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11/04/2024 | FRANCE | N°493212

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 11 avril 2024, 493212


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de Gironde de mettre fin à sa rétention administrative et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en application de l'article L. 754-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une ordonnance n° 2402279 du 6 avril 2

024, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, d'un...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de Gironde de mettre fin à sa rétention administrative et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en application de l'article L. 754-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une ordonnance n° 2402279 du 6 avril 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, n'a pas admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par une requête, enregistrée le 8 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 6 avril 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de mettre fin à sa rétention administrative et de lui délivrer une attestation de demande d'asile ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le juge administratif est compétent pour statuer sur sa demande de remise en liberté en l'absence de décision préfectorale de maintien en rétention administrative ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors qu'il se trouve maintenu au centre de rétention administrative de Bordeaux alors qu'il a formulé une demande de réexamen de sa demande d'asile en rétention ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile et à sa liberté d'aller et venir ;

- c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a jugé que le préfet de la Gironde était dispensé de prendre un arrêté de maintien en rétention administrative malgré sa demande de réexamen de sa demande d'asile, en méconnaissance de l'article L. 754-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Aux termes de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 542-1 du même code : " En l'absence de recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin à la notification de cette décision. / Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci ". Aux termes de l'article L. 542-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : (...) 2° Lorsque le demandeur : (...) c) présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen ; (...) ". Aux termes de l'article L. 531-41 du même code : " Constitue une demande de réexamen une demande d'asile présentée après qu'une décision définitive a été prise sur une demande antérieure (...). ".

3. Aux termes de l'article L. 754-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la France est l'État responsable de l'examen de la demande d'asile et si l'autorité administrative estime, sur le fondement de critères objectifs, que cette demande est présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de la décision d'éloignement, elle peut prendre une décision de maintien en rétention de l'étranger pendant le temps strictement nécessaire à l'examen de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, en cas de décision de rejet ou d'irrecevabilité de celle-ci, dans l'attente de son départ. (...) / A défaut d'une telle décision, il est immédiatement mis fin à la rétention et l'autorité administrative compétente délivre à l'intéressé l'attestation mentionnée à l'article L. 521-7 ". Aux termes de l'article L. 521-7 du même code : " Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. (...) / La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 311-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux c ou d du 2° de l'article L. 542-2. / Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. ". Aux termes de l'article L. 541-2 du même code : " L'attestation délivrée en application de l'article L. 521-7, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'Office français des réfugiés et apatrides, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant la Cour nationale du droit d'asile statuent ".

4. Il résulte de l'instruction devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux que M. B..., ressortissant géorgien, est entré en France le 22 mars 2024 après en avoir été éloigné à deux reprises les 21 décembre 2021 et 18 avril 2023, vers son pays d'origine. Lors de ses précédents séjours en France, M. B... a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 4 septembre 2019. Son recours contestant cette décision a été rejeté par une ordonnance du 10 janvier 2020 de la Cour nationale du droit d'asile. M. B... a présenté deux demandes distinctes de réexamen de sa demande d'asile, que l'OFPRA a rejetées par deux décisions des 30 novembre 2021 et 3 avril 2023. Après être à nouveau entré en France le 22 mars 2024, M. B..., interpellé pour vol le lendemain, a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour sur le territoire français pendant trois ans par arrêté du préfet de la Gironde du 24 mars 2024. Il a été placé en centre de rétention administrative par une décision du préfet de la Gironde du même jour. Par une ordonnance du 26 mars 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux a prolongé la mesure de rétention administrative de vingt-huit jours. M. B... a déposé en rétention une demande d'asile le 29 mars 2024. Il a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner au préfet de la Gironde de mettre fin à son placement en rétention administrative et de lui délivrer une attestation de demande d'asile. M. B... relève appel de l'ordonnance du 6 avril 2024 par laquelle ce juge a rejeté sa demande.

5. Il résulte des dispositions citées au point 2 que le demandeur d'asile présentant une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen ne peut prétendre à un droit de se maintenir sur le territoire français. M. B... ne peut, dès lors, utilement soutenir, en se prévalant de sa troisième demande de réexamen de sa demande d'asile, que, faute pour l'autorité administrative d'avoir pris une décision de maintien en rétention à la suite de sa nouvelle demande de réexamen, il devrait, en application des dispositions citées au point 3, être mis fin à cette rétention pour que lui soit délivrée une attestation de demande d'asile permettant son maintien sur le territoire français. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance qu'il attaque, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a estimé que son maintien en rétention ne portait pas une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales qu'il invoque.

6. Il résulte de tout ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel de M. B... ne peut être accueilli. Par suite, sa requête, y compris les conclusions présentées aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B....

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Fait à Paris, le 11 avril 2024

Signé : Thomas Andrieu


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 493212
Date de la décision : 11/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 avr. 2024, n° 493212
Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:493212.20240411
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