Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
D'une part, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges, en premier lieu, d'annuler son titre de pension de retraite au titre de l'invalidité n° B 20 046534 W du 13 juillet 2020, la décision portant rejet implicite de son recours gracieux formé contre ce titre de pension et la décision du 16 avril 2021 du service des retraites de l'Etat refusant de réviser les bases de liquidation de sa pension, à tout le moins en ce que sa pension n'a pas été liquidée sur la base de l'indice majoré de 534 et que six trimestres au moins ont été omis de la durée de services et bonifications prise en considération pour cette liquidation et, en second lieu, d'enjoindre au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de réviser son titre de pension avec effet rétroactif au 2 février 2020, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement du tribunal, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
D'autre part, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Limoges, d'annuler la décision implicite née le 19 septembre 2021 de refus de sa demande de révision de son titre de pension n° B 20 046534 W du 13 juillet 2020, d'annuler son titre de pension n° B 21 058063 A du 4 octobre 2021 en tant, d'une part, que sa pension a été calculée sur la base d'un indice majoré 521 et non d'un indice majoré 534, d'autre part, que six trimestres au moins ont été omis de la durée des services et bonifications à prendre en compte et, enfin, d'enjoindre au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de réviser son tire de pension avec effet rétroactif au 2 février 2020, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement du tribunal, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Par un jugement nos 2100982, 2101791 du 23 mai 2023, le tribunal administratif de Limoges a annulé les titres de pension des 13 juillet 2020 et 4 octobre 2021 concédant à Mme A... une pension civile de retraite au titre de l'invalidité à compter du 2 février 2020 et les décisions implicites de rejet nées les 21 novembre 2020 et 19 septembre 2021 en tant seulement que sa pension a été calculée sur la base d'un indice majoré 521 et non d'un indice majoré 534, et enjoint au ministre de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique de procéder à la liquidation de la pension de Mme A... sur la base de l'indice 534 à compter du 2 février 2020.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par un pourvoi, enregistré le 6 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 82-1105 du 23 décembre 1982 ;
- le décret n° 2008-836 du 26 août 2008 ;
- le décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 ;
- le décret n° 2010-302 du 19 mars 2010 ;
- le décret n° 2016-581 du 11 mai 2016 ;
- le décret n° 2016-589 du 11 mai 2016 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Elise Adevah-Poeuf, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... a été reclassée dans le corps commun des secrétaires administratifs de la fonction publique d'Etat, au grade de secrétaire administrative de classe supérieure, à compter du 1er janvier 2012. Par un arrêté du 14 mai 2013, elle a été promue au 13ème échelon de ce grade à compter du 3 février 2013. Placée en disponibilité pour raisons de santé du 2 février 2017 au 1er février 2020, Mme A... a été admise à la retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 2 février 2020. Par un arrêté du 13 juillet 2020, elle s'est vu concéder une pension civile de retraite au titre de l'invalidité à compter du 2 février 2020 calculée sur la base d'un indice majoré 521. Par une décision implicite, née le 21 novembre 2020, le ministre de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique a rejeté la demande de Mme A... tendant à ce que sa pension soit révisée et calculée sur la base de l'indice majoré 534. Une nouvelle décision implicite est née le 19 septembre 2021 du silence gardé par le ministre sur la demande de Mme A... ayant le même objet. Par une première requête, Mme A... a notamment demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2020 en tant qu'il prend comme base de calcul de sa pension l'indice majoré 521 et qu'il aurait omis au moins six trimestres dans la durée des services et bonifications à prendre en compte, ainsi que la décision du 21 novembre 2020 en tant qu'elle rejette sa demande tendant à ce que sa pension soit calculée sur la base de l'indice majoré 534 et à ce que ces six trimestres soient pris en compte. Le 4 octobre 2021, un nouveau titre concédant une pension à Mme A... à compter du 2 février 2020 a été établi, faisant droit à certaines de ses demandes de prise en compte de trimestres supplémentaires, sur la base du même indice 521. Par une seconde requête, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Limoges, notamment, d'annuler cet arrêté du 4 octobre 2021, en tant, d'une part, que sa pension a été calculée sur la base de l'indice majoré 521 et non de l'indice majoré 534, d'autre part, qu'il omet des trimestres dans la durée des services et bonifications à prendre en compte. Par le moyen qu'il invoque, le ministre de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique doit être regardé comme demandant l'annulation des articles 1er à 3 du jugement du 23 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé les décisions en litige en tant que la pension de Mme A... n'a pas été calculée sur la base de l'indice majoré 534 et lui a enjoint de procéder à la liquidation de la pension de cette dernière sur la base de cet indice.
2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 51 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires applicables à la fonction publique de l'Etat, alors en vigueur, repris à l'article L. 514-1 du code général de la fonction publique : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite (...) ".
3. Aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation tel qu'il résulte de l'application de l'article L. 13 par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire ou militaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite ou, à défaut, par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'emploi, grade, classe et échelon antérieurement occupés d'une manière effective, sauf s'il y a eu rétrogradation par mesure disciplinaire ".
4. Il résulte, d'une part, des dispositions citées aux points 2 et 3 que lorsqu'un fonctionnaire est admis à la retraite à l'issue d'une période de disponibilité, la cessation des services valables pour la retraite au sens de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite intervient à la date de sa mise en disponibilité.
