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12/10/2023 | FRANCE | N°488644

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 12 octobre 2023, 488644


Vu la procédure suivante :

M. D... et Mme A... B... ont demandé à la juge des référés du tribunal administratif de Rennes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Finistère de les orienter vers un centre d'hébergement d'urgence, ou, à défaut, dans une structure hôtelière dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l'ordonnance , sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par une

ordonnance n° 2304949 du 15 septembre 2023, la juge des référés du tri...

Vu la procédure suivante :

M. D... et Mme A... B... ont demandé à la juge des référés du tribunal administratif de Rennes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Finistère de les orienter vers un centre d'hébergement d'urgence, ou, à défaut, dans une structure hôtelière dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l'ordonnance , sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2304949 du 15 septembre 2023, la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a, d'une part, admis provisoirement M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle et, d'autre part, rejeté le surplus de leur demande.

Par une requête, enregistrée le 29 septembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... et Mme B... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de leur assurer un hébergement adapté, pérenne et un accompagnement social ou de leur proposer une solution alternative jusqu'à ce qu'ils bénéficient d'une solution adaptée, pérenne et d'un accompagnement social, dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l'ordonnance, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à leur conseil qui renoncera, dans cette hypothèse, à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, ou, dans l'hypothèse où l'aide juridictionnelle ne leur serait pas accordée, à leur verser directement cette somme, en application de l'article 37 de la loi 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la condition d'urgence est satisfaite eu égard, d'une part, à la gravité de l'état de santé de M. C... et, d'autre part, à la surdité partielle de leur petite-fille, qui est également scolarisée en classe de quatrième ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ;

- l'absence d'hébergement d'urgence méconnaît le droit au respect de la vie privée et familiale, le droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants, le droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé et l'intérêt supérieur de l'enfant ;

- la carence de l'Etat à leur octroyer un hébergement d'urgence méconnaît le droit à l'hébergement, dès lors que, en premier lieu, elle entraîne des conséquences graves sur leur situation, en deuxième lieu, M. C... n'a pas à justifier de circonstances exceptionnelles en ce qu'il est en situation régulière sur le territoire français, du fait du recours devant le tribunal administratif de Rennes contre le refus de délivrance de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours dont il fait l'objet et, en dernier lieu, ils se trouvent dans une situation de vulnérabilité importante eu égard à la gravité de l'état de santé de M. C... et à la présence au sein de la famille d'une adolescente atteinte d'une surdité partielle et scolarisée en classe de quatrième.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. L'article L. 345-2 du code de l'action sociale et des familles prévoit que, dans chaque département, est mis en place, sous l'autorité du préfet, " un dispositif de veille sociale chargé d'accueillir les personnes sans abri ou en détresse (...) ". L'article L. 345-2-2 du même code dispose que : " Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence. (...) ". Aux termes de son article L. 345-2-3 : " Toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y bénéficier d'un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée (...) ". Aux termes de l'article L. 121-7 du même code : " Sont à la charge de l'Etat au titre de l'aide sociale : (...) 8° Les mesures d'aide sociale en matière de logement, d'hébergement et de réinsertion, mentionnées aux articles L 345-1 à L. 345-3 (...) ".

3. Il appartient aux autorités de l'Etat, sur le fondement des dispositions citées au point 2, de mettre en œuvre le droit à l'hébergement d'urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique ou sociale. Une carence caractérisée dans l'accomplissement de cette mission peut faire apparaître, pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu'elle entraîne des conséquences graves pour la personne intéressée. Il incombe au juge des référés d'apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de la santé et de la situation de famille de la personne intéressée.

4. Pour rejeter, par l'ordonnance dont M. C... et Mme B... interjettent appel, leur demande, présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Finistère d'assurer en urgence leur hébergement, la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a relevé d'une part que, malgré les efforts de l'Etat pour accroître les capacités d'hébergement d'urgence dans le département du Finistère au cours des années récentes, l'ensemble des besoins les plus urgents, en constante augmentation, ne peut être satisfait, d'autre part que " si M. C... souffre d'un syndrome sévère d'apnée du sommeil, d'un syndrome du canal carpien droit, d'une hypertension artérielle, de dorso-lombalgies, d'épisodes récidivants de sous maxillite gauche, d'une bronchite chronique et d'un syndrome anxio-dépressif chronique, le certificat médical qu'il produit n'établit pas que ces pathologies, qui font l'objet d'un suivi médical régulier sans nécessiter d'interventions particulières (...) seraient constitutives de circonstances particulièrement graves concernant sa santé. ". D'une part, la juge des référés n'a, contrairement à ce que soutiennent les requérants, pas méconnu les principes rappelés au point 3 en recherchant, pour apprécier si le fait pour le préfet de ne pas proposer aux requérants de solution d'hébergement était constitutif d'une carence caractérisée de ses obligations, si l'état de santé de M. C... présentait une gravité particulière. D'autre part, les nouveaux documents médicaux produits par les requérants à l'appui de leur requête d'appel ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation, non plus que la circonstance, inopérante, que la mesure d'éloignement prise à leur encontre ne puisse être exécutée d'office. Par suite, M. C... et Mme B... ne sont manifestement pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, et eu égard à son office, la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Il suit de là que leur requête en appel doit être rejetée, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du même code.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. D... et Mme A... B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. D... et à Mme A... B....

Fait à Paris, le 12 octobre 2023

Signé : Gilles Pellissier


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 488644
Date de la décision : 12/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 oct. 2023, n° 488644
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:488644.20231012
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