Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 12 février 2007, présentée pour la SARL JOUART DISTRIBUTION, dont le siège est 37 place de l'hôtel de ville à Marciac (32230), par la SCP Darnet Gendre Depuy ;
La SARL JOUART DISTRIBUTION demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 21 novembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 20 septembre 2005 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial du Gers a autorisé la SCI Marciac Immo à exploiter à Marciac un supermarché à l'enseigne Super U d'une surface de 1 100 m² ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 septembre 2005 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2008 :
- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;
- les observations de Me Depuy, avocat de la SARL JOUART DISTRIBUTION ;
- les observations de Me Pessey, avocat de la SCI Marciac Immo ;
- les observations de Me Chen, avocat de la commune de Marciac ;
- et les conclusions de M. Gosselin, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SARL JOUART DISTRIBUTION demande l'annulation du jugement du 21 novembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 20 septembre 2005 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial du Gers a autorisé la SCI Marciac Immo à exploiter à Marciac un supermarché à l'enseigne Super U d'une surface de 1 100 m² ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 720-3 du code de commerce, applicable à la date de la décision litigieuse, la commission départementale d'équipement commercial statue sur les demandes d'autorisation qui lui sont soumises suivant les principes définis à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973, en prenant notamment en considération « l'effet potentiel du projet sur l'appareil commercial et artisanal » de la zone de chalandise concernée ; qu'aux termes de l'article 18-1 du décret n° 93-306 du 9 mars 1993 définissant le contenu de la demande d'autorisation de création et d'extension d'équipement commercial : « Pour les projets de magasins de commerce de détail, la demande... est accompagnée : ... b) des renseignements suivants : 1° délimitation de la zone de chalandise du projet et mention de la population de chaque commune comprise dans cette zone ainsi que de son évolution entre les deux derniers recensements généraux ; 2° marché théorique de la zone de chalandise ; 3° équipement commercial et artisanal de la zone de chalandise, y compris les marchés accueillant des commerçants non sédentaires ; 4° équipements commerciaux exerçant une attraction sur la zone de chalandise... » ; que, pour l'application de ces dispositions, la zone de chalandise de l'équipement commercial faisant l'objet d'une demande d'autorisation, qui correspond à la zone d'attraction que cet équipement est susceptible d'exercer sur la clientèle, est délimitée en tenant compte des conditions d'accès au site d'implantation du projet et des temps de déplacement nécessaires pour y accéder ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la zone de chalandise proposée par la SCI Marciac Immo et retenue à bon droit, eu égard à la dimension et à la nature du projet contesté, par la commission départementale d'équipement commercial du Gers, a été définie par une courbe isochrone de douze minutes autour du lieu d'implantation du projet ; que cette courbe, qui correspond au temps de déplacement nécessaire pour accéder au site d'implantation du projet, permet de déterminer la zone d'attraction que cet équipement est susceptible d'exercer sur la clientèle ; que le pétitionnaire n'a pas commis d'erreur matérielle en excluant de la zone ainsi définie le magasin Super U de Maubourguet, situé à plus de quinze minutes du lieu d'implantation du projet contesté ; que le rapport d'instruction de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes fait mention de l'influence exercée par le magasin Super U de Maubourguet sur la population de la zone de chalandise ; que, dans ces conditions, et contrairement à ce qui est soutenu, la commission départementale d'équipement commercial du Gers s'est prononcée sur la base de données complètes et exactes, la mettant à même d'apprécier l'impact du projet au regard des critères fixés par le législateur ;
Considérant que si la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait présenté un rapport défavorable à un précédent projet de la SCI Marciac Immo, caractérisé par une superficie de 1 390 m², une offre de produits alimentaires diversifiés et de nombreux services de vente à la coupe, aucune disposition législative ou réglementaire n'interdisait à ce service, après nouvelle instruction du dossier, de présenter un rapport favorable à un nouveau projet, caractérisé par une surface de 1 100 m², une offre de produits alimentaires de base, et une réduction des services de vente à la coupe ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 720-1 du code de commerce : « Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés » ; qu'aux termes de l'article L. 720-3 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : « I. Une commission départementale d'équipement commercial... statue en prenant en considération : 1° l'offre et la demande globale pour chaque secteur d'activité dans la zone de chalandise concernée ; l'impact global du projet sur les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ; la qualité de la desserte en transport public ou avec des modes alternatifs ; les capacités d'accueil pour le chargement et le déchargement des marchandises ; 2° la densité d'équipement en moyennes et grandes surfaces dans cette zone ; 3° l'effet potentiel du projet sur l'appareil commercial et artisanal de cette zone et des agglomérations concernées, ainsi que sur l'équilibre souhaitable entre les différentes formes de commerce ; 4° l'impact éventuel du projet en termes d'emplois salariés et non salariés ; 5° les conditions d'exercice de la concurrence au sein du commerce et de l'artisanat... » ; que, pour l'application des dispositions combinées des articles L. 720-1 à L. 720-3 du code de commerce, alors applicables, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les différentes formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs que le projet peut présenter au regard notamment de l'emploi, de l'aménagement du territoire, de la concurrence, de la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, de la satisfaction des besoins des consommateurs ;
Considérant que si, dans la zone de chalandise retenue, le projet litigieux est susceptible d'aboutir à un dépassement de la densité nationale dans le secteur de l'alimentation, alors que la population de cette zone est en diminution, ce dépassement doit être relativisé, compte tenu de ce qu'il permet de limiter l'évasion commerciale très importante sur la zone de chalandise dans le domaine alimentaire, de développer la concurrence, de satisfaire les besoins des consommateurs et de créer des emplois ; qu'ainsi, la commission départementale d'équipement commercial du Gers n'a pas méconnu les objectifs fixés par le législateur en délivrant l'autorisation demandée ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorisation litigieuse aurait pour conséquence que l'enseigne Super U exploite abusivement une position dominante ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 420-2 du code de commerce, qui prohibe l'exploitation abusive d'une position dominante doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL JOUART DISTRIBUTION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 21 novembre 2006, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la SARL JOUART DISTRIBUTION la somme qu'elle demande au titre des frais de procès non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner la SARL JOUART DISTRIBUTION à verser à la SCI Marciac Immo et à la commune de Marciac respectivement une somme de 800 € sur le même fondement ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL JOUART DISTRIBUTION est rejetée.
Article 2 : La SARL JOUART DISTRIBUTION est condamnée à verser respectivement à la SCI Marciac Immo et à la commune de Marciac une somme de 800 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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No 07BX00310