Vu les procédures suivantes :
I. Sous le n° 459549, par une requête, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 16 décembre 2021 et les 4, 6 et 11 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution, d'une part, de la décision implicite de rejet née le 2 novembre 2021 du silence gardé par la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur sa demande tendant à ce que sa nomination en qualité de professeur des universités à l'université de Bordeaux (poste PR - Galaxie 550 droit administratif et financier / droit de l'Union européenne, institutionnel et matériel) soit proposée au Président de la République et, d'autre part, de la décision du 15 novembre 2021 de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche confirmant le rejet de sa demande ;
2°) d'enjoindre, d'une part, à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation de proposer sa nomination en qualité de professeur des Universités à l'Université de Bordeaux (poste PR - Galaxie 550 " droit administratif et financier - droit de l'Union européenne, institutionnel et matériel ") et, d'autre part, à l'université de Bordeaux de prendre toute mesure utile en vue de cette nomination, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé un délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le juge des référés du Conseil d'Etat est compétent pour statuer sur sa requête en application des dispositions de l'article R. 311-1 du code de justice administrative ;
- la condition d'urgence est remplie, dès lors qu'il est porté une atteinte suffisamment grave et immédiate, d'une part, à sa situation personnelle et professionnelle et, d'autre part, à l'intérêt public tenant au bon déroulement de la campagne de recrutement des professeurs d'université ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées, dès lors que la ministre chargée de l'enseignement supérieur n'était pas compétente pour procéder à la nomination conformément aux articles 49-3 et 50-1 du décret du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences ;
- elles sont entachées d'illégalité en ce que la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation a admis que l'université de Bordeaux était en droit de mettre fin au processus de recrutement en supprimant, par délibération n° 2021-64 du 18 octobre 2021 le poste PR n° 550 " droit administratif et financier / droit de l'Union européenne, institutionnel et matériel " ;
- elles sont entachées de détournement de pouvoir dès lors qu'elles confirment la décision de l'université de Bordeaux de mettre un terme au processus de recrutement d'un professeur d'université pour le poste n° 550, elle-même entachée d'un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2022, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'elle est irrecevable, que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2022, l'université de Bordeaux conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
II. Sous le n° 459551, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 16 décembre 2021 et le 6 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution, d'une part, de la délibération du conseil d'administration de l'université de Bordeaux n° 2021-64 du 18 octobre 2021 relative à la suppression du poste PR - Galaxie 550 " droit administratif et financier - droit de l'Union européenne, institutionnel et matériel " et, d'autre part, de la délibération du 18 octobre 2021 par laquelle cette même instance, siégeant dans sa formation restreinte aux professeurs des universités, a décidé de mettre fin au processus de recrutement engagé en vue de pourvoir ce poste ;
2°) d'enjoindre au président de l'université de Bordeaux de reprendre la procédure de recrutement d'un professeur sur le poste PR - Galaxie 550 " droit administratif et financier - droit de l'Union européenne, institutionnel et matériel ", à savoir prendre toute mesure utile afin que le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche propose au Président de la République sa nomination sur ledit poste, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le juge des référés du Conseil d'Etat est compétent pour statuer sur sa requête en application des dispositions de l'article R. 311-1 du code de justice administrative ;
- la condition d'urgence est remplie, dès lors qu'il est porté une atteinte suffisamment grave et immédiate, d'une part, à sa situation personnelle et professionnelle et, d'autre part, à l'intérêt public tenant au bon fonctionnement déroulement de la campagne de recrutement des professeurs d'université ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- les délibérations attaquées sont entachées d'incompétence en ce qu'elles constituent toutes deux des décisions de refus de nomination du lauréat d'un concours ;
- elles sont entachées d'illégalité en ce que le conseil d'administration de l'université de Bordeaux a supprimé sans motif valable le poste PR n° 550, et mis fin, par voie de conséquence, au processus de recrutement en vue de pourvoir ce poste ;
- elles sont entachées de détournement de pouvoir dès lors que leur véritable motif était de faire en sorte que le poste ne soit pas attribué à un candidat extérieur mais à un maître de conférences en poste au sein de l'université de Bordeaux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2022, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2022, l'université de Bordeaux conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A... et, d'autre part, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et l'université de Bordeaux ;
Ont été entendus lors de l'audience publique du 6 janvier 2022, à 14 heures 30 :
- Me Mégret, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A... ;
- M. A... ;
- Me Boulloche, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'université de Bordeaux ;
- les représentants de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a reporté la clôture de l'instruction au 11 janvier 2022, à 18 heures ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes de M. A... tendent à la suspension de l'exécution de l'ensemble des décisions analysées ci-dessus. Elles présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu, dès lors, de les joindre pour statuer par une même ordonnance.
