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16/02/2021 | FRANCE | N°449135

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 16 février 2021, 449135


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 27 janvier et le 15 février 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens (SNEC-CFTC) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de la décision implicite par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a rejeté la demande du SNEC-CFTC,

adressée le 1er octobre 2020 et reçue le 5 octobre 2020, tendant à ce que so...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 27 janvier et le 15 février 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens (SNEC-CFTC) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de la décision implicite par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a rejeté la demande du SNEC-CFTC, adressée le 1er octobre 2020 et reçue le 5 octobre 2020, tendant à ce que soient prises les mesures d'application qu'implique nécessairement le décret du 31 juillet 2015 relatif aux maîtres délégués des établissements d'enseignement privés sous contrat d'association du 1er degré en tant qu'il les rend éligibles à l'avancement au choix ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports de prendre les mesures nécessaires à ce que, à l'occasion de la campagne d'avancement 2020-2021, le droit des maîtres délégués à bénéficier d'un avancement au choix soit respecté, dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports de reconstituer les tableaux d'avancement, avec effet rétroactif et en prenant en compte l'avancement au choix des maîtres délégués au titre des années 2017-2018, 2018-2019 et 2019-2020 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée relève en premier et dernier ressort de la compétence du Conseil d'Etat ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors, en premier lieu, que le refus de prendre les mesures d'exécution du décret du 31 juillet 2015 nécessaires paralyse la carrière et affecte les conditions de travail de tous les maîtres délégués des établissements d'enseignement privés du 1er degré sous contrat d'association, en deuxième lieu, qu'il ne reste que cinq mois pour prendre les mesures permettant que la campagne d'avancement pour l'année 2020-2021 soit conduite dans le respect du droit et, en dernier lieu, que l'inertie du ministère de l'éducation nationale est illégale eu égard au délai qui s'est écoulé, qui révèle de façon certaine un refus de prendre les mesures d'application nécessaires ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- cette décision méconnaît les dispositions du décret du 21 juillet 2015 ;

- cette décision est entachée d'illégalité dès lors que le délai raisonnable pour prendre les mesures d'application de ce décret est largement expiré, sans que le ministère de l'éducation nationale puisse à cet égard se prévaloir, d'une part, de l'absence de note pédagogique, compte tenu de la jurisprudence du Conseil d'Etat, d'autre part, de l'existence de difficultés techniques.

Par un mémoire en défense et un nouveau mémoire, enregistrés les 11 et 15 février 2021, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, et qu'aucun moyen invoqué n'est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le décret n° 62-319 du 3 avril 1962 ;

- le décret n° 2015-963 du 31 juillet 2015 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens et, d'autre part, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 12 février 2021, à 11 heures :

- Me Poupet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens ;

- les représentants du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a reporté la clôture de l'instruction au 15 février 2021 à 18 heures.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Aux termes du second alinéa du V de l'article R. 914-57 du code de l'éducation, dans sa rédaction résultant du décret du 31 juillet 2015 susvisé : " L'avancement des maîtres délégués s'effectue dans les conditions prévues pour les maîtres auxiliaires. ". Aux termes, par ailleurs, de l'article 4 du décret du 3 avril 1962 susvisé, qui régit les conditions d'avancement des maîtres auxiliaires : " Les échelles de rémunération de chacune des quatre catégories comportent huit échelons. / Peuvent bénéficier d'une promotion d'échelon les agents qui justifient d'une durée de service minimum dans leur échelon égale à trois ans pour les trois premiers échelons et quatre ans pour les autres échelons. / Cette durée peut être réduite, compte tenu des mérites professionnels des intéressés et dans la limite de vingt pour cent du nombre des promouvables, de six mois dans les trois premiers échelons et d'un an dans les autres échelons. / Les promotions d'échelon prennent effet du premier jour du mois qui suit la date à laquelle les intéressés réunissent les conditions d'ancienneté définies ci-dessus. ". Il résulte de ces dispositions combinées que les maîtres délégués de l'enseignement privé sous contrat d'association sont susceptibles de bénéficier, dans le cadre de l'avancement au choix, d'une bonification d'ancienneté comprise entre six mois et un an lorsqu'ils réunissent les conditions d'ancienneté requises par ces mêmes dispositions.

