Vu le recours enregistré le 9 février 1996 au greffe de la cour, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;
LE MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 22 novembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Pau a condamné l'Etat à verser à la Société Thermale des Eaux Bonnes la somme de 772 393 F avec intérêts à compter du 21 octobre 1993 en réparation du préjudice subi du fait de l'abattement illégal de 10 % prévu, en ce qui concerne le tarif des forfaits et des suppléments qui incluent une pratique dispensée plus de neuf fois au cours d'une cure, par les arrêtés préfectoraux fixant, en application de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale, les prix pouvant être pratiqués pour les années 1988 à 1991 par l'établissement exploité par ladite société ;
2 ) de rejeter la demande présentée par la Société Thermale des Eaux-Bonnes devant le tribunal administratif de Pau ;
3 ) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale, notamment son article L. 162-38 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 1996 :
- le rapport de M. DE MALAFOSSE, président-rapporteur ;
- les observations de M. X..., Inspecteur à la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes, pour LE MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;
- les observations de Maître EBRARD, avocat de la Société Thermale des Eaux-Bonnes ;
- et les conclusions de M. PEANO, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les arrêtés par lesquels le préfet des Pyrénées-Atlantiques a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale, fixé au titre des années 1988 à 1991 les prix licites que pouvait pratiquer, dans l'établissement thermal qu'elle exploite, la Société Thermale des Eaux-Bonnes pour les prestations prises en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, ont imposé un abattement de 10 % sur le tarif des forfaits et suppléments qui incluent une pratique dispensée plus de neuf fois au cours d'une cure ; qu'il résulte d'une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux en date du 1er juillet 1992 qu'un tel abattement n'est pas un élément de calcul entrant dans le champ d'application desdites dispositions de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale ; qu'ainsi, les arrêtés préfectoraux susmentionnés n'ont pu légalement appliquer un tel abattement ;
Considérant, toutefois, que les prix effectivement pratiqués et perçus par la Société Thermale des Eaux-Bonnes à raison des prestations fournies aux assurés sociaux dans l'établissement qu'elle exploite correspondent aux tarifs de responsabilité des caisses de sécurité sociale auxquels sont affiliés ces assurés sociaux ; que ces tarifs de responsabilité sont déterminés, chaque année, par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, par voie d'avenants à la convention thermale nationale du 26 juin 1972 ; que les tarifs fixés par les préfets sur le fondement de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale ne se substituent pas aux tarifs de responsabilité des caisses de sécurité sociale ; que, si ces derniers ne peuvent être supérieurs à ceux fixés par le préfet, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose un rapport déterminé entre ces deux catégories de tarifs ; que la décision précitée du Conseil d'Etat est, par elle-même, sans incidence sur la validité des tarifs de responsabilité fixés pour les années en litige ; que s'il est vrai qu'en pratique, et depuis de nombreuses années, les tarifs de responsabilité sont déterminés par application d'une réduction forfaitaire aux tarifs fixés par les préfets, il ne résulte pas de l'instruction que la suppression pure et simple, dans les tarifs fixés par les arrêtés préfectoraux susmentionnés, de l'abattement litigieux de 10 %, qui était pratiqué depuis de nombreuses années, aurait, compte tenu notamment de son incidence sur les montants des remboursements supportés par les organismes de sécurité sociale, été répercutée par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés sur les tarifs de responsabilité applicables à l'établissement thermal dont s'agit ; que, par suite, l'existence d'un manque à gagner qui serait résulté, pour la Société Thermale des Eaux-Bonnes, de l'application dudit abattement par les arrêtés susmentionnés du préfet des Pyrénées- Atlantiques n'est pas établie ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est, dès lors, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée par la Société Thermale des Eaux-Bonnes devant le tribunal administratif de Pau ;
Sur les conclusions de la Société Thermale des Eaux-Bonnes tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à la Société Thermale des Eaux-Bonnes une somme correspondant aux frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 22 novembre 1995 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la Société Thermale des Eaux-Bonnes devant le tribunal administratif de Pau, ainsi que les conclusions de ladite société tendant à ce que la cour condamne l'Etat sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.