La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/07/2024 | FRANCE | N°496100

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 juillet 2024, 496100


Vu la procédure suivante :

M. D... A..., Mme E... B... et Mme C... A... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de leur indiquer le lieu d'hébergement d'urgence susceptible de les accueillir dans un délai de 24 heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.



Par une ordonnance n° 2405002 du 16 juillet 2024, le juge des rÃ

©férés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.



...

Vu la procédure suivante :

M. D... A..., Mme E... B... et Mme C... A... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de leur indiquer le lieu d'hébergement d'urgence susceptible de les accueillir dans un délai de 24 heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par une ordonnance n° 2405002 du 16 juillet 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A..., Mme B... et Mme A... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler cette ordonnance ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin d'indiquer le lieu d'hébergement d'urgence susceptible de les accueillir dans un délai de vingt-quatre heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros à verser à Me Berry, leur avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- leur famille est dans une situation de grande détresse à raison des problèmes de santé dont souffrent à la fois M. A..., qui nécessite un suivi régulier, et leur fils, né en 2015, qui présente un trouble du spectre de l'autisme et a besoin d'un environnement stable et ritualisé ;

- ils n'ont pas refusé leur hébergement à l'hôtel ;

-leur fille ainée, majeure, dispose d'un titre de séjour.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. L'article L. 345-2 du code de l'action sociale et des familles prévoit que, dans chaque département, est mis en place, sous l'autorité du préfet, " un dispositif de veille sociale chargé d'accueillir les personnes sans abri ou en détresse (...) ". L'article L. 345-2-2 du même code dispose que : " Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence. (...) ". Aux termes de son article L. 345-2-3 : " Toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y bénéficier d'un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée (...) ". Aux termes de l'article L. 121-7 du même code : " Sont à la charge de l'Etat au titre de l'aide sociale : (...) 8° Les mesures d'aide sociale en matière de logement, d'hébergement et de réinsertion, mentionnées aux articles L. 345-1 à L. 345-3 (...) ".

3. Il appartient aux autorités de l'Etat, sur le fondement des dispositions citées au point 2, de mettre en œuvre le droit à l'hébergement d'urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique ou sociale. Une carence caractérisée dans l'accomplissement de cette mission peut faire apparaître, pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu'elle entraîne des conséquences graves pour la personne intéressée. Il incombe au juge des référés d'apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de la santé et de la situation de famille de la personne intéressée. Les ressortissants étrangers qui font l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou dont la demande d'asile a été définitivement rejetée, et qui doivent ainsi quitter le territoire en vertu des dispositions de l'article L. 542-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'ont pas vocation à bénéficier du dispositif d'hébergement d'urgence. Dès lors, s'agissant des ressortissants étrangers placés dans cette situation particulière, une carence constitutive d'une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ne saurait être caractérisée, à l'issue de la période strictement nécessaire à la mise en œuvre de leur départ volontaire, qu'en cas de circonstances exceptionnelles.

4. M. A..., Mme B... et leur fille majeure, C... A..., ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la préfète du Bas-Rhin de leur attribuer un hébergement d'urgence. Ils relèvent appel de l'ordonnance du 16 juillet 2024 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

5. Il résulte de l'instruction devant le tribunal administratif de Strasbourg que les capacités de l'hébergement d'urgence dans le département du Bas-Rhin sont saturées. Par ailleurs, après avoir bénéficié d'autorisations provisoires de séjour à raison de l'état de santé de M. A..., ce dernier et son épouse, ressortissants géorgiens, ont fait l'objet de refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire par deux arrêtés du 13 décembre 2023. Seule leur fille ainée, majeure, bénéficie d'un titre de séjour. L'ensemble de la famille, avec leur fils né en 2015, a été hébergée pendant plusieurs années dans un appartement, partagé avec une autre famille, mis à leur disposition par le service intégré d'accueil et d'orientation. Leur fils, qui souffre d'un trouble du spectre de l'autisme, supportant mal cette cohabitation, ils ont demandé un logement personnel. Le 9 juillet 2024 ils ont été transférés dans un hôtel dans lequel ils ne sont pas restés. Si les requérants se prévalent en appel de ce que leur famille est en situation de particulière détresse à raison de l'état de santé de M. A... et de son fils et de ce qu'ils n'ont pas refusé leur hébergement à l'hôtel, ils ne contestent pas le fait que, comme l'a relevé le juge des référés en première instance, M. A..., opéré en 2018, ne fait plus l'objet que d'un suivi médical, et son fils, qui a certes besoin d'un quotidien ritualisé et stable, ne bénéficie que d'une prise en charge par des séances d'orthophonie en libéral et de pédopsychiatrie en hôpital de jour. Dans la mesure où le juge des référés, saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, ne peut, compte tenu du cadre temporel dans lequel il se prononce, ordonner que des mesures utiles en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et des mesures qu'elle a déjà prises, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, et eu égard à son office, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a jugé qu'aucune carence de l'Etat ne peut être caractérisée en l'espèce. Leur appel doit en conséquence être rejeté selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sans qu'il y ait lieu d'admettre les requérants au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de M. A..., Mme B... et Mme A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. D... A..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Fait à Paris, le 19 juillet 2024

Signé : Nathalie Escaut


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 496100
Date de la décision : 19/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2024, n° 496100
Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:496100.20240719
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award