Vu la procédure suivante :
La société Une pièce en plus a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, d'ordonner à la maire de Paris de prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer et maintenir l'accessibilité du site Une Pièce en Plus situe´ 3, rue de Dunkerque à Paris (10ème arrondissement), tant par les piétons que par les véhicules automobiles, pendant toute la durée des travaux de voirie prévus au niveau de la rue Dunkerque et de ses environs et, d'autre part, décider que l'ordonnance sera exécutoire dès qu'elle sera rendue sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-13 du code de justice administrative.
Par une ordonnance n° 2107900 du 16 avril 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 et 26 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Une Pièce en Plus demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'enjoindre a` la Ville de Paris de suspendre l'exécution des travaux de voirie tant que leur exécution ne permettra pas un accès à tout véhicule motorisé au site de la société Une Pièce en Plus et, le cas échéant, de rétablir cet accès dans un délai de 24 heures sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance de première instance est entachée d'irrégularité dès lors qu'en ne l'invitant pas à fournir durant l'instruction les éléments supplémentaires sur les conséquences financières de la fermeture de son établissement pendant la durée des travaux, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a méconnu son office ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, la réalisation de travaux de voirie dans la rue de Dunkerque du 19 avril au 12 août 2021 menace son équilibre financier en ce que, d'une part, elle fait obstacle à tout accès en véhicule à l'immeuble situé au n° 3 de cette rue ce qui l'empêche d'exercer son activité pendant toute la période de travaux et, d'autre part, elle la conduit à supporter non seulement d'importantes pertes liées à l'impossibilité d'exploiter son établissement, alors même qu'elle se trouve en début d'activité et a investi d'importantes sommes, mais aussi ses charges fixes de fonctionnement, en deuxième lieu, ces déconvenues sont de nature à la discréditer au regard de sa clientèle et préjudicie à son image en ce qu'elle se retrouve dans l'impossibilité de respecter ses engagements et, en dernier lieu, il ressort des plans fournis par la ville de Paris qu'a` compter du 21 avril et jusqu'au 9 juin, la rue de Dunkerque sera condamnée dans sa partie Est, de sorte qu'aucun véhicule ne pourra accéder a` cette partie de la rue, pas même les engins de lutte contre l'incendie et de secours ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit de propriété, au droit d'usage du bien qu'elle loue, ainsi qu'à la liberté d'entreprendre et la liberté du commerce et de l'industrie ;
- la décision contestée est entachée d'erreur de droit dès lors que les éléments relatifs au nombre de boxes loués sont inopérants en ce que la société Une Pièce en Plus n'est pas en mesure de remplir ses obligations contractuelles vis-à-vis de ses clients et ne peut donc pas facturer de prestations faute de pouvoir mettre les boxes a` disposition effective et de permettre aux locataires de s'y rendre pour y stocker leurs biens ou aller les récupérer.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2021, la ville de Paris conclut au rejet de la requête et demande au juge des référés du Conseil d'Etat de mettre à la charge de la société Une Pièce en Plus la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et qu'il n'est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été informées, sur le fondement de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions administratives, de ce qu'aucune audience ne se tiendrait et de ce que la clôture de l'instruction serait fixée le 27 avril 2021 à 12 heures.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".
2. Il résulte de l'instruction que, pour l'exécution de travaux d'aménagement du quartier parisien des gares du Nord et de l'Est, la Ville de Paris a prévu des interdictions ou des restrictions de circulation automobiles dans la portion de la rue de Dunkerque située entre la rue la Fayette et la rue d'Alsace. Ces mesures ont pour effet d'interdire l'accès en véhicule automobile du 21 avril au 12 août 2021 au 3 rue de Dunkerque, où la société " Une pièce en plus " (UPP), laquelle a pour activité la location d'espaces de stockage de biens pour les particuliers et les professionnels, a loué des locaux qu'elle a ouverts à compter du 1er avril 2021.
3. Par une ordonnance du 19 avril 2021, dont la société UPP relève appel, le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L.521-2 du code de justice administrative a rejeté la demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la maire de Paris de prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer et maintenir l'accessibilité à son site.
4. Il résulte de l'instruction que si la société soutient n'avoir été officiellement prévenue des mesures litigieuses que le 6 avril 2021 et si les informations publiques sur l'aménagement du quartier des deux gares, délivrées en mars 2018 et septembre 2019 n'ont pas donné de précisions sur la possibilité de circuler en véhicule dans la portion de la rue de Dunkerque où se trouve cet établissement pendant la période d'aménagement, la société, qui a sollicité et obtenu des autorisations d'occupation privative du domaine public pour effectuer les travaux nécessaires à l'activité projetée, ne pouvait ignorer que des travaux, susceptibles de perturber son activité, affecteraient cette rue, au demeurant transformée provisoirement en voie piétonne par un arrêté municipal du 24 décembre 2020.
5. Par suite, alors en outre, d'une part, que la société, qui exploite 29 centres en Ile de France, dont 9 à Paris, et qui ne produit que quelques contrats de stockage rue de Dunkerque, dont certains ont d'ailleurs été conclus après le 6 avril, ne fait pas état de ce que les restrictions d'accès à ce site mettraient en péril son activité, d'autre part, que le caractère d'intérêt général des travaux d'aménagement du quartier n'est pas sérieusement discuté, il n'apparaît pas que ces restrictions constituent des atteintes graves et manifestement illégales au droit de propriété, au droit d'usage, à la liberté du commerce et de l'industrie ou la liberté d'entreprendre justifiant que le juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, intervienne pour enjoindre à l'administration de prendre les mesures sollicitées.
6. Il résulte de ce qui précède que la société UPP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société UPP la somme de 3 000 euros que demande la Ville de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la société Une pièce en Plus est rejetée.
Article 2 : La société Une pièce en Plus versera la somme de 3 000 euros à la Ville de Paris au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Une Pièce en Plus et à la Ville de Paris.