Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 décembre 2003, présentée pour M. Jean X, demeurant ..., par Me Guiraud ;
M. X demande à la cour :
1) d'annuler le jugement en date du 25 septembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Basse-terre a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1996 ;
2) à titre principal, de prononcer ladite décharge et, à titre subsidiaire, de demander l'avis du Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 113-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ;
Vu le traité conclu le 10 août 1877 pour la rétrocession à la France de l'île de Saint-Barthélemy, ensemble la loi du 3 mars 1878 approuvant ce traité et le décret du 12 mars 1878 portant promulgation dudit traité, avec le protocole qui était annexé ;
Vu l'article 55-B de la loi du 29 juin 1918 ;
Vu la loi n° 46-451 du 19 mars 1946 ;
Vu le décret n° 48-563 du 30 mars 1948 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2006 :
- le rapport de M. Marrou, président-rapporteur,
- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;
Sur le principe de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu :
Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient M. X pour établir que les habitants de la commune de Saint-Barthélemy (Guadeloupe) ne seraient pas assujettis à l'impôt sur le revenu, ni l'acte du 26 mars 1804 du gouvernement royal suédois, qui se borne à ajourner l'instauration d'une capitation et d'un impôt foncier dans l'île de Saint-Barthélemy, ni le décret royal du 25 septembre 1811, dont les dispositions invoquées se bornent à limiter, sauf exception, la perception des contributions directes et indirectes dans l'île aux montants résultant des « mandatements et ordonnances », n'ont reconnu aux habitants de Saint-Barthélemy un droit à exemption définitive et irrévocable d'impôt direct ; que, dans ces conditions, et même si des représentants de l'Etat français avaient manifesté, lors de la signature du traité, l'intention du gouvernement de ne pas grever les habitants de l'île davantage que sous la domination suédoise, les stipulations de l'article 3 du protocole annexé au traité du 10 août 1877 par lequel la Suède a rétrocédé l'île de Saint-Barthélemy à la France, aux termes desquelles « la France succède aux droits et obligations résultant de tous actes régulièrement faits par la couronne de Suède ou en son nom pour des objets d'intérêt public ou domanial concernant spécialement la colonie de Saint-Barthélemy et ses dépendances » n'ont ni pour objet ni pour effet de garantir aux habitants de Saint-Barthélemy un droit à être définitivement exemptés de tout impôt direct qui ne leur avait pas été reconnu avant le transfert de l'île sous la souveraineté française avec le consentement de sa population ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 3 mars 1878 portant approbation du traité susmentionné : « L'île de Saint-Barthélemy sera considérée, au point de vue politique, administratif et judiciaire, comme une dépendance de la Guadeloupe. En conséquence, toutes les lois, tous les règlements et arrêtés publiés ou promulgués à la Guadeloupe, auront force et vigueur à Saint-Barthélemy à partir du jour de l'installation de l'autorité française dans cette île » ; que, conformément à l'article 55 B de la loi du 29 juin 1918, un arrêté du gouverneur de la Guadeloupe et dépendances en date du 29 juin 1922 a rendu exécutoire une délibération en date du 2 juin 1922 du conseil général de la Guadeloupe et dépendances établissant dans cette colonie un impôt général sur le revenu et en fixant le mode d'assiette et les règles de perception dans les formes et conditions proposées par le Conseil d'Etat ; que les lois susrappelées des 3 mars 1878 et 29 juin 1918 ne sont pas incompatibles avec les stipulations du traité du 10 août 1877 lesquelles, ainsi qu'il a été dit précédemment, ne conféraient pas aux habitants de Saint-Barthélemy un droit à l 'exemption définitive de tout impôt direct ; que l'arrêté et la délibération susmentionnés ayant été régulièrement publiés, les habitants de la commune de Saint-Barthélemy ont été, à compter de l'entrée en vigueur de cette délibération, légalement soumis, comme les autres habitants de la colonie de la Guadeloupe et dépendances, à un impôt général sur le revenu ;
Considérant, en troisième lieu, que la loi du 19 mars 1946 qui a érigé en départements français les colonies de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Réunion et de la Guyane française dispose en son article 2 que « les lois et décrets actuellement en vigueur dans la France métropolitaine et qui ne sont pas encore appliqués à ces colonies feront … l'objet de décrets d'application à ces nouveaux départements » ; que ces dispositions ne sont pas incompatibles avec les stipulations du traité susmentionné du 10 août 1877 ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 48-563 du 30 mars 1948, pris régulièrement sur le fondement de cette disposition législative : « Sous réserve des exceptions, dérogations et mesures transitoires énumérées dans les articles qui suivent, sont déclarés exécutoires dans le département de la Guadeloupe à compter du 1er janvier 1948, et pour autant que leurs dispositions n'y sont pas déjà introduites : le code général des impôts directs et taxes assimilées en vigueur dans la France métropolitaine au 19 mars 1946 et les textes qui l'ont modifié ou complété, les lois et ordonnances relatives aux contributions directes et taxes assimilées en vigueur dans la France métropolitaine à la même date et non codifiées et les textes qui les ont modifiées ou complétées, les décrets et arrêtés pris pour l'application du code et des textes susvisés » ;
Considérant que, comme il a été dit précédemment, à la date à laquelle est intervenu le décret du 30 mars 1948, les habitants de la commune de Saint-Barthélemy n'étaient pas, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, placés sous un régime juridique différent de celui applicable aux autres habitants du département de la Guadeloupe ; que, dès lors, les dispositions de l'article 20 de ce décret, en vertu desquelles « le régime particulier appliqué aux dépendances de Saint-Martin et Saint-Barthélemy est maintenu provisoirement en vigueur » ne peuvent être interprétées comme ayant eu pour objet de maintenir provisoirement en vigueur un régime juridique particulier aux habitants de cette commune en matière d'impôt sur le revenu ;
Considérant, enfin, que les notes de l'administration fiscale des 3 juillet 1948 et 4 décembre 1957, qui n'ont d'ailleurs pas été publiées, sont relatives au régime de taxes sur le chiffre d'affaires applicable à Saint-Martin et Saint-Barthélemy ; que, par suite, et en tout état de cause, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ces notes dans le présent litige sur le fondement de l'article L 80 A du livre des procédure fiscales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se prévaloir de ce qu'il ne serait pas, en sa qualité d'habitant de Saint-Barthélemy, assujetti à l'impôt sur le revenu ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier protocole additionnel à cette convention :
Considérant que, si les stipulations combinées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 14 de la même convention peuvent être utilement invoquées pour soutenir que la loi fiscale serait à l'origine de discriminations injustifiées entre contribuables, elles sont en revanche sans portée dans les rapports institués entre la puissance publique et un contribuable à l'occasion de l'établissement ou du recouvrement de l'impôt ; que, par suite, M. X ne peut utilement soutenir que l'administration aurait méconnu ces stipulations en l'assujettissant à l'impôt sur le revenu alors que la plupart des habitants de l'île bénéficieraient d'une exonération de fait ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Basse-terre a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1996 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 03BX02479