Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rouen, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 30 avril 2024 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi, portant interdiction de retour sur le territoire français, et de toute mesure de contrainte afférente, ainsi que d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2404918 du 6 décembre 2024, la juge des référés du tribunal administratif de Rouen l'a admis à l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté ses demandes.
Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler l'ordonnance du 6 décembre 2024 de la juge des référés du tribunal administratif de Rouen ;
3°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 30 avril 2024 du préfet de la Loire-Atlantique ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation administrative, dans le délai d'un mois à compter de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ou, à défaut, de lui verser la même somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient :
- que s'il n'a pas contesté, dans le délai de recours, l'arrêté du 30 avril 2024, la naissance, le 23 octobre 2024, de son fils constitue un élément nouveau, alors qu'il peut prétendre, en qualité de parent d'enfant français, à un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 4 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;
- que l'exécution de la mesure d'éloignement dont il fait l'objet est imminente, du fait de son placement en centre de rétention administrative depuis le 2 décembre 2024 ;
- qu'il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit de mener une vie privée et familiale normale, à sa liberté d'aller et venir et à l'intérêt supérieur de l'enfant.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Eu égard à son office, qui consiste à assurer la sauvegarde des libertés fondamentales, il appartient au juge des référés, saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de prendre, en cas d'urgence, toutes les mesures qui sont de nature à remédier à bref délai aux effets résultant d'une atteinte grave et manifestement illégale portée, par une autorité administrative, à une liberté fondamentale.
3. Cependant, aux termes de l'article L. 776-1 du code de justice administrative : " Les modalités selon lesquelles sont présentés et jugés les recours formés devant la juridiction administrative contre les décisions relatives à l'entrée, au séjour et à l'éloignement des étrangers obéissent, lorsque les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le prévoient, aux règles spéciales définies au livre IX du même code ". Il résulte des pouvoirs confiés au juge par les dispositions du livre IX du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux délais qui lui sont impartis pour se prononcer et aux conditions de son intervention, que les procédures spéciales instituées par ces dispositions présentent des garanties au moins équivalentes à celles des procédures régies par le livre V du code de justice administrative, dont elles excluent, par suite, la mise en œuvre. Il en va toutefois autrement dans le cas où les modalités selon lesquelles il est procédé à l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français emportent des effets qui, en raison de changements dans les circonstances de droit ou de fait survenus depuis l'intervention de cette mesure et après que le juge, saisi sur le fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a statué ou que le délai prévu pour le saisir a expiré, excèdent ceux qui s'attachent normalement à sa mise à exécution.
4. En l'espèce, il résulte de l'instruction conduite par la juge des référés du tribunal administratif de Rouen que M. A..., ressortissant algérien né en 1990, qui déclare être entré irrégulièrement en France en 2019, n'a jamais tenté de régulariser sa situation administrative depuis lors et ne s'est pas conformé à l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée le 23 avril 2021. Condamné à trois reprises pour des vols aggravés, dont deux fois à des peines d'emprisonnement ferme, d'abord d'une durée de quatre mois, le 3 janvier 2022, puis de cinq mois, le 28 novembre 2022, il a encore fait l'objet de " signalisations " par le commissariat central de Nantes pour des faits, en date du 16 août 2023 et des 29 avril et 6 mai 2024, de vol à la roulotte, de vol aggravé ou de recel de vol. Le préfet de la Loire-Atlantique lui a de nouveau notifié, le 30 avril 2024, l'obligation de quitter le territoire sans délai, avec interdiction de retour pour une durée de trois ans, qu'il n'a pas plus contestée ni exécutée que la précédente. Il a été assigné à résidence par arrêté du 12 novembre 2024, puis, compte tenu de ses manquements aux obligations fixées par cette assignation comme à la précédente, qui lui avait été notifiée le 21 novembre 2021, placé en rétention administrative à compter du 2 décembre 2024 et, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, confirmée en appel, jusqu'au 1er janvier 2025. Par l'ordonnance du 6 décembre 2024 que conteste M. A..., la juge des référés du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative citées au point 1, à ce qu'elle suspende l'exécution de l'arrêté du 30 avril 2024 et enjoigne au préfet de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation.
5. M. A... fait valoir en appel, comme en première instance, le changement de circonstances résultant, postérieurement à l'arrêté du 30 avril 2024, de la naissance de son enfant le 23 octobre 2024, et de la reprise d'une vie de couple avec la mère de ce dernier, de nationalité française, depuis la levée, le 20 septembre 2024, de l'interdiction d'entrer en contact avec celle-ci précédemment prononcée par le juge des libertés et de la détention. En vue d'établir qu'il subvient effectivement aux besoins de son enfant et pourrait, dès lors, prétendre à un titre de séjour en application des stipulations du 4 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, il produit à nouveau des factures d'achat de fournitures pour jeune enfant, acquittées en juin et de septembre à novembre 2024 pour un total de 156,99 euros. Il résulte toutefois des autres pièces déjà versées au dossier de l'instruction de sa demande par la juge des référés du tribunal administratif de Rouen que, postérieurement, également, à l'arrêté du 30 avril 2024, M. A... a été condamné, par jugement du tribunal correctionnel de Nantes du 20 septembre 2024, à une peine de dix mois d'emprisonnement, assortie d'un sursis probatoire de deux ans, pour avoir, le 19 mars 2024, exercé volontairement sur sa compagne des violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, aggravées par la circonstance qu'était apparente ou connue de lui la particulière vulnérabilité de la victime, alors enceinte. Il en résulte aussi que cette dernière, interrogée le 29 novembre 2024 dans le cadre d'une enquête de flagrance, a déclaré qu'il ne résidait pas chez elle et ne s'y présentait plus depuis les violences commises en mars 2024. Il ressort d'ailleurs du relevé de compte délivré à la mère de l'enfant de M. A... par la caisse d'allocations familiales de la Loire-Atlantique, produit pour la première fois en appel, que celle-ci perçoit une aide sociale destinée à un parent isolé. Il est enfin constant que M. A..., sans autorisation de travail, est dépourvu en France d'emploi et de ressources autres que des rémunérations occultes de fréquence et de montant inconnus, alors qu'il n'est pas contesté en appel qu'il n'est pas dépourvu d'attaches en Algérie et pourrait depuis ce pays contribuer aux besoins matériels de son enfant.
6. M. A... ne fait ainsi valoir en appel aucune circonstance de nature à remettre en cause l'appréciation portée par la juge des référés du tribunal administratif de Rouen selon laquelle la mise à exécution de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 30 avril 2024 ne porterait ni à son droit de mener une vie privée et familiale normale, ni à sa liberté d'aller et venir, ni à l'intérêt supérieur de son enfant mineur, une atteinte, grave et manifestement illégale, excédant celle qui s'attache normalement à la mise à exécution d'une obligation de quitter le territoire français. Il apparaît dès lors manifeste que sa requête d'appel est mal fondée et doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du même code et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sans qu'il y ait lieu de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A....
Fait à Paris, le 26 décembre 2024
Signé : Nicolas Polge