Vu la requête, enregistrée le 6 août 1998 au greffe de la cour, présentée pour Mme Catherine X... demeurant rue de la Croix Guérin à Saint Pompain (Deux-Sèvres), par Me Y..., avocat ;
Mme X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 mai 1998 du tribunal administratif de Poitiers en tant que par ce jugement le tribunal a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part de la décision du préfet des Deux-Sèvres du 11 avril 1995, portant déchéance de ses droits à l'aide spéciale aux jeunes agriculteurs, rejet de sa demande de prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes et reversement de la prime perçue au titre de l'année 1993, et d'autre part de la décision du préfet des Deux-Sèvres du 4 juillet 1995 prononçant le déclassement des trois prêts bonifiés qu'elle avait obtenus les 18 mai 1992 et 1er août 1994 ;
2°) d'annuler les décisions susvisées, et d'ordonner le remboursement par l'Etat des prêts bonifiés à concurrence de ce qui a été remboursé par elle ainsi que le montant de la dotation aux jeunes agriculteurs ;
3°) de condamner l'Etat au paiement des sommes Acorrespondant à 60.6 droits à prime pour 1994, 1995, 1996, 1997 et 1998 ;
4°) dire que ces sommes porteront intérêts sur les sommes non perçues, tant au titre des prêts que de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes ;
5°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 10.000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement (CEE) n° 2066/92 du 30 juin 1992 ;
Vu le règlement (CEE) n° 2328/91 du 15 juillet 1991 ;
Vu le code rural ;
Vu le décret n° 88-176 du 23 février 1988 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2001 :
- le rapport de M. Bichet, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Heinis, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le préfet des Deux-Sèvres a accordé à Mme X..., par décision du 30 novembre 1990, des aides à l'installation aux jeunes agriculteurs, comprenant le versement d'une dotation et la bonification de prêts, puis, par décision du 8 novembre 1993, une dotation spéciale aux jeunes agriculteurs ; que, par ailleurs, Mme X... a obtenu en novembre 1993, le bénéfice de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes, et a renouvelé sa demande d'allocation de ladite prime au titre de 1994 ; que le préfet a annulé, le 13 mars 1995, sa décision du 30 novembre 1990, au motif principal que, l'intéressée exerçant depuis 1990 un emploi d'agent public, elle ne remplissait pas les conditions requises pour l'obtention des aides en cause ; que par décision du 11 avril 1995 il a rejeté la demande de prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes présentée au titre de 1994 et a exigé le reversement de celle qui avait été versée au titre de 1993 ; que, par décision du 18 mai 1995, il a annulé sa décision du 8 novembre 1993 relative à la dotation spéciale aux jeunes agriculteurs, et enfin, par trois décisions du 4 juillet 1995 il a déclassé trois prêts bancaires auxquels une bonification avait été appliquée en vertu de sa décision du 30 novembre 1990 ; que le tribunal administratif de Poitiers, après avoir joint les quatre demandes présentées par Mme X... dirigées contre plusieurs de ces décisions, a rejeté, par jugement du 20 mai 1998, les conclusions de l'intéressée ; que celle-ci demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 11 avril 1995 et des trois décisions du 4 juillet 1995 ;
Sur la recevabilité des conclusions tendant à ce que la cour ordonne le reversement de sommes remboursées au titre des prêts bonifiés, de la dotation aux jeunes agriculteurs , de montants de primes à la vache allaitante au titre de 1994, 1995, 1996 1997 et 1998, outre intérêts de droit sur les sommes qui auraient dû être versées :
Considérant que ces conclusions sont nouvelles en appel, et comme telles irrecevables ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 11 avril 1995 :
Considérant qu'il résulte de l'examen des dossiers de première instance que Mme X... a demandé l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 11 avril 1995 par laquelle le préfet des Deux-Sèvres a rejeté sa demande de prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes au titre de 1994 et a décidé que l'intéressée reverserait le montant de ladite prime perçue au titre de 1993 ; que le tribunal administratif de Poitiers a omis de statuer sur ces conclusions ; que Mme X... est fondée à demander l'annulation de ce jugement dans cette mesure ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur lesdites conclusions :
Considérant que l'exposé des motifs du règlement n° 2066/92 du 30 juin 1992 du Conseil des Communautés européennes qui a modifié le règlement CEE n° 805/68, notamment en ce qui concerne le régime de prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes, indique qu' Aafin de maintenir la cohérence du droit agricole communautaire, il est approprié, pour la mise en ouvre des conditions relatives à l'extensification de la production, de recourir à des actes législatifs en vigueur ; qu'il s'agit en l'occurrence du règlement (CEE) n° 2328/91 du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant l'amélioration de l'efficacité des structures de l'agricultureY ; qu'aux termes du paragraphe 5 de l'article 5 de ce dernier règlement : ALes Etats membres définissent la notion d'exploitant à titre principal aux fins du présent règlement. Pour les personnes physiques, cette définition comprend au moins la condition que la part du revenu provenant de l'exploitation agricole soit égale ou supérieure à 50% du revenu global de l'exploitant et que le temps de travail consacré aux activités extérieures à l'exploitation soit inférieur à la moitié du temps de travail total de l'exploitant. ; qu'il résulte de ces dispositions que le bénéfice