Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 4 août 2000, présentée pour la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION, représentée par son maire, par la SCP Gangate-Magamootoo, avocat ;
LA COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 3 mai 2000, rectifié le 12 mai 2000, par lequel le tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion, saisi par déféré du préfet de la Réunion, a annulé les marchés conclus le 23 mars, le 5 mai, les 26 et 30 juillet 1999 avec l'entreprise Jack Serge, le 17 mai et le 15 juillet 1999 avec l'entreprise Vivendi, le 21 juillet 1999 avec l'entreprise Star Vidange, le 23 août 1999 avec l'entreprise Madef et le 2 décembre 1999 avec l'entreprise SSABTP pour la rénovation et l'extension des réseaux d'eaux usées ;
- de rejeter la demande du préfet de la Réunion ;
- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 000 francs au titre de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Classement CNIJ : 39-02-02-05 C+
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 82-389 du 10 mai 1982 ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2004 :
- le rapport de Mme Balzamo, conseiller ;
- et les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que, dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif le 23 mars 2000 à 8 h 15, avant la clôture de l'instruction fixée le même jour à 12 h, et visé par le jugement attaqué, la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION a soulevé l'irrecevabilité, pour défaut de compétence du signataire de la demande et tardiveté, du déféré préfectoral tendant à l'annulation des neufs marchés passés pour la réhabilitation de son réseau d'eaux usées ; que le tribunal a omis de répondre à ces fins de non-recevoir ; que, par suite, le jugement attaqué, en date du 3 mai 2000, ainsi que l'ordonnance rectificative du 12 mai 2000 doivent être annulés ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le préfet de la région et du département de la Réunion devant le tribunal administratif ;
Sur la recevabilité du déféré préfectoral :
Considérant, en premier lieu, que l'article 17 du décret du 10 mai 1982 susvisé dispose que : Le préfet peut donner délégation de signature : 1° Au secrétaire général (...) en toutes matières (...) ; que ce texte autorise le préfet à déléguer sa signature au secrétaire général de la préfecture pour l'exercice du contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics ;
Considérant que M. X..., secrétaire général pour les affaires économiques et régionales de la préfecture de la Réunion, signataire de la demande devant le tribunal, avait reçu une délégation de signature à cet effet le 7 décembre 1998, publiée au recueil des actes de la préfecture de la Réunion en décembre 1998 ; que, par suite, le déféré du préfet de la Réunion dirigé contre lesdits marchés a été introduit par une personne qui avait qualité pour le faire ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les courriers du préfet de La Réunion demandant au maire de SAINT DENIS DE LA REUNION de retirer les marchés reçus en préfecture les 23 mars, 5 et 19 mai, 8 juillet, 15 juillet, 21 juillet, 26 juillet, 30 juillet et 15 septembre 1999, relatifs à des travaux de réhabilitation et d'extension du réseau d'eaux usées, sont parvenus par télécopie à la mairie le 9 juillet, le 12 août et le 22 septembre 1999 ; qu'ainsi, la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION se bornant à affirmer que les données du télécopieur auraient pu être falsifiées sans produire les pièces qui permettraient d'établir d'autres dates de réception de ces courriers qu'elle ne prétend pas ne pas avoir reçu, lesdits courriers sont arrivés avant l'expiration du délai de recours contentieux et ont eu pour effet d'interrompre ce délai ; que, dès lors, le déféré du préfet de la Réunion, faisant suite aux refus tacites opposés à ses recours gracieux par le maire de SAINT DENIS DE LA REUNION, enregistré au greffe du tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion le 6 janvier 2000, n'était pas tardif ;
Considérant qu'il suit de là que le déféré du préfet est recevable ;
Sur la légalité des marchés en litige :
En ce qui concerne les marchés négociés :
