Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 10 avril 1998, présentée par la COMMUNE DE CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE ;
La COMMUNE demande à la cour :
1) d'annuler l'ordonnance du 29 mars 1998 par laquelle le conseiller délégué du tribunal administratif de Poitiers, statuant en référé, a rejeté sa demande tendant à la condamnation de MM. X... et Y... à lui verser solidairement une somme de 840 132,08 F à titre de provision ;
2) de condamner solidairement MM. X... et Y... à lui verser ladite somme à titre de provision et une somme de 10 000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 1999 :
- le rapport de M. REY, rapporteur ;
- les observations de Me PIELBERG, avocat de la COMMUNE DE CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE et de Me VEYRIER, avocat de M. Y... ;
- et les conclusions de M. VIVENS, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.129 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel ou le magistrat que l'un d'eux délègue peut accorder une provision au créancier qui a saisi le tribunal ou la cour d'une demande au fond lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie." ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment des constations de l'expert désigné par le premier juge, que la piscine édifiée pour le compte de la COMMUNE DE CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE est affectée de désordres consistant en de multiples décollements et fissurations du carrelage apparus postérieurement aux opérations de réception intervenues sans réserve ; que les désordres litigieux, eu égard à leur gravité sont de nature à rendre l'ouvrage public impropre à sa destination et, par suite, à engager la responsabilité décennale des constructeurs sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Considérant, en second lieu, que ces désordres sont imputables au maître d'oeuvre, M. Y..., pour défaut de conception et de surveillance et au carreleur, M. X..., qui a réalisé la pause du carrelage défectueux ; qu'ils sont ainsi de nature à engager leur responsabilité solidaire ; que la provision susceptible d'être allouée au maître de l'ouvrage doit être évaluée par référence aux coûts des travaux de réalisation d'un écran d'imperméabilisation du support et de remplacement du carrelage défectueux ; que, compte-tenu des estimations non sérieusement contestées de l'expert, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de fixer cette indemnité provisionnelle à 800 000 F ;
Considérant, en troisième lieu, que l'état actuel du dossier ne permet pas à la cour de se prononcer sur les parts respectives de responsabilité de M. Y... et de M. X... ; que, par suite, les conclusions en garantie présentée par M. Y... à l'encontre de M. X... doivent être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu, d'une part, d'annuler l'ordonnance en date du 29 mars 1998 par laquelle le conseiller délégué du tribunal administratif de Poitiers a refusé d'accorder une provision à la COMMUNE DE CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE, d'autre part, de condamner solidairement M. Y... et M. X... à verser à cette dernière une provision de 800 000 F ;
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que la COMMUNE DE CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE qui n'est pas partie perdante dans la présente instance soit condamnée à verser à M. Y... une somme au titre des frais qu'il a exposés ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner solidairement MM. Y... et X... à verser à la COMMUNE DE CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE la somme de 7 000 F sur le fondement des mêmes dispositions ;
Article 1er : L'ordonnance en date du 29 mars 1998 du conseiller délégué du tribunal administratif de Poitiers est annulée.
Article 2 : MM. Y... et X... sont condamnés solidairement à verser à la COMMUNE DE CHATEAUNEUF-SUR-CHARENTE une provision de 800 000 F (huit cent mille francs) et une somme de 7 000 F (sept mille francs) en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de M. Y... sont rejetés.