Vu la requête, enregistrée le 21 mars 2008 en télécopie et confirmée par la production de l'original le 25 mars 2008 au greffe de la Cour sous le n° 08BX00816 présentée pour M. Lucien X, demeurant ... par Me Piedbois ;
Il demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 24 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 15 septembre 2005 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a prononcé le transfert à la commune de Saint-Martin d'Arrossa des biens appartenant aux habitants du hameau d'Exave et du hameau d'Eyharce ;
- de lui allouer une somme de 1 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2009,
le rapport de Mme Fabien, premier conseiller ;
et les conclusions de Mme Viard, rapporteur public ;
Considérant que par arrêté en date du 15 septembre 2005, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a prononcé, sur la demande de la commune de Saint-Martin d'Arrossa, le transfert à cette dernière des biens appartenant aux habitants du hameau d'Exave et du hameau d'Eyharce ; que, par le jugement attaqué du 24 janvier 2008, le Tribunal administratif de Pau a rejeté comme étant irrecevable, pour défaut d'intérêt à agir, la demande de M. X tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que la requête présentée par M. X ne constitue pas la reproduction littérale de ses écritures de première instance et est accompagnée de la copie du jugement attaqué ; que les fins de non recevoir opposées par la commune de Saint-Martin d'Arrossa doivent en conséquence être écartées ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que M. X, qui s'est prévalu uniquement en première instance de sa qualité de résident de la commune de Saint-Martin d'Arrossa, se prévaut pour la première fois en appel, comme il est recevable à le faire, de sa qualité de contribuable de la commune ainsi que de sa qualité d'ayant droit de la section du hameau d'Exave en justifiant du paiement de la taxe d'habitation et de la taxe foncière au titre de l'année 2005 pour des biens immobiliers situés dans le hameau d'Exave où il précise, sans être contredit, disposer d'un domicile réel et fixe ;
Considérant en premier lieu que M. X ne se prévaut pas de la qualité d'ayant droit de la section du hameau d'Eyharce ; qu'il n'est pas soutenu et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le transfert des biens, droits et obligations de la section du hameau d'Eyharce à la commune de Saint-Martin d'Arrossa impliquerait des charges nouvelles pour cette dernière dès lors notamment qu'elle assurait déjà la gestion de ces biens et le paiement des impôts fonciers y afférents ; que, dans ces conditions, la qualité de contribuable communal dont se prévaut M. X, ne pouvait lui donner, à la date du 21 novembre 2005, intérêt pour agir à l'encontre du transfert à la commune des biens, droits et obligations de cette section ; qu'il n'est en conséquence pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a rejeté comme étant irrecevables les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des dispositions de l'arrêté préfectoral du 15 septembre 2005 en tant qu'elles concernent la section d'Eyharce ;
Considérant en second lieu que M. X justifie avoir eu la qualité d'habitant du hameau d'Exave, et donc de membre et d'ayant droit de cette section, avant le transfert le 15 septembre 2005, des biens, droits et obligations de cette section à la commune de Saint-Martin d'Arrossa ; qu'il avait ainsi le 21 novembre 2005, date d'introduction de sa demande devant le Tribunal administratif de Pau, un intérêt à agir en cette qualité à l'encontre de ce transfert ; que, par suite, il est fondé à soutenir que c'est à tort que , par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a rejeté comme irrecevables les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des dispositions de l'arrêté du 15 septembre 2005 en tant qu'elles concernent la section d'Exave ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur cette demande ;
Sur la demande d'annulation de l'arrêté du 15 septembre 2005 en tant qu'il procède au transfert des biens de la section d'Exave :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précitées ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ; que si une personne peut, en vertu de ces stipulations, être privée d'un droit patrimonial, c'est à la condition que soit respecté le juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit au respect des biens ;
