Vu I°) le recours enregistré au greffe de la cour le 24 octobre 2006, sous le n° 06BX02224, présenté par le MINISTRE DE L'EMPLOI, DE LA COHESION SOCIALE ET DU LOGEMENT, qui demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 19 septembre 2006 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a annulé la décision du 24 décembre 2002 de l'inspecteur du travail de la Haute-Garonne autorisant le licenciement de M. X, la décision du 13 mars 2003 portant rejet du recours gracieux contre cette décision, la décision du ministre du travail en date du 21 mars 2003 rejetant le recours hiérarchique, ainsi que la décision implicite du ministre rejetant un second recours hiérarchique ;
2°) de rejeter les demandes de M. X présentées devant le tribunal administratif ;
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Vu II°) la requête enregistrée au greffe de la cour, sous le n° 06BX02394, le 23 novembre 2006, présentée pour la SOCIETE TEUCHOS, dont le siège social est 10 rue du Fort de Saint Cyr à Montigny-le-Bretonneux (78180), par la société d'avocats C.2.J. qui demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 19 septembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 24 décembre 2002 de l'inspecteur du travail de la Haute-Garonne autorisant le licenciement de M. X, la décision du 13 mars 2003 portant rejet du recours gracieux contre cette décision, la décision du ministre du travail en date du 21 mars 2003 rejetant le recours hiérarchique, ainsi que la décision implicite du ministre rejetant un second recours hiérarchique ;
2°) de rejeter les demandes de M. X présentées devant le tribunal administratif ;
3°) d'ordonner la communication par le ministre de l'emploi de tout document relatif au déroulement de l'enquête contradictoire et en particulier de l'audition de M. X par l'inspecteur du travail suite à la demande d'autorisation de licenciement le concernant ;
4°) de rejeter les demandes d'annulation des décisions administratives litigieuses ;
5°) de lui allouer la somme de 3 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2010 :
- le rapport de M. Bec, président-assesseur ;
- les observations de Me Leymarie, avocat de la SOCIETE TEUCHOS ;
- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;
Considérant que le recours du MINISTRE DE L'EMPLOI, DE LA COHESION SOCIALE ET DU LOGEMENT et la requête de la SOCIETE TEUCHOS sont dirigés contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement du 21 mars 2003 et la décision implicite rejetant le second recours hiérarchique de M. X :
Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la loi du 12 avril 2000 : Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès d'une autorité administrative peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi... ; que ces dispositions ne sauraient régir les conditions de délai qui déterminent la recevabilité des recours contentieux, laquelle est fixée par le code de justice administrative ; qu'elles sont, par suite, sans incidence sur l'application des règles relatives à la conservation du délai de recours contentieux ; qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE TEUCHOS a sollicité l'autorisation de licencier M. X, salarié protégé en sa qualité de membre de la délégation unique du personnel ; que ce licenciement a été autorisé par décision de l'inspecteur du travail du 24 décembre 2002, notifiée à M. X, le 27 décembre 2002, et qui comportait une mention suffisante des voies et délais de recours ; que, le 28 février 2003, M. X a formé devant le MINISTRE un recours hiérarchique, rejeté par décision du 21 mars 2003 ; que ce recours, posté le 28 février 2003, n'a été reçu par l'administration que le 4 mars 2003, soit postérieurement à l'expiration, le 28 février 2003, du délai de recours contentieux qui courait contre cette décision ; que, si M. X fait valoir que le délai d'acheminement du courrier a été anormalement long, il est constant qu'en le postant le jour même de l'expiration du délai de recours, il n'a pas présenté son recours en temps utile ; qu'ainsi, le recours hiérarchique dirigé contre la décision du 21 mars 2003 étant tardif, c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a annulé ladite décision confirmant la décision d'autorisation de licenciement de l'inspecteur du travail ;
Considérant que le second recours hiérarchique formé par M. X, le 8 avril 2003, reçu par le MINISTRE le 11 avril 2003, et dirigé contre la même décision de l'inspecteur du travail, n'a pu sauvegarder le délai de recours contentieux ; que la décision implicite par laquelle le MINISTRE a rejeté ce second recours, ayant le caractère d'une décision confirmative, n'a pas rouvert ce délai ; que, dès lors, les conclusions dirigées contre cette seconde décision étant tardives, c'est également à tort que le tribunal administratif l'a annulée ;
Sur les conclusions dirigées contre les décisions de l'inspecteur du travail du 24 décembre 2002 et du 13 mars 2003 :
Considérant que M. X a formé, le 26 février 2003, soit dans le délai de recours, un recours gracieux contre la décision du 24 décembre 2002, reçue le 27 décembre 2002, par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement, et la décision en date du 13 mars 2003, notifiée le 14 mars 2003, par laquelle l'inspecteur du travail a rejeté ce recours ;
