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15/04/2025 | FRANCE | N°502804

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 15 avril 2025, 502804


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 26 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision n° 2341 du 4 décembre 2024 par laquelle la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) a annulé la décision du 3 septembre 2024 de la formation restreinte du conseil régional d'Occitanie rejetant son recours contre la délibération

du conseil départemental de l'Hérault du 21 novembre 2023 de l'inscri...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 26 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision n° 2341 du 4 décembre 2024 par laquelle la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) a annulé la décision du 3 septembre 2024 de la formation restreinte du conseil régional d'Occitanie rejetant son recours contre la délibération du conseil départemental de l'Hérault du 21 novembre 2023 de l'inscrire au tableau de l'ordre des médecins du département.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la décision contestée le prive de l'exercice de son activité professionnelle et de tout revenu, remet en cause sa dignité professionnelle et affecte lourdement sa santé mentale et physique ainsi que la vie de ses proches ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée :

- la formation restreinte du CNOM a outrepassé ses pouvoirs dès lors que son inscription avait été validée par le conseil départemental ;

- la décision contestée a été adoptée sans dialogue contradictoire, malgré sa proposition d'un échange en visioconférence, en violation de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que sa requalification en médecine respecte les exigences des experts ;

- sa motivation lacunaire et standardisée contrevient à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2025, le Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, que des motifs d'intérêt général font, en tout état de cause, obstacle à ce que l'urgence soit constituée et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. B..., et d'autre part, le Conseil national de l'ordre des médecins ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 14 avril 2025, à 15 heures :

- Me Perier, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. B... ;

- Me Gouz-Fitoussi, avocate au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocate du Conseil national de l'ordre des médecins ;

- le représentant du Conseil national de l'ordre des médecins ;

à l'issue de laquelle la juge des référés a clos l'instruction ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Au vu du rapport de l'expertise diligentée, en application des dispositions du II de l'article R. 4112-2 du code de la santé publique, aux fins de vérifier sa compétence professionnelle, le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Hérault a, par une décision du 14 décembre 2021, refusé d'inscrire le docteur B... au tableau de l'ordre des médecins et subordonné l'acceptation d'une nouvelle demande d'inscription " - soit (à) la réalisation d'un DU (diplôme d'université) de requalification à la médecine générale, comportant un bilan de compétences suivi d'objectifs de formation sur une durée d'un à trois ans ; - soit (à) la réalisation d'un stage de 6 mois en médecine polyvalente, d'un stage de 6 mois en médecine générale ambulatoire et d'un stage de 6 semaines à temps plein dans un service de pédiatrie générale, PMI ou d'accueil d'urgences pédiatriques ainsi qu'un stage de 6 semaines à temps plein dans un service d'accueil d'urgences ". Par une décision du 21 novembre 2023, le conseil départemental a finalement accepté d'inscrire le docteur B..., au vu de l'obtention d'un DU mention " médecine gériatrique, gérontologie et coordination d'établissement pour personnes âgées dépendants (EHPAD) " auprès de l'université de Montpellier, d'un exercice professionnel d'un an cumulé en qualité de médecin traitant en EHPAD et d'un stage auprès du centre hospitalier de Saint Privas, sous réserve de son engagement à n'exercer la médecine générale " que dans des EHPAD ou dans le cadre des compétences acquises validées par son DU ". M. B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision n° 2341 du 4 décembre 2024 par laquelle la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) a annulé la décision du 3 septembre 2024 de la formation restreinte du conseil régional d'Occitanie rejetant son recours contre la décision du conseil départemental de l'Hérault du 21 novembre 2023.

3. En premier lieu, il résulte des dispositions des articles R. 4112-5 et R. 4112-5-1 du code de la santé publique que les décisions d'inscription ou de refus d'inscription prises par les conseils départementaux sont susceptibles de recours devant les conseils régionaux ou interrégionaux, les décisions prises par ces derniers étant elles-mêmes susceptibles d'un recours devant le Conseil national, et que ce dernier a qualité pour former de tels recours. Par ailleurs, aux termes du II de l'article L. 4124-11 du même code, en matière d'inscription au tableau : " Le Conseil national peut déléguer ses pouvoirs à une formation restreinte qui se prononce en son nom ". Par suite, le moyen tiré de ce que la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins a outrepassé ses pouvoirs en annulant l'inscription de M. B... au tableau de l'ordre des médecins, n'est pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.

4. En deuxième lieu, ne sont pas davantage de nature à créer un doute sérieux les moyens tirés, d'une part, de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse, alors que celle-ci précise explicitement les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée, et, d'autre part, d'une méconnaissance de la procédure contradictoire, alors qu'il n'est pas contesté que le recours formé par le Conseil national de l'ordre des médecins a été dûment communiqué à M. B... afin de lui permettre de présenter des observations écrites, ce qu'il a, du reste, fait, et qu'il a été dûment convoqué, en temps utile, à la séance devant le Conseil national, conformément aux dispositions de l'article R. 4112-5 du code de la santé publique, applicables à ce Conseil national en vertu de l'article R. 4112-5-1 du même code.

5. Enfin, la seule circonstance qu'un des experts du collège d'experts qui a évalué les compétences de M. B... aurait admis, postérieurement à la décision du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Hérault du 14 décembre 2021 définissant les conditions auxquelles son inscription au tableau était subordonnée, que le DU de médecine gériatrique qu'il avait obtenu, en lieu et place du DU de médecine générale initialement exigé, était suffisant pour valider ses compétences ne saurait suffire à jeter un doute sérieux sur le bien-fondé de l'appréciation portée par le Conseil national de l'ordre des médecins sur les compétences professionnelles de M. B..., eu égard aux lacunes constatées par la mesure d'expertise et alors, de surcroît, qu'il avait justifié non de l'accomplissement de stages mais d'un exercice professionnel sans être alors inscrit au tableau et qu'aucune disposition du code de la santé publique ne prévoit qu'un médecin puisse s'engager à n'exercer son activité que dans un domaine restreint, l'article L. 4112-5 du code de la santé publique prévoyant au contraire que : " L'inscription à un tableau de l'ordre rend licite l'exercice de la profession sur tout le territoire national ".

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, que la requête de M. B... doit être rejetée.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du Conseil national de l'ordre des médecins tendant à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du Conseil national de l'ordre des médecins présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et au Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM).

Fait à Paris, le 15 avril 2025

Signé : Laurence Helmlinger


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 502804
Date de la décision : 15/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 2025, n° 502804
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; SCP GOUZ-FITOUSSI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:502804.20250415
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