Considérant que l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales dispose que Les membres de la section ont, dans les conditions résultant soit des décisions des autorités municipales, soit des usages locaux, la jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature ... ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 2411-12-1 du code général des collectivités territoriales , issues de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 : Le transfert à la commune des biens, droits et obligations d'une section de commune est prononcé par le représentant de l'Etat dans le département, sur demande du conseil municipal dans l'un des trois cas suivants : - lorsque depuis plus de cinq années consécutives, les impôts ont été payés sur le budget communal ou admis en non- valeur ; - lorsque les électeurs n'ont pas demandé la création d'une commission syndicale alors que les conditions pour une telle création, telles qu'elles sont définies aux articles L. 2411-3 et L. 2411-5, sont réunies ; - lorsque moins d'un tiers des électeurs a voté lors d'une consultation ;
Considérant que, pour prononcer, à la demande du conseil municipal de la commune de Saint-Martin d'Arrossa, le transfert à cette commune des parcelles de la section du hameau d'Exave, cadastrées section I n° 407 et 518 et d'une superficie de 9 hectares, 65 ares et 10 centiares, le préfet des Pyrénées-Atlantiques s'est fondé sur les dispositions précitées de l'article L.2411-12-1 du code général des collectivités territoriales et la circonstance que la commune aurait justifié du règlement sur le budget communal des impôts de la section du hameau d'Exave depuis plus de cinq années consécutives ;
Considérant que le transfert des biens, droits et obligations d'une section de commune à une commune a pour effet de priver les ayants droit de cette section des droits patrimoniaux qu'ils détiennent sur les biens de cette section en vertu des dispositions précitées de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales ; que la procédure de transfert organisée par les dispositions précitées du nouvel article L. 2411-12-1 de ce code et mises en oeuvre par le préfet des Pyrénées-Atlantiques ne prévoit, à l'inverse des procédures distinctes organisées par les articles L 2411-11 et 12, aucun mécanisme d'indemnisation des ayants droit des sections dont les biens sont transférés aux communes ; que cette absence de toute procédure d'indemnisation, qui n'est justifiée par aucune circonstance exceptionnelle, ne peut être regardée que comme rompant le juste équilibre devant, en vertu de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, être ménagé entre les exigences de l'intérêt général et la sauvegarde du droit au respect des biens ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 2411-12-1 sont incompatibles avec les stipulations de cet article et qu'en conséquence l'arrêté préfectoral contesté, pris sur le fondement de ces dispositions, est illégal ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques en tant qu'il prononce le transfert à la commune de Saint-Martin d'Arrossa des biens, droits et obligations de la section du hameau d'Exave ;
Sur la demande d'injonction présentée en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public...prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;
Considérant que l'exécution du présent arrêt, lequel a été publié à la Conservation des hypothèques, qui annule l'arrêté préfectoral portant transfert à la commune de Saint-Martin d'Arrossa des biens, droits et obligations de la section du hameau d'Exave, implique nécessairement que le préfet des Pyrénées-Atlantiques fasse toutes diligences pour assurer la publication à la Conservation des hypothèques du présent arrêt ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder au dépôt d'une copie conforme de ce dernier et des pièces justificatives nécessaires à la Conservation des hypothèques dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel, la somme demandée par la commune de Saint-Martin d'Arrossa au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat et de la commune de Saint-Martin d'Arrossa la somme de 500 euros chacun demandée par M. X au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1 : Le jugement du Tribunal administratif de Pau du 24 janvier 2008 est annulé en tant qu'il rejette la demande de M. X tendant à l'annulation des dispositions de l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 15 septembre 2005 se rapportant au transfert à la commune de Saint-Martin d'Arrossa des biens de la section du hameau d'Exave.
Article 2 : L'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 15 septembre 2005 est annulé en tant qu'il procède au transfert à la commune de Saint-Martin d'Arrossa des biens, droits et obligations de la section du hameau d'Exave.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Pyrénées-Atlantiques de déposer à la conservation des hypothèques, en vue de sa publication, une copie conforme du présent arrêt accompagnée des pièces justificatives nécessaires dans le délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêt.
Article 4 : L'Etat et la commune de Saint-Martin d'Arrossa verseront chacun une somme de 500 euros à M. X en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par M. X ainsi que les conclusions présentées par la commune de Saint-Martin d'Arrossa sont rejetés.
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