5. Il résulte, d'autre part, du I de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite qu'un fonctionnaire ne peut légalement prétendre à ce que sa pension soit liquidée sur la base du traitement afférent au dernier indice obtenu avant la cessation des services valables pour la retraite que dans la mesure où il justifie, à cette date, de six mois de services effectifs dans les grade, classe et échelon correspondant à cet indice. A ce titre, lorsque, dans le cadre d'une réforme statutaire, le reclassement d'un fonctionnaire dans un nouveau grade ou échelon est assorti d'une reprise d'ancienneté visant à tenir compte de l'ancienneté acquise dans le grade ou l'échelon précédent, l'ancienneté ainsi reprise n'équivaut pas à une occupation effective du nouveau grade ou échelon au sens de ces dispositions.
6. En second lieu, d'une part, aux termes du II de l'article 47 du décret du 11 mai 2016 modifiant divers décrets relatifs à l'organisation des carrières des fonctionnaires de catégorie B de la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires relevant, à la date du 1erjanvier 2017, d'un grade assimilé au deuxième grade mentionné à l'article 2 du décret du 11 novembre 2009 susvisé sont reclassés dans leur grade conformément au tableau de correspondance suivant :/ (...) ". Aux termes de la deuxième ligne de ce tableau, les fonctionnaires relevant, dans leur ancienne situation, du 13ème échelon, sont reclassés, dans leur nouvelle situation, au 13ème échelon avec ancienneté acquise. D'autre part, l'article 8-1 du décret du 22 août 2008 fixant l'échelonnement indiciaire des corps et des emplois communs aux administrations de l'Etat et de ses établissements publics ou afférent à plusieurs corps de fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics, dans sa rédaction issue du décret du 11 mai 2016, prévoit que les indices bruts correspondant au 13ème échelon du 2ème grade s'élèvent à 621 au 1er janvier 2016, 631 au 1er janvier 2017 et 638 au 1er janvier 2018. Aux termes de l'annexe A au décret du 23 décembre 1982 relatif aux indices de la fonction publique, à ces indices bruts correspondent respectivement les indices majorés 521, 529 et 534.
7. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... a été reclassée à compter du 1er janvier 2017, avec ancienneté reprise, au 13ème échelon du grade de secrétaire administrative de classe supérieure, tel qu'il résulte de la réforme statutaire prévue par le décret du 11 mai 2016 cité au point précédent. Dès lors, à la date de sa mise en disponibilité, le 2 février 2017, Mme A... ne justifiait pas de six mois de détention effective de ce nouvel échelon, la reprise d'ancienneté étant, ainsi qu'il a été dit au point 5, dépourvue d'incidence à cet égard. Par suite, en jugeant que la pension de Mme A... devait être calculée sur la base de l'indice majoré 534 afférant, en application du décret du 11 mai 2016 modifiant le décret du 22 août 2008 cité au point précédent, à ce nouvel échelon, le tribunal administratif de Limoges a commis une erreur de droit.
8. Il résulte de ce qui précède que les articles 1 à 3 du jugement attaqué doivent être annulés.
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
10. En premier lieu, d'une part, la décision d'octroi initial d'une pension n'est pas au nombre des décisions devant être motivées en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. D'autre part, il n'est pas établi ni même soutenu que Mme A... aurait sollicité, sur le fondement de l'article L. 232-4 du même code, les motifs des décisions implicites de rejet de ses demandes tendant à la révision de sa pension. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que les titres de pension des 13 juillet 2020 et 14 octobre 2021 et les décisions implicites de rejet de ses recours contre le premier de ces titres seraient entachés d'irrégularité faute d'une motivation suffisante.
11. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 7, d'une part, que la pension de Mme A... doit être calculée sur la base du traitement soumis à retenue afférent à l'échelon qu'elle occupait de manière effective antérieurement à son reclassement dans la grille issue de la réforme statutaire intervenue au 1er janvier 2017 et, d'autre part, qu'elle ne peut prétendre au bénéfice des revalorisations indiciaires applicables, en vertu des dispositions du décret du 11 mai 2016, aux échelons de cette nouvelle grille à compter du 1er janvier 2017. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation des arrêtés des 13 juillet 2020 et 4 octobre 2021 lui concédant une pension civile de retraite au titre de l'invalidité à compter du 2 février 2020 en tant que sa pension a été calculée sur le fondement de l'indice majoré 521 correspondant à l'emploi, grade et échelon qu'elle détenait antérieurement à ce reclassement, ni l'annulation des décisions implicites de rejet de ses demandes tendant à la révision de sa pension en tant qu'elle a été calculée sur la base de l'indice majoré 521.
12. Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A... ne peuvent par suite qu'être rejetées, ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 1er à 3 du jugement du 23 mai 2023 du tribunal administratif de Limoges sont annulés.
Article 2 : Les conclusions des demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Limoges dirigées contre les arrêtés des 13 juillet 2020 et 4 octobre 2021 lui concédant une pension civile de retraite au titre de l'invalidité à compter du 2 février 2020 et contre les décisions implicites de rejet nées les 21 novembre 2020 et 19 septembre 2021 en tant que sa pension a été calculée sur la base de l'indice majoré 521, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction, sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de Mme A... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à Mme B... A....