'exécution de son contrat de travail, notamment dans le cadre de l'exercice de ses fonctions représentatives, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits en cause sont établis et de nature, compte tenu de leur répercussion sur le fonctionnement de l'entreprise, à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, eu égard à la nature de ses fonctions et à l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé ;
En ce qui concerne le grief tiré de la violation de l'article L. 122-49 du code du travail :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-49 du code du travail, alors en vigueur : Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) ;
Considérant qu'il ressort des attestations produites au dossier en vue d'établir le harcèlement moral dont M. X se serait rendu l'auteur que si deux de ses collègues ainsi que le directeur ont entretenu des relations tendues avec l'intéressé, ces conflits avaient pour origine des divergences de conception dans l'organisation du travail et des critiques de la direction dans les choix d'organisation exprimées par M. X ; que s'il ressort de l'une des attestations produites que l'une des salariés, Mme Castandet, a été affectée par la forme et le fond des propos tenus par M. X, les faits exposés et les documents produits ne caractérisent pas pour autant un harcèlement moral au sens des dispositions précitées du code du travail qui pour ce motif aurait justifié d'accorder à l'association l'autorisation de licenciement sollicitée ;
En ce qui concerne le grief tiré de l'absence de M. X le 5 décembre 2005 :
Considérant que l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE a fondé la demande d'autorisation du licenciement de M. X notamment sur l'absence irrégulière de celui-ci l'après-midi du 5 décembre 2005 ; que si son absence n'était pas justifiée ce jour-là par l'utilisation de ses heures de délégation, il ressort des pièces du dossier que les salariés handicapés du centre d'aide par le travail que M. X devait encadrer cet après-midi du 5 décembre 2005 ne se sont pas trouvés sans surveillance, un autre salarié ayant remplacé M. X ; que si le comportement de M. X a été fautif, ce comportement n'a toutefois pas constitué une faute suffisamment grave pour justifier le licenciement de l'intéressé ;
En ce qui concerne le grief tiré des démarches et des propos déplacés de M. X auprès des services de contrôle de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE :
Considérant que M. X, en se présentant dans les services de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales pour prendre copie d'un rapport d'inspection, n'a fait qu'exercer le droit d'information qui est lié à l'exercice de son mandat ; que s'il a fait part à l'inspecteur des affaires sanitaires et sociales, d'un certain nombre de dysfonctionnements en matière de gestion du personnel et si l'inspecteur s'en est ému par un courrier du 6 janvier 2006 adressé à l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE, le comportement de M. X ne saurait, compte tenu des mandats détenus par l'intéressé, caractériser un usage excessif du droit d'expression défini à l'article L. 461-1 du code du travail ;
En ce qui concerne le grief tiré du refus d'exécution de travaux et d'insubordination :
Considérant que si la requérante soutient que les refus de marchés de services ou les retards dans la fourniture de devis , constitueraient également des fautes graves justifiant le licenciement de M. X et qu'il en serait également de même de l'insubordination de M. X, qui se serait abstenu de répondre à la demande de son employeur de lui communiquer le détail de son travail, le moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et doit dès lors être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision en date du 2 août 2006 par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, sur recours hiérarchique, après avoir annulé la décision du 9 février 2006 de l'inspectrice du travail a, par la même décision, maintenu le refus d'autorisation de licenciement de M. X ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au profit de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE et il y a lieu de condamner l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE à verser à M. X la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux du 10 décembre 2009 est annulé.
Article 2 : La demande de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE et le surplus de sa requête sont rejetés.
Article 3 : L'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE ET DE PROMOTION DE LA PERSONNE est condamnée à verser à M. X la somme de 1.500 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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No 10BX00317