de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes est subordonné, notamment, à la qualité d'exploitant à titre principal au sens de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de la décision attaquée, que pour prendre les mesures litigieuses le préfet s'est fondé, principalement, sur le fait qu'eu égard à la situation professionnelle de Mme X..., fonctionnaire à temps complet, celle-ci ne pouvait être regardée comme ayant la qualité d'exploitant à titre principal ; que Mme X... admet elle-même, devant la cour, qu'elle ne peut être considérée comme exerçant son activité agricole à titre principal ; que ce motif n'est entaché ni d'erreur de droit ni d'erreur de fait ; qu'il ressort des pièces du dossier que, s'il n'avait retenu que ce seul motif, le préfet aurait pris la même décision ; qu'ainsi Mme X... n'est pas fondée à demander son annulation ;
Sur les conclusions dirigées contre les décisions du 4 juillet 1995 :
Considérant que le décret du 23 février 1988 relatif aux aides à l'installation des jeunes agriculteurs dispose, dans son article 1er : A En vue de faciliter leur installation, il peut être accordé aux jeunes agriculteurs qui satisfont aux conditions énumérées au présent décret les aides suivantes: une dotation d'installation en capital; des prêts à moyen terme spéciaux accordés par le Crédit agricole mutuel. , dans son article 3 : A Le jeune agriculteur, candidat aux aides mentionnées à l'article 1er, doit, en outre: 5° S'engager à exercer dans un délai d'un an, ou de cinq ans au maximum dans le cas de cultures pérennes, et pendant dix ans, la profession d'agriculteur à titre principal en qualité de chef d'exploitation sur un fonds répondant aux conditions fixées par le présent décret. Est considéré comme agriculteur à titre principal l'exploitant qui consacre à son activité agricole plus de 50 p. 100 de son temps de travail et en retire au moins 50 p. 100 de ses revenusY , dans son article 4 : ALes aides à l'installation mentionnées à l'article 1er peuvent également être accordées aux jeunes exploitants qui ne sont pas agriculteurs à titre principal et qui répondent:Y.2° Aux conditions suivantes: Y.c) S'engager à exercer l'activité agricole pendant dix ans dans les conditions prévues par le projet d'installation. ; qu'aux termes de l'article 20 dudit décret : ASi le bénéficiaire des aides ne respecte pas les engagements mentionnés aux 5°, 6° et 7° de l'article 3 ou, pour les exploitants qui ne sont pas agriculteurs à titre principal, aux 6° et 7° de l'article 3 et du c de l'article 4, il est exclu du bénéfice du second versement de la dotation et de l'obtention de nouveaux prêts à moyen terme spéciaux. Il est alors tenu de rembourser, sauf cas de force majeure dûment constaté, la somme correspondant au montant du premier versement de la dotation et le cas échéant, des bonifications perçues au titre des prêts à moyen terme spéciaux, assortie des intérêts au taux légal. ;
Considérant que par trois décisions du 4 juillet 1995, le préfet des Deux-Sèvres a Adéclassé trois prêts bancaires, d'un montant de 300.000, 80.000 et 250.000 F que Mme X... avait obtenus les 18 mai 1992 et 1er août 1994, auxquels une bonification avait été appliquée en vertu de la décision du 30 novembre 1990 lui accordant l'aide à l'installation des jeunes agriculteurs ; que ces décisions sont motivées par la circonstance que l'intéressée a été déchue de ses droits aux aides à l'installation des jeunes agriculteurs par décision du 13 mars 1995; qu'il résulte de cette dernière décision que le préfet s'est fondé, principalement, sur le fait qu'eu égard à la situation professionnelle de Mme X..., fonctionnaire à temps complet, celle-ci ne pouvait être regardée comme ayant la qualité d'exploitant à titre principal, et qu'elle ne remplissait pas les conditions visées au 5° de l'article 3 du décret du 23 février 1988 ;
Considérant que le ministre soutient sans être contredit que Mme X... a sollicité et obtenu l'aide aux jeunes agriculteurs en qualité d'exploitant à titre principal, sur le fondement de l'article 3 et non sur celui de l'article 4 dudit décret relatif aux jeunes exploitants qui ne sont pas agriculteurs à titre principal ; qu'il est constant, ainsi qu'il a été dit, qu'elle ne peut être regardée comme ayant ladite qualité ; que la requérante ne peut utilement, et en tout état de cause, se prévaloir de l'article 45 de la loi du 1er février 1995 de modernisation de l'agriculture qui prévoit qu'un décret fixera les conditions dans lesquelles une personne exerçant à titre principal une activité professionnelle non salariée agricole peut occuper à titre accessoire un emploi à temps non complet dans une collectivité locale ; qu'ainsi, faute pour Mme X... d'avoir respecté l'obligation d'exercer pendant dix ans la profession d'agriculteur à titre principal, à laquelle elle était réglementairement tenue pour obtenir, notamment le bénéfice de prêts à moyens termes spéciaux, c'est légalement que le préfet a prononcé la déchéance des droits auxdits prêts ; que, par suite, Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois décisions ;
Considérant que la requérante, qui succombe à l'instance pour l'essentiel, n'est pas fondée à demander le bénéfice des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, reprises à l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 20 mai 1998 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur la demande de Mme Catherine X... tendant à l'annulation de la décision du préfet des Deux- Sèvres du 11 avril 1995.
Article 2 : La demande présentée par Mme Catherine X... devant le tribunal administratif de Poitiers tendant à l'annulation de la décision du préfet des Deux-Sèvres du 11 avril 1995 est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.