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13/05/2008 | FRANCE | N°06BX01264

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 13 mai 2008, 06BX01264


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 19 juin 2006, présentée pour la COMMUNE DE BIDART, dont le siège est situé place Sauveur Atchoarena à Bidart (64210), par la SELARL Yves Darmendrail et Pierre Santé, avocats au barreau de Pau ;

La COMMUNE DE BIDART demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 13 avril 2006, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui rembourser les sommes engagées au titre des travaux de lutte contre la pollution marine et à lui verser des

dommages et intérêts ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer 63 44...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 19 juin 2006, présentée pour la COMMUNE DE BIDART, dont le siège est situé place Sauveur Atchoarena à Bidart (64210), par la SELARL Yves Darmendrail et Pierre Santé, avocats au barreau de Pau ;

La COMMUNE DE BIDART demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 13 avril 2006, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui rembourser les sommes engagées au titre des travaux de lutte contre la pollution marine et à lui verser des dommages et intérêts ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer 63 445,13 € au titre de l'acquisition du matériel nécessaire au nettoyage des plages, 127 182,19 € au titre du stockage, de l'évacuation et du traitement des déchets collectés et 21 768 € à titre de réparation du préjudice supplémentaire distinct résultant pour la commune du comportement fautif de l'Etat ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2008 :
- le rapport de M. Dronneau, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'à la suite du naufrage du pétrolier « Prestige », survenu le 19 novembre 2002 au large des côtes espagnoles, des arrivages massifs d'hydrocarbures ayant pollué les eaux territoriales françaises et les côtes du littoral atlantique, l'Etat a déclenché le plan Polmar, notamment le volet « terre », le 5 décembre 2002 ; que ce plan ayant été levé le 25 juin 2003, la COMMUNE DE BIDART a demandé au préfet de la région Aquitaine, le 7 mai 2004, de lui rembourser la somme de 217 689,19 € correspondant aux dépenses qu'elle avait engagées au titre de la collecte des déchets et du nettoyage des plages à la suite de ce naufrage et qui n'avaient pas été prises en charge dans le cadre du plan Polmar ; que la COMMUNE DE BIDART relève appel du jugement en date du 13 avril 2006, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer cette somme, outre 21 768 € de dommages et intérêts ;


Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le tribunal administratif de Bordeaux a omis de répondre au moyen invoqué par la COMMUNE DE BIDART tiré de ce que l'Etat aurait manqué à ses engagements en ne remboursant pas les dépenses exposées par les communes à l'occasion de cette pollution ; que, dès lors, la COMMUNE DE BIDART est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par la COMMUNE DE BIDART devant le tribunal administratif de Bordeaux ;


Sur les dépenses de nettoyage :

Considérant que si, en réponse à la lettre de la COMMUNE DE BIDART du 7 mai 2004, le préfet de la région Aquitaine a rejeté l'essentiel des demandes formulées par elle, il a accepté de lui rembourser la somme de 27 061,58 € correspondant à des dépenses engagées avant la levée du plan Polmar ; qu'il résulte de l'instruction que cette somme a été mandatée à la COMMUNE DE BIDART le 4 août 2004 ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la COMMUNE DE BIDART à concurrence de la somme de 27 061,58 € ;


Sur les dépenses d'acquisition de matériels, de collecte, de stockage et d'élimination des déchets :

Considérant, en premier lieu, que l'instruction du premier ministre du 4 mars 2002 relative au fonds d'intervention contre les pollutions marines accidentelles fixe les modalités d'utilisation, de gestion et de réalimentation du fonds d'intervention contre les pollutions marines accidentelles ; qu'eu égard à son contenu, elle présente un caractère réglementaire, dont la COMMUNE DE BIDART est fondée à se prévaloir ;

