La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/04/2023 | FRANCE | N°472504

France | France, Conseil d'État, 12 avril 2023, 472504


Vu la procédure suivante :

M. D... A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de prendre toutes mesures pour faire cesser les atteintes à ses libertés fondamentales résultant de la décision du 21 juillet 2022 par laquelle la commission de médiation de la Charente-Maritime a rejeté sa demande en vue de l'attribut

ion d'un logement dans le cadre du droit au logement opposable et, e...

Vu la procédure suivante :

M. D... A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de prendre toutes mesures pour faire cesser les atteintes à ses libertés fondamentales résultant de la décision du 21 juillet 2022 par laquelle la commission de médiation de la Charente-Maritime a rejeté sa demande en vue de l'attribution d'un logement dans le cadre du droit au logement opposable et, en dernier lieu, d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui attribuer sans délai un domicile exempt de substances chimiques ou odorantes et situé le plus loin possible de sources de combustion ou de gaz d'échappement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2300147 du 16 février 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 28 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime, ou à tout le moins à la commission de médiation, de réexaminer sa demande et de prendre toutes mesures pour faire cesser les atteintes à ses libertés fondamentales et, par voie de conséquence, lui attribuer sans délai un domicile exempt de substances chimiques ou odorantes, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Il soutient que :

- l'ordonnance du 16 février 2023 est entachée d'irrégularité dès lors que le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a soulevé d'office le moyen tiré de ce qu'il n'établissait pas que son logement actuel était inadapté à son état de santé pour procéder à une substitution de motifs de la décision de la commission de médiation, sans en avoir préalablement informé les parties, en méconnaissance de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors qu'il est contraint de dormir à l'extérieur de son logement, en raison de son caractère inadapté à son handicap et du risque qu'il présente pour sa santé en raison du syndrome d'intolérance aux odeurs chimiques dont il souffre ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de toute personne d'être logée dans un logement adapté à son handicap, au droit de mener une vie familiale normale, au droit à la vie et au droit à la santé ;

- dès lors que le logement social dont il bénéficie n'est pas adapté à son handicap et entraîne un risque grave pour sa santé, il doit se voir attribuer un logement en urgence en application de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022, qui a ouvert le droit au logement opposable aux personnes bénéficiant d'un logement inadapté à leur handicap.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Aux termes de l'article L. 441-2-3 du code de l'action sociale et de la famille : " I. -Dans chaque département, une ou plusieurs commissions de médiation sont créées auprès du représentant de l'Etat dans le département. Chaque commission est présidée par une personnalité qualifiée désignée par le représentant de l'Etat dans le département. (...) II. -La commission de médiation peut être saisie par toute personne qui, satisfaisant aux conditions réglementaires d'accès à un logement locatif social, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande de logement dans le délai fixé en application de l'article L. 441-1-4. Elle peut être saisie sans condition de délai lorsque le demandeur, de bonne foi, est dépourvu de logement, menacé d'expulsion sans relogement, hébergé ou logé temporairement dans un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, logé dans des locaux impropres à l'habitation ou présentant un caractère insalubre ou dangereux. Elle peut également être saisie, sans condition de délai, lorsque le demandeur est logé dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d'un logement décent, s'il a au moins un enfant mineur, s'il présente un handicap au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles ou s'il a au moins une personne à charge présentant un tel handicap. Elle peut aussi être saisie sans condition de délai lorsque le demandeur ou une personne à sa charge est logé dans un logement non adapté à son handicap, au sens du même article L. 114. (...) Dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu'elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence. Elle détermine pour chaque demandeur, en tenant compte de ses besoins et de ses capacités, les caractéristiques de ce logement, ainsi que, le cas échéant, les mesures de diagnostic ou d'accompagnement social nécessaires. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction menée par le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers que M. A... B... s'est vu opposer le 14 juin 2022 par la commission de médiation de la Charente-Maritime une décision de refus de sa demande tendant à l'attribution, dans le cadre du droit au logement opposable, d'un nouveau logement compatible avec son état de santé. Son recours gracieux contre cette décision a été rejeté par décision du 22 juillet 2022, aux motifs qu'il occupe déjà un logement social adapté à ses ressources et à sa situation familiale et qu'il lui appartient, s'il souhaite changer de logement, de déposer une nouvelle demande de logement social. M. A... B... a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Charente-Maritime de prendre toutes mesures pour faire cesser les atteintes à ses libertés fondamentales résultant de la décision du 21 juillet 2022 de la commission de médiation de la Charente-Maritime rejetant sa demande de relogement. Par l'ordonnance attaquée du 16 février 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

4. M. A... B... fait valoir au soutien de sa requête que la décision contestée de la commission de médiation de la Charente-Maritime porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit de toute personne d'être logée dans un logement adapté à son handicap, au droit de mener une vie familiale normale, au droit à la vie et au droit à la santé, dès lors qu'il est contraint, en raison du syndrome d'intolérance aux odeurs chimiques dont il souffre de résider à l'extérieur de son logement, inadapté à son handicap.

5. En premier lieu, en tant que la demande de M. A... B... tend à la suspension de la décision de la commission de médiation et à ce qu'un logement lui soit proposé par le préfet de la Charente-Maritime en vertu des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation, elle se fonde sur l'invocation du droit au logement du requérant, que les décisions de la commission de médiation relatives au caractère prioritaire de certaines demandes ont pour objet de garantir. Ce droit ne constitue pas l'une des libertés fondamentales dont la méconnaissance peut être invoquée sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.

6. En second lieu, la demande de M. A... B... peut également être interprétée comme tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui proposer une solution d'hébergement en urgence en application de de l'article L. 345-2 du code de l'action sociale et des familles aux termes duquel " Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence ", afin de prévenir l'aggravation de son état de santé qui résulterait du caractère inadapté de son logement actuel compte tenu du syndrome d'intolérance aux odeurs chimiques dont il souffre. Pour estimer que la condition d'urgence particulière prévue par les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'était pas remplie, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers s'est fondé, d'une part, sur la circonstance que M. A... B... réside dans son logement actuel depuis 2008 et n'a jamais pris l'attache de son bailleur afin qu'une solution puisse être trouvée à sa situation, ni entrepris de démarche avant le mois d'août 2020 afin de se voir attribuer un nouveau logement et, d'autre part, que dans le cadre de cette demande, le requérant n'a pas été en mesure, en dépit de l'aide d'une assistante sociale, de fournir les pièces requises afin de compléter son dossier de demande de relogement. D'autre part, il a estimé que ni le certificat médical du 17 octobre 2022, rédigé en des termes généraux, ni la circonstance que l'intéressé perçoit l'allocation adulte handicapé n'étaient de nature à établir que le logement actuellement occupé par le requérant serait inadapté à son handicap ou son état de santé.

7. M. A... B... n'apporte, en appel, aucun élément de nature à remettre en cause les appréciations retenues, au regard des éléments portés à sa connaissance, par le premier juge, qui n'a, contrairement à ce qui est soutenu, pas procédé à une substitution de motifs en relevant dans son ordonnance les éléments mentionnés au point 5.

8. Il y a, par suite, lieu de rejeter sa requête, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du même code.

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C... B...

Fait à Paris, le 12 avril 2023

Signé : Benoît Bohnert


Synthèse
Numéro d'arrêt : 472504
Date de la décision : 12/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 avr. 2023, n° 472504
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:472504.20230412
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award