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15/05/2024 | FRANCE | N°494091

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 15 mai 2024, 494091


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative d'enjoindre au président de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) de mettre en demeure les éditeurs de radio et de télévision contrôlés dans le contexte de la campagne pour les élections européennes 2024, d'une part, de se conformer au principe d'équité da

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Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative d'enjoindre au président de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) de mettre en demeure les éditeurs de radio et de télévision contrôlés dans le contexte de la campagne pour les élections européennes 2024, d'une part, de se conformer au principe d'équité dans la programmation des temps d'antenne et de parole, d'autre part, de rétablir cette équité en compensant les atteintes constatées au détriment de M. C... et de l'Union populaire républicaine.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que l'élection des représentants au Parlement européen se tiendra dans un mois ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au principe du caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion ainsi qu'au principe d'équité ;

- le refus de l'Autorité de prononcer une mise en demeure ou d'adopter une recommandation méconnaît le principe du caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion eu égard, d'une part, à la réalité de la représentativité de l'Union populaire républicaine et de sa contribution au débat politique et, d'autre part, à la faible médiatisation des idées défendues par ce parti politique dans le cadre de la campagne électorale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- le code électoral ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 ;

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Pour garantir le respect du caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion, qui est une liberté fondamentale, en période électorale, il appartient à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), en vertu des articles 1er, 3-1 et 13 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, de veiller à ce que les services de radio et de télévision respectent le principe d'équité de traitement des candidats à une élection.

3. L'ARCOM a adopté le 6 mars 2024 une recommandation en vue de l'élection des représentants au Parlement européen les 8 et 9 juin 2024. Conformément à sa délibération du 4 janvier 2011 relative au principe de pluralisme politique dans les services de radio et de télévision en période électorale, et dès lors que le territoire de la République constitue pour cette élection une circonscription électorale unique, cette recommandation impose aux éditeurs de veiller à ce que les listes de candidats et leurs soutiens bénéficient d'une présentation et d'un accès équitable à l'antenne.

4. Il appartient à l'ARCOM, au vu des recensements des temps de parole et d'antenne des candidats, des partis et groupements politiques et de leurs soutiens, de veiller au respect du principe d'équité au cours de la campagne électorale précédant l'élection. Il lui incombe, à ce titre, d'adresser en temps utile des recommandations, des mises en garde, voire, en application des dispositions des articles 42 et 48-1 de la loi du 30 septembre 1986, des mises en demeure, lorsqu'il apparaît, eu égard notamment aux déséquilibres déjà constatés et aux projets de programmation annoncés par les chaînes de radio et de télévision, que ce principe ne pourra pas être respecté pendant la période au cours de laquelle son respect doit être apprécié. L'exercice de ces pouvoirs doit cependant être concilié avec le respect de la liberté de la communication audiovisuelle. En particulier, ni les articles 1er, 3-1 et 13 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ni aucune autre disposition ne confèrent à l'ARCOM le pouvoir de se substituer aux services de communication audiovisuelle dans la définition et la mise en œuvre de leur politique éditoriale.

5. M. B... soutient que l'Union populaire républicaine a saisi à plusieurs reprises l'ARCOM afin que l'autorité fasse usage de ses pouvoirs de mise en demeure auprès des éditeurs de radio et de télévision pour remédier aux manquements constatés dans le traitement dont ce parti politique et son président M. C... font l'objet dans les médias. En l'absence de réponse de l'ARCOM et faute d'évolution dans la manière dont il est traité par les médias, le requérant a saisi le juge des référés du Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative afin qu'il enjoigne à l'autorité de mettre en demeure les éditeurs de radio et de télévision de se conformer, dans le contexte de la campagne pour l'élection des représentants au Parlement européen les 8 et 9 juin 2024, au principe d'équité dans la programmation des temps d'antenne et de parole, et de rétablir cette équité dans la programmation des temps d'antenne et de parole en compensant les atteintes constatées au détriment de l'Union populaire républicaine.

6. Toutefois, d'une part, les éléments produits par le requérant, qui se borne à faire valoir que le président de l'Union populaire républicaine aurait été " sommairement invité sur CNEWS et sur LCP avec des intervenants en opposition avec les positions qu'il défend " et a été privé de la possibilité de s'exprimer sur d'autres radios ou chaines de télévision nationales, ne sont pas de nature à justifier une intervention du juge des référés à très bref délai. D'autre part, eu égard à leur caractère imprécis et peu détaillé, ces mêmes éléments ne permettent pas de considérer que l'ARCOM aurait, en s'abstenant d'adresser une mise en demeure aux éditeurs de radio et de télévision contrôlés dans le contexte de la campagne pour l'élection des représentants au Parlement européen en 2024, porté une atteinte grave et manifestement illégale au principe du caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion qui justifierait que le juge des référés du Conseil d'Etat fasse usage des pouvoirs qu'il tient des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Il suit de là que la requête de M. B... doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B....

Fait à Paris, le 15 mai 2024

Signé : Benoît Bohnert


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 494091
Date de la décision : 15/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 mai. 2024, n° 494091
Origine de la décision
Date de l'import : 24/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:494091.20240515
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