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07/11/2024 | FRANCE | N°498650

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 07 novembre 2024, 498650


Vu la procédure suivante :



M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de C..., statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'enjoindre au département des Bouches-du-Rhône d'assurer son hébergement ainsi que de mettre en œuvre la prise en charge ordonnée par le juge des enfants du tribunal judiciaire de C..., dans le délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, d'assortir ces injo

nctions d'une astreinte de 300 euros par jour de retard et, enfin, de mett...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de C..., statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'enjoindre au département des Bouches-du-Rhône d'assurer son hébergement ainsi que de mettre en œuvre la prise en charge ordonnée par le juge des enfants du tribunal judiciaire de C..., dans le délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, d'assortir ces injonctions d'une astreinte de 300 euros par jour de retard et, enfin, de mettre à la charge du département la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par une ordonnance n° 2410229 du 11 octobre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de C... a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 29 octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance attaquée ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge du conseil départemental des Bouches-du-Rhône la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil qui s'engage dans ce cas à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la loi prohibe la prise en charge des mineurs de moins de 16 ans dans des hébergements hôteliers et que la carence du conseil départemental des Bouches-du-Rhône dans sa prise en charge au sein d'une maison d'enfants à caractère social ou un établissement spécialisé eu égard à son jeune âge, l'expose à une aggravation de son handicap ayant des conséquences irrémédiables sur sa santé ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de ne pas subir des traitements inhumains et dégradants, au droit à un logement décent, au droit de recevoir les traitements et les soins les plus appropriés à son état de santé et au respect de la dignité humaine ;

- il y a lieu, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, de statuer sur ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte dès lors que sa prise en charge n'est pas adaptée à sa situation d'extrême vulnérabilité liée à son handicap et à son très jeune âge ;

- étant matériellement et juridiquement dans l'impossibilité d'engager une procédure de reconnaissance de son handicap par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) en l'absence de délégation d'autorité parentale et de représentant légal, il appartient au conseil départemental ou au juge administratif saisi en référé de tenir compte de son handicap manifeste pour constater la nécessité d'un hébergement dans une structure adaptée et proscrire le recours à un hébergement de type hôtelier en application de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 dite loi Taquet ;

- il aurait dû, contrairement à ce qu'a jugé le premier juge, bénéficier de plein droit de l'aide juridictionnelle provisoire au titre de la procédure d'urgence.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

- convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. M. A..., ressortissant guinéen qui déclare être né le 1er janvier 2009 en Guinée, est arrivé à C... le 21 août 2024, au terme selon ses déclarations " d'un parcours migratoire particulièrement long et éprouvant ". Par une ordonnance du 26 septembre 2024, le juge des enfants de C... a ordonné, compte tenu notamment d'une vulnérabilité particulière liée à une situation de handicap dont il fait état, son placement provisoire immédiat dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance auprès des services du conseil départemental des Bouches-du-Rhône, en application des dispositions de l'article 375 du code civil et de l'article R. 221-1 du code de l'action sociale et des familles. Il a également ordonné, en l'absence de documents d'identité permettant d'attester son état de minorité, une expertise d'âge osseux. M. A... relève appel de l'ordonnance du 11 octobre 2024 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de C..., saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, ne l'a pas admis à titre provisoire à l'aide juridictionnelle et, d'autre part, a constaté qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à sa demande d'injonction à l'encontre du conseil départemental des Bouches-du-Rhône.

3. En premier lieu, s'agissant de la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle, aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ". Aux termes de l'article 62 du décret du 28 décembre 2020 portant application de cette loi et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles : " (...) La décision statuant sur la demande d'admission provisoire n'est pas susceptible de recours ". Il résulte de ces dispositions que la décision par laquelle le juge des référés du tribunal administratif a rejeté la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M. A... n'est pas susceptible de recours. Par suite, il est manifeste que les conclusions de la présente requête tendant à la réformation de l'ordonnance sur ce point doivent être rejetées comme irrecevables.

4. En second lieu, le juge des référés du tribunal administratif a constaté qu'à la date de son ordonnance, M. A... avait été pris en charge et accueilli à compter du 8 octobre 2024 par l'association départementale pour le développement des actions de prévention des Bouches-du-Rhône (ADDAP 13) à titre provisoire dans une structure hôtelière. M. A..., qui se prévaut d'une atteinte aux libertés fondamentales tirées du droit de ne pas subir des traitements inhumains et dégradants, du droit à un logement décent, du droit de recevoir les traitements et les soins les plus appropriés à son état de santé et du respect de la dignité humaine, soutient qu'en l'absence même de décision de la maison départementale des personnes handicapées le reconnaissant comme porteur d'un handicap, le caractère en l'espèce manifeste de celui-ci aurait dû conduire le président du conseil départemental à appliquer les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 221-2-3 du code de l'action sociale et des familles, dans leur rédaction issue de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, en vertu desquelles une prise en charge à titre dérogatoire dans une structure d'hébergement de type hôtelier " ne s'applique pas dans le cas des mineurs atteints d'un handicap physique, sensoriel, mental, cognitif ou psychique, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant, reconnu par la maison départementale des personnes handicapées ". Toutefois, l'intéressé n'apporte pas, dans sa requête d'appel, en-dehors de considérations générales, d'éléments de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le premier juge sur les conséquences des modalités de sa prise en charge en structure hôtelière. Cette appréciation est notamment fondée sur les circonstances, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces modalités ne permettraient pas de pourvoir à l'ensemble des besoins de M. A..., notamment en termes de santé, et d'autre part, que le département conserve l'obligation de procéder à l'évaluation de sa situation et d'engager une procédure de reconnaissance du handicap auprès de la maison départementale des personnes handicapées. Dans les circonstances de l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction menée devant le premier juge ainsi que des écritures et pièces produites en appel, que les conditions provisoires d'accueil critiquées par M. A... seraient telles qu'elles révéleraient l'existence d'une carence caractérisée, notamment au regard de son état de santé, commise par l'autorité départementale, dans l'accomplissement de la mission qui lui incombe en vertu des dispositions des articles L. 375-3, L. 221-1 et L. 221-2-3 du code de l'action sociale et des familles, faisant apparaître, pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une des libertés fondamentales invoquées entraînant des conséquences graves pour l'intéressé. Il est, par suite, manifeste que son appel doit être rejeté.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. A... doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées en appel au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et au département des Bouches-du-Rhône.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 498650
Date de la décision : 07/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 nov. 2024, n° 498650
Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:498650.20241107
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