Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 15 avril 2025 par lequel le préfet de police a décidé d'interdire toute représentation de son spectacle, prévu 1 rue de la porte-d'Issy à Paris, dans les Hauts-de-Seine, en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police de laisser se dérouler les représentations prévues. Par une ordonnance n° 2510368 du 16 avril 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler l'ordonnance du 16 avril 2025 du juge des référés du tribunal administratif de Paris ;
2°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 15 avril 2025 par lequel le préfet de police de Paris a interdit le spectacle " Saperlipopette " à bord du car dénommé " Dieudobus " prévu du 16 avril au 15 mai 2025 au 1 rue de la porte-d'Issy à Paris, dans les Hauts-de-Seine, en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, d'une part, l'interdiction intervient deux jours avant la première représentation et, d'autre part, il sera dans l'obligation de rembourser les places déjà réservées ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, à la liberté de circulation, à la liberté de réunion, à la liberté d'opinion et à la liberté d'expression dès lors qu'aucun trouble à l'ordre public n'est démontré en l'absence de propos antisémites ou incitant à la haine raciale dans le contenu du spectacle ;
- le juge des référés du tribunal administratif de Paris a considéré à tort que le script de son spectacle qu'il a produit était incomplet.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Il résulte de l'instruction que, par un arrêté du 15 avril 2025, le préfet de police a interdit toute représentation du spectacle de M. A... B... intitulé " Saperlipopette " à Paris, dans les Hauts-de-Seine, en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne du 16 avril au 15 mai 2025. M. B... relève appel de l'ordonnance du 16 avril 2025 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a refusé de suspendre l'exécution de cet arrêté.
3. Il ressort de l'arrêté contesté que, pour prononcer l'interdiction en litige, le préfet de police s'est fondé sur ce que M. B... avait, au cours de ses précédents spectacles, tenu des propos à caractère raciste et antisémite, constitutifs de provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence raciale ou religieuse et d'apologie d'actes de terrorisme, qui avaient donné lieu à de nombreuses condamnations pénales entre 2000 et 2023, sur ce qu'il avait tenu des propos de même nature au cours du spectacle " Vendredi 13 ", joué à plusieurs reprises depuis le début de l'année 2025, ainsi qu'au cours du spectacle " Saperlipopette " joué à Ouistreham le 22 mars 2025 et sur ce qu'il existait un risque que de tels propos, constitutifs de graves troubles à l'ordre public, soient de nouveau tenus lors des prochaines représentations de ce dernier spectacle.
4. Pour refuser de suspendre l'exécution de cet arrêté, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a relevé, sur le fondement d'une note des services de renseignements produite devant lui et décrivant le contenu du spectacle " Saperlipopette " tenu à Ouistreham le 22 mars 2025, que ce spectacle mettait en scène des personnages identiques à ceux qui étaient représentés dans le spectacle " Vendredi 13 ", interdit par un arrêté du 24 février 2025 dont le juge des référés du même tribunal administratif avait refusé d'ordonner la suspension de l'exécution, personnages qui tenaient des propos à caractère antisémite et valorisant des actes de terrorisme. Pour juger établi le risque de réitération de propos contraire à la dignité humaine, il s'est fondé sur ce que si M. B... soutenait devant lui que le spectacle programmé du 16 avril au 15 mai 2025 n'était en rien semblable aux précédents, il ne contredisait pas efficacement les arguments avancés par le préfet de police en se bornant à produire des éléments sommaires présentés comme étant le script du nouveau spectacle.
5. Dans sa requête d'appel, M. B... soutient que l'interdiction en litige porte aux libertés d'aller et venir, de circulation, de réunion, d'opinion et d'expression une atteinte non justifiées par l'existence d'un trouble à l'ordre public. Il n'apporte cependant aucun élément de nature à contester sérieusement l'exactitude matérielle des éléments produits par le préfet de police quant à la teneur des propos tenus au cours de la représentation du spectacle " Saperlipopette " qui s'est tenue à Ouistreham le 22 mars 2025, dont il se borne à réfuter le caractère antisémite ou incitatif à la haine raciale. Il n'apporte, en outre, pas davantage qu'en première instance d'éléments à l'appui de son argumentation selon laquelle le spectacle devant faire l'objet des représentations interdites diffèrerait de celui présenté à Ouistreham. Dans ces conditions, et conformément à l'appréciation portée par le juge des référés du tribunal administratif, il n'apparaît pas qu'en regardant comme avéré le risque de réitération de tels propos au cours des représentations à venir de ce spectacle et en interdisant ces représentations au motif que la tenue de ces propos constituerait un trouble grave à l'ordre public, le préfet de police aurait porté aux libertés fondamentales invoquées une atteinte manifestement illégale.
6. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. B... doit être rejetée par application des dispositions de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Fait à Paris, le 23 avril 2025
signé : Pierre Collin