Considérant que, pour annuler la décision du 24 décembre 2002, et par voie de conséquence celle du 13 mars 2003, le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de ce que le MINISTRE, n'ayant pas produit de défense malgré la mise en demeure qui lui avait été adressée par le greffe de la cour le 2 février 2006, devait être regardé comme ayant acquiescé aux faits exposés par M. X ; que cette circonstance ne dispensait toutefois pas le tribunal de vérifier que les faits allégués par le demandeur n'étaient pas contredits par les autres pièces du dossier, et de se prononcer sur les moyens de droit que soulevait l'examen de l'affaire ; qu'en annulant la décision de l'inspecteur du travail du 24 décembre 2002 au seul motif de l'acquiescement aux faits, le tribunal a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il y a lieu pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X ;
Considérant que la décision de l'inspecteur du travail du 24 décembre 2002 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent ; qu'elle répond ainsi aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 436-4 du code du travail : L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat ; que cette disposition implique pour le salarié le droit d'être entendu personnellement et individuellement par l'inspecteur du travail ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'inspecteur du travail a, le 14 novembre 2002, dans les locaux de l'entreprise, entendu contradictoirement M. X en présence de son employeur ; que M. X ayant ensuite demandé à l'inspecteur du travail de l'entendre individuellement après ce premier entretien, il n'est pas sérieusement contesté que ce dernier a convoqué l'intéressé à un entretien individuel pour recevoir ses observations orales, mais que M. X n'y a pas donné suite ; que si M. X soutient que son état de santé aurait fait obstacle à son déplacement, il ne l'établit pas ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'irrégularité de la décision d'autorisation de licenciement doit être écarté ;
Considérant que, le 4 décembre 2002, M. X a adressé à l'inspecteur du travail un document intitulé rapport du salarié dans lequel il a répondu à tous les faits qui lui étaient reprochés par son employeur et a pu, ainsi, faire valoir ses observations en défense ;
Considérant qu'après consultation du comité d'entreprise, le 23 avril 2002, la direction de la SOCIETE TEUCHOS a mis en place, à partir du 1er mai 2002, un dispositif organisant l'utilisation de bons de délégation destinés à permettre un délai de prévenance en cas d'absence des représentants du personnel pour l'exercice de leur mandat, ainsi que la comptabilisation des heures de délégation ; qu'il est constant que, malgré plusieurs rappels de sa hiérarchie, M. X a refusé de respecter ce dispositif ; que s'il fait valoir qu'un tel dispositif aurait été mis en place pour faire obstacle à ses fonctions représentatives, une telle allégation n'est établie par aucune des pièces du dossier ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a adressé plusieurs messages électroniques à des salariés de l'entreprise, critiquant certains représentants du personnel et mettant en cause la direction de l'entreprise ; qu'eu égard à leur contenu, ces messages, de nature à provoquer des perturbations et une gêne dans le travail des salariés de l'entreprise, constituaient des fautes d'une gravité suffisante pour justifier la sanction prise à l'encontre du salarié ;
Considérant, enfin, qu'il n'est nullement établi que M. X aurait fait l'objet, de la part de son employeur, d'une discrimination dans l'exercice de ses fonctions représentatives ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision implicite de l'inspecteur du travail rejetant le second recours gracieux formé le 8 avril 2003 contre la décision du 24 décembre 2002 :
Considérant que M. X n'a assorti d'aucun moyen ses conclusions dirigées contre cette décision implicite ; que, dès lors, ces conclusions doivent être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE et la SOCIETE TEUCHOS sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions litigieuses ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE et la SOCIETE TEUCHOS n'étant pas les parties perdantes dans les présentes affaires, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'ils soient condamnés à verser à M. X une somme au titre des frais exposés par lui ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'affaire de faire droit aux conclusions de la SOCIETE TEUCHOS tendant à la condamnation de M. X au paiement d'une somme en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 19 septembre 2006 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de M. X devant le tribunal administratif de Toulouse dirigées contre la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement du 21 mars 2003, contre la décision implicite rejetant le second recours hiérarchique de M. X, contre les décisions de l'inspecteur du travail du 24 décembre 2002 et du 13 mars 2003 et contre la décision implicite de l'inspecteur du travail rejetant le second recours gracieux formé le 8 avril 2003 sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de M. X et de la SOCIETE TEUCHOS tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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Nos 06BX02224 - 06BX02394