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03/04/2024 | FRANCE | N°492860

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 03 avril 2024, 492860


Vu la procédure suivante :

Mme G... E... et M. B... A..., agissant au nom de leurs filles mineures, Mlle D... A... et Mlle C... F... B..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) d'accorder sans délai le bénéfice effectif des conditions matérielles d'accueil à leur fille, Mlle B..., en leur proposant un lieu d'hébergement et en leur versant l'allocation pour demandeur d'asile

au nom de leur fille, sous astreinte de 50 euros par jour de retar...

Vu la procédure suivante :

Mme G... E... et M. B... A..., agissant au nom de leurs filles mineures, Mlle D... A... et Mlle C... F... B..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) d'accorder sans délai le bénéfice effectif des conditions matérielles d'accueil à leur fille, Mlle B..., en leur proposant un lieu d'hébergement et en leur versant l'allocation pour demandeur d'asile au nom de leur fille, sous astreinte de 50 euros par jour de retard. Par une ordonnance n°2406072/9 du 18 mars 2024, la juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme E... et M. A... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 18 mars 2024 de la juge des référés du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'enjoindre au directeur général de l'OFII d'accorder le bénéfice effectif des conditions matérielles d'accueil à leur fille, Mlle B... en leur proposant un lieu d'hébergement et en leur délivrant la carte prévue à l'article D. 553-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans délai et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'OFII la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors qu'ils sont dépourvus de logement, dans une situation d'extrême précarité, avec leurs deux filles âgées d'un an et demi et de quatre mois, malgré plusieurs appels au " 115 ", service d'appel téléphonique du Samu Social de Paris ;

- alors que le bénéfice des conditions matérielles d'accueil a été attribué à leur fille le 29 décembre 2023, le refus de leur attribuer un hébergement et de leur verser l'allocation pour demandeur d'asile porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile, à l'intérêt supérieur de l'enfant, au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants, au principe de dignité de la personne humaine et au droit au respect de leur vie privée et familiale ;

- c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Paris n'a pas tiré les conséquences de l'absence de décision écrite et motivée de l'OFII refusant le bénéfice des conditions matérielles d'accueil, en méconnaissance de l'article L. 551-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Paris a considéré que la condition d'urgence n'était pas satisfaite eu égard à leur refus d'une orientation vers le SAS Pays de la Loire dès lors que, d'une part, ce refus ne résulte d'aucune pièce versée au contradictoire et, d'autre part, en tout état de cause, l'hébergement d'urgence est sans lien avec les conditions matérielles d'accueil ;

- leur convocation à l'OFII le 18 mars 2024 n'a donné lieu ni à une proposition d'hébergement ni au versement de l'allocation pour demandeur d'asile au bénéfice de leur fille.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 521-2 du code de justice administrative que lorsqu'un requérant fonde son action sur la procédure particulière instituée à cet article, il lui appartient de justifier de circonstances caractérisant une situation d'urgence qui implique, sous réserve que les autres conditions posées par cet article soient remplies, qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale soit prise dans les quarante-huit heures.

3. Il résulte de l'instruction diligentée par la juge des référés du tribunal administratif de Paris que Mme E... et M. A..., ressortissants ivoiriens, sont les parents de deux filles, Mlle D... A..., qui s'est vue reconnaître la qualité de réfugiée le 6 juillet 2023, et Mlle C... F... B..., née le 27 novembre 2023, pour laquelle ils ont déposé une demande d'asile le 26 décembre 2023. Mme E... et M. A... ont demandé à la juge des référés du tribunal administratif de Paris, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration d'accorder sans délai le bénéfice effectif des conditions matérielles d'accueil à leur fille, Mlle B..., en leur proposant un lieu d'hébergement et en leur versant l'allocation pour demandeur d'asile au nom de leur fille. Ils relèvent appel de l'ordonnance du 18 mars 2024 par laquelle la juge des référés de ce tribunal a rejeté leur demande.

4. Pour rejeter la demande de Mme E... et M. A... au motif que la condition particulière d'urgence exigée par les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ne pouvait être regardée comme remplie, la juge des référés a relevé, d'une part, que Mme E... et M. A... ont refusé l'hébergement en centre provisoire d'hébergement à Angers vers lequel ils avaient été orientés en septembre 2023 après que leur fille aînée a été placée sous la protection de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, alors que cet hébergement était pourtant adapté à une famille de quatre personnes, et que si Mme E... a justifié ce refus par l'état alors avancé de sa grossesse, Mme E... et M. A... ont refusé, postérieurement, une orientation vers le sas d'accueil Pays de la Loire qui leur a été proposée en février 2024. Elle en a déduit que, dans ces conditions, les requérants devaient être regardés comme s'étant eux-mêmes placés dans la situation d'urgence qu'ils invoquent. La juge des référés a relevé, d'autre part, que Mme E... et M. A... ont été convoqués par l'OFII le 18 mars 2024 afin qu'il soit procédé à un réexamen de leur situation au regard de leur droit à bénéficier pour leur fille de l'allocation pour demandeur d'asile.

5. Il ne résulte pas des pièces versées à l'instruction conduite par la juge des référés du tribunal administratif que, ainsi que le soutiennent les requérants, l'OFII ait accordé les conditions matérielles d'accueil à leur fille, alors que ce dernier a précisé ne pas les avoir accordées au motif que les intéressés, qui résident régulièrement sur le territoire depuis le mois d'octobre 2023 et peuvent percevoir des prestations familiales, n'auraient pas fourni les pièces justificatives demandées, et que le courrier du 29 décembre 2023 se bornait à les inviter à se présenter au service d'accompagnement des demandeurs d'asile. Les requérants n'apportent, par ailleurs, à l'appui de leur requête d'appel, aucun élément nouveau ou suffisamment précis de nature à remettre en cause l'appréciation à laquelle s'est ainsi livrée la juge des référés de première instance quant à l'absence de justification d'une urgence caractérisée de nature à justifier l'adoption de mesures dans le délai de quarante-huit heures prévu par l'article L. 521-2 du code de justice administrative.

6. Par suite, Mme E... et M. A... n'étant manifestement pas fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent, qui n'est par ailleurs entachée d'aucune irrégularité, il y a lieu de rejeter leur requête selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme E... et M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme G... E... et M. B... A....

Copie en sera adressée à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Fait à Paris, le 3 avril 2024

Signé : Alban de Nervaux


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 492860
Date de la décision : 03/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 avr. 2024, n° 492860
Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:492860.20240403
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