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21/05/2013 | FRANCE | N°12BX02701

France | France, Cour administrative d'appel de, 5ème chambre (formation à 3), 21 mai 2013, 12BX02701


Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 19 octobre 2012, présentée par le préfet de la Dordogne ;

Le préfet de la Dordogne demande à la cour :

1°) d'annuler les jugements n° 1201884 et 1201885 du 19 septembre 2012 par lesquels le tribunal administratif de Bordeaux a annulé ses arrêtés en date du 29 mars 2012 refusant le séjour à M. A...C...et Mme B...D...épouse C...et les obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

2°) de confirmer la légalité de ses arrêt

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Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 19 octobre 2012, présentée par le préfet de la Dordogne ;

Le préfet de la Dordogne demande à la cour :

1°) d'annuler les jugements n° 1201884 et 1201885 du 19 septembre 2012 par lesquels le tribunal administratif de Bordeaux a annulé ses arrêtés en date du 29 mars 2012 refusant le séjour à M. A...C...et Mme B...D...épouse C...et les obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

2°) de confirmer la légalité de ses arrêtés ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 avril 2013 :

- le rapport de M. Michel Dronneau, président-rapporteur ;

- et les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;

- et les observations de Me Jouteau, avocat de M. et MmeC... ;

1. Considérant que M. et MmeC..., ressortissants de nationalité arménienne, nés respectivement les 13 août et 30 décembre 1976, seraient entrés en France, selon leurs dires, le 31 juillet 2009, accompagnés de leurs deux enfants ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 12 avril 2010, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 18 février 2011 ; qu'ayant bénéficié, en 2011, de titres de séjour en qualité d'étrangers malades, sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ils ont demandé, le 19 janvier 2012, le renouvellement de leurs titres, demandes rejetées, le 29 mars 2012, par arrêtés du préfet de la Dordogne qui leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que le préfet de la Dordogne relève appel du jugement du 19 septembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé les arrêtés susmentionnés du 29 mars 2012 ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ;

3. Considérant que M. et Mme C...ayant sollicité le renouvellement de leur titre de séjour " vie privée et familiale " délivré sur le fondement des dispositions précitées, le médecin de l'agence régionale de santé, par un avis en date du 27 février 2012, a estimé que l'état de santé de M. et Mme C...nécessitait une prise en charge médicale, qu'un défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que les intéressés ne pouvaient avoir accès dans leur pays d'origine à un traitement approprié et que les soins présentaient un caractère de longue durée ; que, toutefois, pour rejeter leurs demandes, le préfet de la Dordogne, qui n'était pas lié par cet avis, a relevé qu'il était établi que les offres de soins pour soigner les pathologies des intéressés étaient disponibles dans leur pays d'origine ; qu'il ressort des pièces du dossier que les prescriptions médicales destinées à soigner le syndrome post traumatique dont souffrent les requérants visent essentiellement des anxiolytiques et des antidépresseurs, dont il ressort des documents sur lesquels s'est fondé le préfet qu'ils sont disponibles dans leur pays d'origine, en dépit de l'avis insuffisamment circonstancié du médecin de l'agence régionale de santé ; que les pièces produites par les requérants n'indiquent pas l'indisponibilité d'antidépresseurs et d'anxiolytiques nécessaires à leur traitement en Arménie ; que les éléments du dossier ne font pas ressortir que l'état de santé de M. et Mme C...soulèverait des interrogations sur leur capacité à supporter ce voyage ; que, par suite, le préfet de la Dordogne est fondé à soutenir qu'en retenant, pour annuler les décisions attaquées, qu'il avait méconnu l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, le tribunal administratif a fait une inexacte application de ces dispositions ;

4. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par les requérants à l'encontre des décisions attaquées ;

5. Considérant, en premier lieu, que les arrêtés du préfet de la Dordogne mentionnent les circonstances de droit et de fait qui les fondent ; qu'ils sont, par suite, suffisamment motivés ;

6. Considérant, en second lieu, que M. et Mme C...se prévalent de ce qu'ils sont particulièrement intégrés en France, où ils vivaient depuis quatre ans à la date des décisions attaquées ; qu'ils font valoir que deux de leurs filles sont scolarisées et qu'une troisième est née en France, le 30 juin 2010 ; que, toutefois, selon leurs déclarations, ils sont entrés irrégulièrement en France, le 31 juillet 2009, à l'âge de trente-trois ans ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...a été condamné par le tribunal correctionnel de Périgueux, le 23 juin 2010, à quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de vol en réunion commis en décembre 2009 ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 12 avril 2010, décisions confirmées par la Cour nationale du droit d'asile, le 18 février 2011 ; qu'il n'est ni allégué ni établi qu'ils seraient dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine, en dépit de la circonstance que le père de M. C...soit exilé aux USA ; que, dès lors, les arrêtés du préfet de la Dordogne n'ont pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale des intéressés une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ainsi, ils ne méconnaissent ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, les mêmes décisions ne sont pas entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur le situation personnelle et familiale des intéressés ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité des décisions de refus de séjour à l'encontre des décisions leur faisant obligation de quitter le territoire national ; que, pour les mêmes motifs que ci-dessus exposés, et alors que M. et Mme C...ont vocation à vivre leur vie familiale dans leur pays d'origine, l'obligation qui leur est faite de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale ;

Sur le délai de départ volontaire :

8. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en accordant à M. et Mme C... un délai de départ volontaire de trente jours, conformément aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Dordogne, qui ne s'est pas estimé lié par ces dispositions et auprès duquel les intéressés ne soutiennent pas avoir sollicité un délai supérieur, ait commis une erreur manifeste d'appréciation, quand bien même les enfants étaient alors scolarisés ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que les intéressés n'ont pas exécuté cette décision et se sont maintenus sur le territoire national au-delà de ce délai ;

Sur les décisions fixant le pays de renvoi :

9. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacés ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ; qu'aux termes de l'article 3 de ladite convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

10. Considérant que M. et Mme C...exposent que M. C...père, qui a participé à la défense des frontières de l'Arménie et du Karabagh en 1994 et 1995, a fait l'objet de pressions à son retour à Erevan pour avoir dénoncé des pratiques douteuses de ses supérieurs, pressions d'intimidation qui se sont retournées contre le fils, en 1997, l'obligeant à quitter l'Arménie avec sa famille pour la Russie, en 1998 ; qu'ils ajoutent qu'au retour de la Russie, en 2005, ils ont été l'objet d'agressions qui les ont contraints à quitter le pays pour la France, via la Géorgie ; que, toutefois, ces allégations ont été écartées tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'il n'est pas établi que les intéressés seraient exposés à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans leur pays d'origine ; qu'il y a lieu, par suite, d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Dordogne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé les arrêtés contestés et a demandé son annulation, ainsi que le rejet des demandes présentées par M. et Mme C...devant le tribunal administratif ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1201884-1201885 du tribunal administratif de Bordeaux, en date du 19 septembre 2012, est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme C...devant le tribunal administratif de Bordeaux sont rejetées.

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N° 12BX02701


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX02701
Date de la décision : 21/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : JOUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.de;arret;2013-05-21;12bx02701 ?
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