Considérant qu'aux termes de l'article 104 du code des marchés publics, alors en vigueur, applicable aux marchés passés par les collectivités territoriales en application de l'article 308 du même code : Les marchés négociés sont passés avec ou sans mise en concurrence. Les marchés sont passés après une mise en concurrence préalable dans les cas limitativement énumérés ci-dessous : ..10° Pour les travaux, fournitures ou services dont la valeur n'excède pas, pour le montant total de l'opération, un seuil de 700 000 F (TTC). (...) ;
Considérant que la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION a passé en 1999 huit marchés négociés pour la réfection et l'extension de différentes portions de son réseau d'eaux usées en centre-ville et dans le quartier Sainte Clotilde ; qu'eu égard à l'unité d'objet de ces travaux tendant à la modernisation du réseau concerné et mettant en oeuvre les mêmes procédés techniques, à leur proximité géographique, et à leur date d'exécution rapprochée, seul le coût total de cette opération de la commune, réalisée sous la maîtrise d'oeuvre de ses services techniques, devait être pris en compte ; que ce montant excède le seuil de 700 000 F fixé par l'article 104 précité du code des marchés publics ; qu'ainsi, et alors même que lesdits travaux concerneraient des secteurs différents de ce réseau, la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION ne pouvait recourir à la procédure du marché négocié ; que le préfet de la Réunion est, dès lors, fondé à soutenir que ces marchés ont été passés selon une procédure irrégulière et à en demander l'annulation ;
En ce qui concerne le marché passé après appel d'offres ouvert :
Considérant, en premier lieu, que la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION a conclu avec l'entreprise SSABTP un marché d'un montant de 1 004 553 F pour des travaux ayant le même objet, après appel d'offres ouvert et publication de l'avis d'appel public à la concurrence ; que, par suite, et quand bien même ledit marché porte sur des travaux se rattachant à la même opération que les marchés négociés, le préfet de la Réunion n'est pas fondé à soutenir qu'il a été passé en méconnaissance de l'article 104 précité du code des marchés publics ;
Considérant, en deuxième lieu, que si le préfet soutient que le marché en litige a été passé par une autorité incompétente, il ressort des pièces produites que le maire de la commune a été autorisé à signer ledit marché par délibération du conseil municipal en date du 17 septembre 1999, conformément aux dispositions de l'article L. 2122-22-4° du code général des collectivités territoriales ;
Considérant, enfin, que si le préfet soutient que la COMMUNE DE SAINT DENIS n'a pas, en méconnaissance de l'article 272 du code des marchés publics alors en vigueur, défini précisément la nature et l'étendue de ses besoins, il ressort des documents du marché soumis à appel d'offres que son objet consiste en l'extension du réseau d'assainissement en eaux usées de la rue Jules Auber et que les travaux projetés ainsi que leur montant et leur durée y sont définis précisément ; que, dès lors, le préfet de la Réunion n'établit pas la méconnaissance des dispositions de l'article 272 du code des marchés publics ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Réunion n'est pas fondé à demander l'annulation du marché passé après appel d'offres ouvert ;
Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante soit condamné sur le fondement de ces dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement en date du 3 mai 2000 du tribunal administratif de Saint Denis de La Réunion et l'ordonnance rectificative du 12 mai 2000 sont annulés.
Article 2 : Les marchés passés par la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION en vue de la rénovation et de l'extension de son réseau d'eaux usées avec :
- l'entreprise Jack Serge les 23 mars, 5 mai, 26 juillet et 30 juillet 1999 ;
- l'entreprise Vivendi les 17 mai, et 15 juillet 1999 ;
- l'entreprise Star Vidange le 21 juillet 1999 ;
- l'entreprise MADEF le 10 septembre 1999, sont annulés.
Article 3 : Le surplus de la requête de la COMMUNE DE SAINT DENIS DE LA REUNION est rejeté.
Article 4 : Le surplus des conclusions du déféré du préfet de La Réunion devant le tribunal administratif de Saint Denis de la Réunion est rejeté.
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N° 00BX01821