3. Par un courrier en date du 1er octobre 2020, le Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens (SNEC-CFTC), après avoir fait valoir que les dispositions du décret du 31 juillet 2015 susvisé ouvrant le bénéfice de l'avancement au choix aux maîtres délégués auraient dû recevoir application dès l'année 2017-2018 et qu'aucune campagne d'avancement au choix n'a pourtant été organisée depuis lors, a demandé au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports de prendre les dispositions de nature à rendre effective la possibilité d'avancement au choix prévue par ce décret. Le SNEC-CFTC demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse du ministre à ce courrier et de lui enjoindre, d'une part, de prendre les mesures qu'implique l'exécution du décret du 31 juillet 2015 en tant qu'il ouvre le bénéfice de l'avancement au choix aux maîtres délégués, d'autre part, de reconstituer, avec effet rétroactif, les tableaux d'avancement depuis l'année 2017-2018 en y intégrant les avancements au choix qui auraient dû intervenir.

4. En premier lieu, si le syndicat requérant soutient qu'il incombe au ministre de prendre des mesures réglementaires d'application de l'article premier du décret du 31 juillet 2015 qui a ouvert le bénéfice de l'avancement au choix aux maîtres délégués, dès lors qu'en l'absence de telles mesures celui-ci ne peut, selon lui, être mis en oeuvre concrètement, il ne ressort pas des dispositions de ce texte qu'il ne puisse être appliqué en l'état et qu'il appartiendrait, en conséquence, au ministre de proposer que soit pris un décret complémentaire qui en préciserait les modalités. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus de prendre un tel texte serait illégal n'est pas, dans l'état actuel de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.

5. En second lieu, le syndicat requérant fait valoir qu'il appartient au ministre, chargé de l'exécution du décret du 31 juillet 2015 susvisé en vertu de l'article 11 de ce texte, de prendre une instruction enjoignant à ses services de mettre en oeuvre l'avancement au choix des maîtres délégués qu'il prévoit.

6. Toutefois, d'une part, il résulte des dispositions combinées des articles R. 914-1, R. 914-57 et R. 914-60 du code de l'éducation que les décisions relatives à l'avancement des maîtres délégués relèvent de la compétence des recteurs, auxquels il incombe, en conséquence, de faire application des dispositions relatives à l'avancement au choix des maîtres délégués des établissements d'enseignement privé sous contrat d'association. D'autre part, s'il est loisible à une autorité publique de prendre des circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif visant à faire connaître l'interprétation qu'elle retient de l'état du droit, elle n'est jamais tenue de le faire. En conséquence, le moyen tiré de ce que le refus du ministre, résultant implicitement de l'absence de réponse au courrier du syndicat requérant, de prendre une instruction rappelant aux recteurs les dispositions rendant les maîtres délégués éligibles à l'avancement au choix, serait entaché d'illégalité n'est pas, dans l'état actuel de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision de refus. Au surplus, il résulte de l'instruction que le ministre a déjà pris une circulaire, portant le numéro 2015-184, en date du 2 novembre 2015 et adressée aux recteurs, qui détaille à son point 3 les modalités de l'avancement au choix dont peuvent bénéficier les maîtres délégués des établissements d'enseignement privé sous contrat d'association.

7. Il résulte de ce qui précède que la requête du Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens doit, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition tenant à l'urgence, être rejetée, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête du Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Syndicat National de l'Enseignement Chrétien - Confédération des Travailleurs Chrétiens et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 449135
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 fév. 2021, n° 449135
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP DE NERVO, POUPET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:449135.20210216
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