Considérant qu'aux termes du 1.2 de ladite instruction : « Le financement par le fonds d'intervention des dépenses effectuées pour prévenir ou lutter contre la pollution est soumis à trois conditions cumulatives : la nécessité de mettre en oeuvre des moyens importants qui dépassent les capacités d'intervention courantes des services de l'Etat ; le caractère exceptionnel des dépenses engagées ; une demande d'intervention émanant du préfet maritime ou du préfet de département. » qu'aux termes du 1.3 de la même instruction : « L'engagement des dépenses découle notamment d'un des actes suivants : la passation d'une commande, dans le respect des dispositions du code des marchés publics ; une réquisition (...) ; la mise en oeuvre d'un accord international (...). Les acquisitions sont toujours réalisées par l'Etat et pour son propre compte (...) » ; que si la COMMUNE DE BIDART entend demander à l'Etat la prise en charge du solde des dépenses exposées pour l'acquisition d'un tracteur et d'une cribleuse à raison de la somme de 63 445,13 €, l'Etat soutient sans être utilement contredit que ces acquisitions ont été effectuées à la seule initiative de la commune ; que, dès lors, quand bien même il s'agirait de dépenses exceptionnelles pour la COMMUNE DE BIDART, ces acquisitions de matériels n'étaient pas éligibles au fonds d'intervention contre les pollutions marines accidentelles ; que la somme de 127 182,19 €, correspondant à des dépenses de la COMMUNE DE BIDART pour le stockage, l'évacuation et l'élimination de déchets collectés postérieurement à la levée du plan Polmar « terre », ne sont pas en lien direct avec une demande d'intervention du préfet maritime ou du préfet de département ; qu'il ne résulte d'ailleurs pas de l'instruction qu'elles découlent de la passation d'une commande dans le respect des dispositions du code des marchés publics ; que, par suite, ces dépenses n'étaient pas davantage éligibles audit fonds ; qu'ainsi, la COMMUNE DE BIDART, n'est pas fondée à soutenir qu'en écartant ces demandes, le préfet de la région Aquitaine aurait méconnu l'instruction du 4 mars 2002 ;

Considérant, en deuxième lieu, que, lorsque l'Etat a levé le plan Polmar « terre », le 25 juin 2003, les arrivages sur le littoral de déchets d'hydrocarbures provenant du « Prestige » avaient fortement diminué et si les plages de la commune étaient encore souillées par des « boulettes d'hydrocarbures », ces dépôts ne revêtaient pas une importance telle qu'ils nécessitaient le maintien du plan Polmar ; que, dès lors, l'Etat a pu, sans erreur manifeste d'appréciation, lever ce plan le 25 juin 2003 ; qu'au demeurant, il résulte de l'instruction qu'après cette date, l'Etat a poursuivi la prise en charge des travaux de dépollution des surfaces rocheuses dont la COMMUNE DE BIDART a bénéficié ; que, de surcroît, la carence alléguée des services de l'Etat à mettre à la disposition de la commune des bennes destinées à collecter les déchets de pollution n'est pas établie ;

Considérant, en troisième lieu, que si la COMMUNE DE BIDART soutient que l'Etat aurait manqué aux engagements qu'il aurait pris de rembourser intégralement les dépenses exposées par les communes au titre de la lutte contre la pollution résultant de ce sinistre, elle ne produit devant la cour aucun élément de nature à justifier le bien-fondé de ses allégations ;

Considérant qu'en l'absence d'éligibilité des dépenses exposées au fonds d'intervention contre les pollutions marines accidentelles et de faute de l'Etat, la COMMUNE DE BIDART n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui rembourser les dépenses dont s'agit ; que, par voie de conséquence, elle n'est pas davantage fondée à solliciter la condamnation de l'Etat à lui payer des dommages et intérêts ;



Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la COMMUNE DE BIDART la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;


DECIDE :


Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 13 avril 2006 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la COMMUNE DE BIDART à concurrence de la somme de 27 061,58 €.

Article 3 : Les conclusions de la COMMUNE DE BIDART, présentées devant le tribunal administratif de Bordeaux sont rejetées.

2
No 06BX01264


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 06BX01264
Date de la décision : 13/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. VALEINS
Avocat(s) : SELARL DARMENDRAIL ET SANTI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-05-13;06bx01264 ?
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