2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
3. M. A..., maître de conférences en droit public à l'université d'Artois, qualifié aux fonctions de professeur des universités, s'est porté candidat au poste de professeur des universités à pourvoir au sein de l'université de Bordeaux aux termes d'un avis publié sur l'application Galaxie sous la référence PR - 550. Par délibération du 22 mai 2021, le comité de sélection a retenu la candidature de M. A... en le classant en deuxième position. Par une délibération du 8 juin 2021, le conseil académique de l'université de Bordeaux a validé la liste de candidats classés dans l'ordre de préférence retenu par le comité de sélection. Par délibération du 13 juillet 2021, le conseil national des universités a toutefois émis un avis défavorable à la nomination du candidat classé en première position par le comité de sélection. Par une délibération du 18 octobre 2021, le conseil d'administration de l'université de Bordeaux a supprimé le poste qui était à pourvoir puis, dans sa formation restreinte aux professeurs des universités, a tiré les conséquences de cette suppression en décidant de mettre fin au processus de recrutement en cours. M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution d'une part, de la décision du 15 novembre 2021 par laquelle la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation lui a fait savoir qu'il ne sera pas procédé à sa nomination sur le poste de professeur des universités ouvert au sein de l'université de Bordeaux, et d'autre part, des décisions des organes compétents de cette université ayant conduit à la suppression du poste concerné et à mettre fin au processus de recrutement.
4. L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit, enfin, être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, à la date à laquelle le juge des référés statue.
5. Dans le cadre du concours de recrutement mentionné au point 3, M. A..., maître de conférences en droit public à l'université d'Artois, a été classé en deuxième position et avait donc vocation, eu égard à l'avis défavorable rendu par le conseil national des universités sur le profil du candidat classé en premier, à être nommé professeur des universités si la procédure de recrutement n'avait pas été interrompue par les décisions contestées. Toutefois, en premier lieu, la seule circonstance que les décisions prises par l'université de Bordeaux et par la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation fassent obstacle à sa nomination et au changement de responsabilités qui en découlerait ne suffit pas à caractériser une atteinte grave et immédiate à sa situation personnelle. En second lieu, si M. A... soutient qu'il existe un risque important de recours contentieux similaires aux siens, en lien avec un projet de modification du décret du 6 juin 1984 portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences destiné à permettre aux universités d'émettre un avis défavorable motivé après l'avis du conseil national des universités sur la liste des candidats classés par les comités de sélection, il ressort des débats au cours de l'audience publique que ce projet de texte se situe dans une phase préliminaire d'élaboration et n'a pas encore été soumis pour avis au comité technique paritaire du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que les décisions attaquées porteraient à l'intérêt public tenant au bon fonctionnement de l'université une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une situation d'urgence justifiant leur suspension.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin, d'une part, de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée en défense par la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sous le n° 459549 et, d'autre part, d'examiner s'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées, les requêtes de M. A... doivent être rejetées, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : Les requêtes de M. A... sont rejetées.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A..., à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et à l'université de Bordeaux.
Fait à Paris, le 18 janvier 2022
Signé : Benoît Bohnert