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12/10/2004 | FRANCE | N°01BX01397

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2eme chambre (formation a 3), 12 octobre 2004, 01BX01397


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif respectivement enregistrés au greffe de la Cour les 5 juin et 2 juillet 2001, présentés par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le CENTRE HOSPITALIER de NIORT, dûment représenté par son directeur et dont le siège social est situé 40, avenue Charles de Gaulle à Niort cedex (79021) ;

Le CENTRE HOSPITALIER de NIORT demande à la Cour :

* à titre principal,

- d'annuler le jugement en date du 22 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Poitiers l'a notamment condamné, en prem

ier lieu, à verser à M. et Mme Y, en qualité de représentants légaux de leur fil...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif respectivement enregistrés au greffe de la Cour les 5 juin et 2 juillet 2001, présentés par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le CENTRE HOSPITALIER de NIORT, dûment représenté par son directeur et dont le siège social est situé 40, avenue Charles de Gaulle à Niort cedex (79021) ;

Le CENTRE HOSPITALIER de NIORT demande à la Cour :

* à titre principal,

- d'annuler le jugement en date du 22 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Poitiers l'a notamment condamné, en premier lieu, à verser à M. et Mme Y, en qualité de représentants légaux de leur fils mineur Maxime, une rente annuelle de 220 000 F allouée à compter du 30 décembre 1989 et jusqu'à la majorité de l'enfant, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 1999, en deuxième lieu à verser à M. et Mme Y en réparation de leur préjudice propre la somme de 250 000 F chacun, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 1999, en troisième lieu, à supporter les frais d'expertise ;

- de rejeter la demande présentée par M. et Mme Y devant le tribunal administratif de Poitiers ;

.........................................................................................................................

* à titre subsidiaire :

- de diminuer le montant de la réparation allouée à la victime ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 septembre 2004 :

le rapport de Mme Roca, premier conseiller ;

les observations de Me Demailly, collaborateur de Me Le Prado, pour le CENTRE HOSPITALIER de NIORT ;

les observations de Me Masson de la SCP Inter-Barreaux Bressuire-Niort pour M. et Mme Y ;

et les conclusions de M. Péano, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 31 décembre 1989 à 0H45 Mme Y a été admise au bloc obstétrical du CENTRE HOSPITALIER de NIORT pour un accouchement survenant au terme d'une grossesse normale ; qu'à la suite de l'apparition à 10H36 minutes de troubles dans le rythme cardiaque de l'enfant, une procidence du cordon ombilical, ayant entraîné une souffrance foetale aigüe avec une anoxie, était diagnostiquée et le médecin obstétricien décida de pratiquer une césarienne sous anesthésie générale ; que l'enfant, de sexe masculin, né entre 11H10 et 11H20, a dû à sa naissance être réanimé et intubé et a présenté dans les heures qui ont suivi un état convulsif généralisé ; qu'il demeure atteint de séquelles motrices et cérébrales majeures à l'origine d'une incapacité permanente partielle évaluée à 95 % ; que le CENTRE HOSPITALIER de NIORT conteste le jugement du 22 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Poitiers l'a déclaré entièrement responsable desdites séquelles et l'a condamné à verser à M. et Mme Y en qualité de représentants légaux de leur fils mineur une rente annuelle de 220 000 F de la naissance jusqu'à la majorité de l'enfant, et en réparation de leur préjudice personnel la somme de 250 000 F chacun, ces deux sommes devant porter intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 1999 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si le requérant soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé au regard des conclusions dont le tribunal administratif était saisi de sa part, il n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur la responsabilité et sans qu'il soit besoin de statuer sur le bien-fondé de l'exception de prescription quadriennale :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif, confirmé sur ce point par le rapport du médecin de la compagnie d'assurance des époux Y, que le médecin anesthésiste qui était présent dans l'hôpital le 31 décembre 1989, a été prévenu sans délai qu'une césarienne devait être réalisée en urgence et s'est rendu rapidement disponible pour rejoindre le bloc opératoire ; qu'aucun texte n'imposait à l'époque des faits qu'un médecin anesthésiste fût présent en permanence dans le service d'obstétrique ; qu'il n'est pas établi que le délai qui s'est écoulé entre la décision de pratiquer la césarienne et l'extraction de l'enfant serait imputable de quelque manière que ce soit au médecin anesthésiste ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que l'absence d'un médecin anesthésiste susceptible d'intervenir sans délai avait privé Mme Y et son enfant des garanties médicales qu'ils étaient en droit d'attendre de l'hôpital et s'est fondé sur cette carence, regardée comme un défaut dans l'organisation du service, pour retenir la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER de NIORT ;

Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres manquements invoqués par M. et Mme Y à l'encontre du CENTRE HOSPITALIER de NIORT ;

Considérant que si le bloc chirurgical du CENTRE HOSPITALIER de NIORT n'était pas situé à l'époque des faits à proximité immédiate du service d'obstétrique, il ne ressort pas de la description des lieux faite par l'expert que cette circonstance serait en l'espèce constitutive d'un aménagement défectueux des locaux ; qu'elle ne constitue pas davantage un manquement à une obligation légale ;

Considérant que, compte tenu de l'urgence qui était attachée à la réalisation de la césarienne, aucun manquement au devoir d'information ne peut être retenu à l'encontre du centre hospitalier quant aux risques présentés par l'intervention chirurgicale pratiquée ; que M. et Mme Y ne sauraient utilement faire état d'un manque d'information relatif à l'agencement des locaux ;

Considérant enfin qu'il ressort du rapport de l'expert précité que le diagnostic de procidence du cordon ombilical a été émis dans les 5 minutes qui ont suivi le début des troubles du rythme cardiaque de l'enfant, et la décision, considérée comme justifiée, de pratiquer une césarienne a été prise immédiatement ; que la patiente a été transférée sur le champ au bloc opératoire avec l'aide d'un interne qui a tenté pendant le transport de diminuer la compression du cordon ombilical par la tête foetale ; que l'intervention a été réalisée conformément aux règles de l'art, après que le médecin obstétricien ait procédé à un nouvel examen de Mme Y afin de vérifier s'il n'y avait pas à cet instant une possibilité d'extraction par forceps ; que, selon l'expert, le délai de 35 minutes qui s'est écoulé entre le diagnostic de procidence du cordon ombilical et l'extraction de l'enfant est tout à fait acceptable et ne peut être critiqué ; que, dans ces conditions, aucune faute médicale ne peut être retenue à l'encontre du CENTRE HOSPITALIER de NIORT ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a retenu sa responsabilité ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler ce jugement, à l'exception de son article 5 en tant qu'il rejette les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres, et de mettre les frais de l'expertise à la charge de M. et Mme Y ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le CENTRE HOSPITALIER de NIORT, qui n'est pas partie perdante, soit condamné à verser à M. et Mme Y une somme au titre des frais engagés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 22 mars 2001 est annulé en ses articles 1, 2, 3 et 4. L'article 5 de ce même jugement est annulé uniquement en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme Y.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme Y devant le tribunal administratif de Poitiers ainsi que leurs conclusions présentées en appel tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les frais de l'expertise sont mis à la charge de M. et Mme Y.

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No 01BX01397


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 01BX01397
Date de la décision : 12/10/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHAVRIER
Rapporteur ?: Mme Marlène ROCA
Rapporteur public ?: M. REY
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2004-10-12;01bx01397 ?
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