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18/07/2024 | FRANCE | N°495939

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 18 juillet 2024, 495939


Vu la procédure suivante :

Sous le n° 2401172, M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en deuxième lieu, de suspendre l'exécution de l'arrêté n° 11623/2024 du 27 juin 2024 par lequel le préfet de Mayotte l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et l'a interdit de retour sur le territoire franç

ais pour une durée d'un an, en troisième lieu, d'enjoindre au préfet de Mayo...

Vu la procédure suivante :

Sous le n° 2401172, M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en deuxième lieu, de suspendre l'exécution de l'arrêté n° 11623/2024 du 27 juin 2024 par lequel le préfet de Mayotte l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, en troisième lieu, d'enjoindre au préfet de Mayotte, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente ou, à titre subsidiaire, d'enregistrer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, en dernier lieu, d'enjoindre au préfet de Mayotte d'organiser et de financer son retour sur le territoire de Mayotte dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard.

Sous le n° 2401175, M. A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de suspendre l'exécution de l'arrêté n° 11623/2024 du 27 juin 2024 par lequel préfet de Mayotte l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet de Mayotte d'organiser son rapatriement à Mayotte aux frais de l'Etat dans un délai de cinq jours au maximum, à défaut sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et, en dernier lieu, d'enjoindre au préfet de Mayotte de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour portant enregistrement de sa demande de renouvellement de titre de séjour et l'autorisant à travailler.

Par une ordonnance nos 2401172, 2401175 du 29 juin 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, en premier lieu, n'a pas admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, en deuxième lieu, a radié la requête n° 2401175 des registres du greffe du tribunal et a versé ses productions à l'appui de la requête n° 2401172, en troisième lieu, a dit qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions de sa requête aux fins de suspension, en quatrième lieu, a mis à la charge du préfet de Mayotte la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative et, en dernier lieu, a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 29 juin 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte en ce qu'il rejette les conclusions aux fins d'injonction de retour sur le territoire et conclut au non-lieu à statuer en raison du retrait de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français du préfet de Mayotte du 27 juin 2024 ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer et aux autorités consulaires françaises aux Comores d'organiser son retour sur le territoire français dans un délai de cinq jours, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans un délai de 48 heures à compter de son retour dans le département de Mayotte, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 200 euros par jours de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en exécution de l'arrêté du préfet de Mayotte en date du 27 juin 2024, il a été éloigné dès le lendemain vers les Comores ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit de mener une vie familiale normale, au droit au respect de sa vie privée et familiale, à l'intérêt supérieur de l'enfant et à son droit à un recours juridictionnel effectif ;

- l'arrêté contesté a été adopté et exécuté immédiatement alors que, d'une part, il est père d'une enfant de six ans, citoyenne française et qui demeure désormais seule à Mayotte, sa mère se trouvant sur l'île de la Réunion et, d'autre part, il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée et exerce la profession de maçon depuis quatre années ;

- il est entaché d'illégalité en ce que le préfet de Mayotte l'a entièrement exécuté alors que, d'une part, il n'avait pas pu présenter ses observations et, d'autre part, le juge administratif n'avait pas encore statué sur sa demande.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Il résulte de l'instruction conduite par le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte que le préfet de Mayotte a, par un arrêté du 27 juin 2024, pris à l'encontre de M. B... A..., ressortissant comorien né en 1986, une obligation de quitter le territoire français assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par une requête enregistrée au tribunal administratif de Mayotte le 28 juin, M. A... a demandé, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administratif, au juge des référés de suspendre l'exécution de cette décision, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre ou une autorisation de séjour et, le cas échéant, d'enjoindre au préfet, sous astreinte, d'organiser et de financer son retour sur le territoire français. Le même jour, M. A... a été reconduit à destination de Mayotte. Par une ordonnance du 29 juin 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de suspension de l'exécution de l'arrêté du 27 juin 2024, qui avait été retiré, et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. M. A... interjette appel de cette ordonnance en tant qu'elle a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions aux fins de suspension et rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet d'organiser et de financer son retour à Mayotte.

3. En premier lieu, si l'exécution d'un arrêté obligeant un ressortissant étranger de quitter le territoire français et lui interdisant de retourner sur le territoire français pendant une certaine durée ne rend pas sans objet la demande faite au juge des référés sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 d'en prononcer la suspension, dès lors que cette dernière peut permettre à l'intéressé de solliciter la délivrance d'un document lui permettant de retourner sur le territoire français, le retrait de ces décisions avant que le juge statue, en produisant les mêmes effets que la suspension que le juge aurait pu prononcer, rend sans objet la demande. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'exécution de l'arrêté du 27 juin 2024 portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français faisait obstacle à ce que le préfet de Mayotte prononce son retrait et que c'est à tort que le juge des référés a jugé qu'il n'y avait en conséquence plus lieu de statuer sur ses conclusions aux fins de suspension de l'exécution de cet arrêté.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 761-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " l'éloignement effectif de l'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut intervenir à Mayotte : (...) / 2° Si l'étranger a saisi le tribunal administratif d'une demande sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, avant que le juge des référés ait informé les parties de la tenue ou non d'une audience publique en application du deuxième alinéa de l'article L. 522-1 du même code, ni, si les parties ont été informées d'une telle audience, avant que le juge ait statué sur la demande. " Il résulte de l'instruction conduite par le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte et des pièces du dossier que la demande formée par M. A... sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative a été enregistrée au greffe du tribunal administratif le 28 juin à 9h30 et transmise au préfet à 11h19, alors que le requérant, qui avait quitté le centre de rétention à 9h45, était déjà à bord du navire à destination de Mayotte. Dans ces circonstances, le préfet de Mayotte n'a pas, en procédant à l'exécution de l'arrêté du 27 juin 2024, porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit au recours juridictionnel du requérant justifiant qu'il lui soit enjoint d'organiser aux frais de l'Etat son retour sur le territoire français. Par ailleurs, si le retrait de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français permet au requérant de solliciter sa réadmission à Mayotte, il n'implique pas, non plus que la circonstance alléguée par le requérant qu'il aurait droit de séjourner légalement à Mayotte, qu'il soit enjoint au préfet d'organiser et de financer son retour à Mayotte. Par suite, M. A... n'est manifestement pas fondé à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a, par l'ordonnance attaquée, rejetée sa demande en ce sens.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, la requête de M. A... doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M B... A....

Fait à Paris, le 18 juillet 2024

Signé : Gilles Pellissier

Pour expédition conforme,

La secrétaire,

Agnès Micalowa


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 495939
Date de la décision : 18/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 jui. 2024, n° 495939
Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:495939.20240718
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