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20/11/2023 | FRANCE | N°489364

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 20 novembre 2023, 489364


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 10 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat Jeunes Médecins demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution de la décision implicite de rejet né du silence gardé par le ministre de la santé et de la prévention sur sa demande tendant à l'adoption de textes règlementaires relatifs à la quatrième année d'internat en médecine

générale ;



2°) d'enjoindre au ministre de la santé et de la préventi...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 10 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat Jeunes Médecins demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision implicite de rejet né du silence gardé par le ministre de la santé et de la prévention sur sa demande tendant à l'adoption de textes règlementaires relatifs à la quatrième année d'internat en médecine générale ;

2°) d'enjoindre au ministre de la santé et de la prévention de prendre les textes règlementaires concernant la quatrième année d'internat en médecine générale, notamment un décret en Conseil d'Etat permettant aux docteurs juniors de médecine générale de percevoir des émoluments forfaitaires correspondant à la rémunération de leurs honoraires et un arrêté fixant les contours de la convention type de chaque stage en secteur ambulatoire de la phase de consolidation du diplôme d'études spécialisées (DES) de médecine générale ;

3°) à titre subsidiaire, dans l'attente de la parution de ces textes, de prononcer le report de la création de la 4ème année d'internat en médecine générale ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite, d'une part, du fait de la perte d'attractivité de la médecine générale faute de visibilité sur la quatrième année du DES de cette spécialité, d'autre part, en raison de l'absence d'information suffisante sur les conditions de déroulement de cette année, notamment du stage en ambulatoire, malgré son importance pour exercer son choix de spécialité de manière éclairée et le caractère très difficilement réversible de ce choix et, enfin, compte tenu du manque de visibilité pour les étudiants du deuxième cycle de médecine et en particulier ceux de sixième année ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse ;

- le refus de prendre les textes règlementaires nécessaires à la mise en œuvre de la quatrième année d'internat en médecine générale, prévue par l'article L. 632-2 du code de l'éducation, est illégal ;

- l'absence de précision réglementaire crée une rupture d'égalité illégale entre la médecine générale et les autres spécialités du fait de l'impossibilité pour les futurs médecins généralistes de faire valoir un titre d'ancien assistant des hôpitaux pour accéder au secteur 2 et en raison de l'obligation d'avoir un stage reconductible, ainsi qu'entre les étudiants en médecine générale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 ;

- l'arrêté du 3 août 2023 portant modification de la maquette de formation du diplôme d'études spécialisées de médecine générale ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.

3. L'article 37 de la loi du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 a modifié l'article L. 632-2 du code de l'éducation pour porter de trois à quatre années la durée du troisième cycle des études de médecine pour la spécialité de médecine générale et prévoir que la quatrième année ainsi ajoutée est effectuée sous forme de stage. Son II dispose que cette nouvelle durée s'applique aux étudiants qui commencent le troisième cycle à la rentrée de l'année universitaire 2023. Pour l'application de ces dispositions, un arrêté a été pris le 3 août 2023 par le ministre de la santé et de la prévention et la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche afin de modifier la maquette de formation du diplôme d'études spécialisées de médecine générale.

4. Le syndicat des Jeunes Médecins a demandé à ces deux ministres et à la Première ministre de prendre des textes réglementaires relatifs à l'organisation de cette quatrième année, notamment s'agissant des conditions de rémunération des étudiants concernés et de la convention type des stages en secteur ambulatoire. Il a demandé l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite rejetant sa demande. Sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, il en demande la suspension de l'exécution.

5. Pour justifier de la condition d'urgence, le syndicat requérant fait notamment valoir la perte d'attractivité de la médecine générale qui découlerait selon lui du manque actuel de visibilité sur la quatrième année du troisième cycle des études de médecine pour cette spécialité et les conséquences négatives sur la possibilité pour les étudiants du deuxième cycle et en particulier ceux de sixième année de choisir de manière éclairée leur spécialité et de construire leur parcours de formation. Toutefois, à supposer même de tels effets avérés, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la nouvelle durée du troisième cycle des études de médecine pour la spécialité de médecine générale s'applique aux étudiants qui commencent ce troisième cycle à la rentrée de l'année universitaire 2023 et qui, donc, ont vocation à en effectuer la quatrième année en 2026. Par ailleurs, il ressort des éléments versés par le syndicat Jeunes Médecins à l'appui de sa demande de référé que les choix de spécialité pour l'année en cours ont déjà été réalisés et que la prochaine procédure dite " d'appariement " aura lieu en septembre 2024. Dans ces conditions, les circonstances invoquées par le syndicat requérant ne permettent pas de caractériser une atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts qu'il entend défendre.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, que la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie. Il y a lieu, par suite, de rejeter la requête du syndicat Jeunes Médecins, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête du syndicat Jeunes Médecins est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au syndicat Jeunes Médecins.

Copie en sera adressée à la Première ministre, au ministre de la santé et de la prévention et à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Fait à Paris, le 20 novembre 2023

Signé : Anne Courrèges


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 489364
Date de la décision : 20/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 nov. 2023, n° 489364
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:489364.20231120
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