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16/02/2024 | FRANCE | N°491523

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 16 février 2024, 491523


Vu la procédure suivante :

L'association La Cimade a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'avis n° 20237221 de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) du 11 janvier 2024 se substituant au refus de communiquer les documents administratifs de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 8 décembre 2023 en ce qu'il considère sans objet ou irrecevables les demandes mentionnées au point 1) a), 1

) c), 2) b) et 2) de refuser la communication des documents deman...

Vu la procédure suivante :

L'association La Cimade a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'avis n° 20237221 de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) du 11 janvier 2024 se substituant au refus de communiquer les documents administratifs de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 8 décembre 2023 en ce qu'il considère sans objet ou irrecevables les demandes mentionnées au point 1) a), 1) c), 2) b) et 2) de refuser la communication des documents demandés et, d'autre part, d'enjoindre à l'OFII de communiquer les documents mentionnés aux points 1 et 2 de l'avis de la CADA, dans un délai de quarante-huit heures à compter de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2401724 du 26 janvier 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 6 et 16 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association La Cimade demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 26 janvier 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Paris ;

2°) de suspendre l'avis du 11 janvier 2024 de la CADA en ce qu'il considère sans objet ou irrecevables les demandes mentionnées au point 1) a), 1) c) et 2) de refuser la communication des documents demandés ;

3°) d'enjoindre au directeur général de l'OFII de communiquer les documents administratifs achevés, mentionnés aux points 1 et 2 de l'avis de la CADA, dans un délai de quarante-huit heures à compter de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'OFII la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt à agir ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que les refus de communication par l'OFII des documents demandés portent atteinte aux intérêts qu'elle entend défendre en ce qu'elle n'a pas accès aux données statistiques, instructions, circulaires et notes prises par l'administration concernant la procédure d'asile ou les conditions d'accueil des demandeurs d'asile ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'accès aux documents administratifs et au droit à un recours effectif ;

- l'absence de publication ou de mise en ligne des documents administratifs mentionnés à l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration l'empêche, le cas échéant, de les contester par la voie d'un recours administratif ou d'un recours contentieux en cas d'illégalité du contenu des instructions y figurant ;

- l'OFII n'a pas respecté son engagement de transmettre les documents demandés au cours du mois de janvier 2024 dès lors que les documents reçus par voie électronique sont tronqués ;

- les statistiques relatives aux bénéficiaires des conditions matérielles d'accueil par nationalités sont achevées dès lors que l'OFII les a publiées dans son rapport d'activité en octobre 2023 ;

- les notes du 23 avril 2021 et du 9 août 2021 n'ont pas été publiées dans un bulletin ou sur le site de l'OFII alors qu'elles ont le caractère de documents administratifs au sens de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le directeur général de l'OFII a manqué à son obligation d'informer le public prévu à l'article L. 121-8 du code général de la fonction publique en transmettant des informations erronées à la CADA.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le 24 octobre 2023, l'association La Cimade a demandé à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) de lui communiquer " le document connu sous le nom d'Indicateurs synthétiques du DNA pour le mois de juin à septembre 2023, en incluant " neuf tableurs relatifs aux données d'entrée, de sortie et de présence des étrangers, d' " autres documents ou statistiques " relatifs au " nombre de bénéficiaires de l'allocation pour demandeur d'asile par nationalités ", au " suivi d'activité pour les demandeurs d'asile du marché public des structures de premier accueil, au " nombre de refus et de retraits des conditions matérielles d'accueil par catégorie de refus " ainsi que " les documents mis à jour de formation interne ainsi que les instructions, note, lignes directrices ou " document approchant " établis par la direction de l'asile de l'OFII en 2022 et 2023 ". Le 8 décembre 2023, l'OFII a rejeté la demande en indiquant que les documents seraient transmis en janvier 2024. La Cimade a saisi d'une demande de communication de ces documents la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) qui, par un avis du 11 janvier 2024, a déclaré la demande sans objet en tant qu'elle concerne les documents visés aux points 1) a) (tableurs des entrées par nationalité), 1 c) (tableurs des sorties par nationalité) et 2 d) (documents mis à jour de formation interne ainsi que les instructions, note, lignes directrices, et autres de l'OFII), au motif que ces documents n'existeraient pas, irrecevable en tant qu'elle concerne les informations visées au point 2 c) (le nombre de refus et de retraits des conditions matérielles d'accueil par catégorie de refus) et rendu un avis favorable à la communication des autres documents. L'association La Cimade a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l'avis du 11 janvier 2024 de la CADA et d'enjoindre à l'OFII de communiquer l'intégralité des documents demandés. Par une ordonnance du 26 janvier 2024 dont La Cimade interjette appel, le juge des référés a rejeté sa demande.

3. Le requérant qui saisit le juge des référés sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit justifier des circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de cet article, la circonstance qu'une atteinte à une liberté fondamentale serait avérée n'étant pas de nature, par elle-même, à caractériser l'existence d'une situation d'urgence.

4. Pour rejeter la demande de La Cimade, le juge des référés a estimé que les circonstances qu'elle invoquait pour justifier d'une situation d'urgence particulière, qui tenaient au délai anormalement long mis par l'OFII à lui communiquer les documents qu'elle lui demande et l'intérêt public qui s'attache à la publication de ces documents, n'étaient pas de nature à caractériser une situation d'urgence telle qu'une mesure de sauvegarde doive être ordonnée dans un délai de quarante-huit heures. Il a également relevé que les indicateurs synthétiques DNA avaient été transmis le 25 janvier et que " le suivi d'activité pour les demandeurs d'asile du marché public des structures de premier accueil " le serait au mois de février. A supposer même que, comme le soutient la requérante, ces dernières communications ne satisferaient pas intégralement ses demandes, elle n'apporte, en faisant valoir que le refus de l'OFII de lui communiquer les documents demandés ou son manque de diligence à le faire porte une atteinte grave et immédiate à l'intérêt public de l'information du public et aux intérêts qu'elle entend défendre aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation du juge des référés selon laquelle ces circonstances, outre qu'elles ne justifieraient en tout état de cause pas d'ordonner la suspension de l'avis de la CADA, qui n'est pas une décision faisant grief, ne caractérisent pas de nécessité pour elle de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.

5. La requête de La Cimade doit, par suite, être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 de ce code.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de l'association La Cimade est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association La Cimade.

Fait à Paris, le 16 février 2024

Signé : Gilles Pellissier


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 491523
Date de la décision : 16/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 fév. 2024, n° 491523
Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:491523.20240216
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