La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/12/2020 | FRANCE | N°447435

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 23 décembre 2020, 447435


Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 10 et 17 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 2 novembre 2020 de la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) qui lui a interdit, pendant une durée de quatre ans :

- de participer directement ou indirectement à l'org

anisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une r...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 10 et 17 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 2 novembre 2020 de la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) qui lui a interdit, pendant une durée de quatre ans :

- de participer directement ou indirectement à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, et des manifestations sportives autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée ou par une ligue sportive professionnelle ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou une ligue professionnelle ou l'un des membres de celles-ci ;

- de prendre part à toute autre activité organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leurs membres, ou le comité national olympique et sportif français, ainsi qu'aux activités sportives impliquant des sportifs de niveau national ou international et financées par une personne publique, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes ayant pour objet la prévention du dopage ;

- d'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 du code du sport ainsi que toute fonction d'encadrement ou toute activité administrative au sein d'une fédération agréée ou d'une ligue professionnelle ou d'un de leurs membres ;

Cette même décision a par ailleurs déduit de la durée d'interdiction la période pendant laquelle avait produit effet la décision de suspension provisoire prise à l'égard de Mme A... le 17 octobre 2019, demandé aux organisateurs compétents d'annuler les résultats qu'elle a obtenus le 30 juin 2019, à l'occasion de la manifestation de crossfit intitulée " French Throwdown 2019 ", ainsi qu'entre le 30 juin et le 21 octobre 2019,avec toutes conséquences en découlant, y compris le retrait de médailles, points, prix et gains, et, enfin, qu'elle prendrait effet à compter de la date de sa notification et qu'un résumé en serait publié sur le site internet de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

2°) de mettre à la charge de l'Agence française de lutte contre le dopage la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

-la condition d'urgence est satisfaite, la décision attaquée préjudiciant de manière grave et immédiate à sa situation en ce qu'elle l'empêche de participer à toute compétitions de culturisme, notamment le Crossfit Open 2021, ainsi que d'exercer sa profession d'entraîneur sportif qui est sa seule source de revenus, et en ce qu'elle porte atteinte à son image ainsi qu'à sa réputation ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ;

- la procédure disciplinaire est irrégulière en ce qu'il n'est pas démontré que tous les membres de la commission des sanctions auraient été convoqués dans les délais impartis et informés de l'ordre du jour, que l'audience a eu lieu par visioconférence alors qu'elle n'avait pas demandé la tenue de cette séance à distance et qu'elle n'a pu s'entretenir de manière effective et confidentielle avec son avocat durant l'audience et, enfin, qu'elle n'a pas été informée de la possibilité de solliciter l'analyse de l'échantillon B et de bénéficier de la procédure de composition administrative, faute d'avoir reçu notification des courriers correspondants ;

- les opérations de contrôle sont irrégulières en ce qu'elles ont été effectuées en dehors de la plage horaire couverte par l'ordre de mission délivré par l'Agence française de lutte contre le dopage, qu'il n'est pas établi que la personne chargée du contrôle était agréée et assermentée, que les prélèvements ont été effectués par un agent en formation, que le procès-verbal de contrôle du 30 juin 2019 ne comporte pas les mentions prévues par l'article R. 232-67-4 du code du sport et enfin, que le transport et le stockage des prélèvements n'ont pas été effectués avec toutes les garanties requises ;

- le résultat du contrôle ne peut s'expliquer que par le fait que les analyses ont été effectuées sur des prélèvements autres que le sien ;

- la sanction est disproportionnée en l'absence de précédent et eu égard à sa qualité de sportif amateur sans accompagnement notamment en ce qui concerne l'usage de produits pouvant contenir des substances dopantes, à la quantité infime de substance interdite retrouvée, à la démarche qu'elle a entreprise auprès l'antenne médicale régionale de prévention du dopage, et, enfin, aux conséquences professionnelles et financière de cette sanction ;

- la décision attaquée est intervenue au terme d'un délai excessif qui ne lui ait pas imputable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2020, l'Agence française de lutte contre le dopage conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et qu'aucun moyen de la requête n'est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée.

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme A..., et d'autre part, l'Agence française de lutte contre le dopage ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 17 décembre 2020, à 15 heures :

- Me Tapie, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme A... ;

- Me Poupot, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

- les représentants de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au 21 décembre à 12 heures.

Vu le nouveau mémoire, enregistré 21 décembre 2020, par lequel Mme A... maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 21 décembre 2020, par lesquels l'Agence française de lutte contre le dopage maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 décembre 2020, présentée par l'Agence française de lutte contre le dopage ;

Vu :

- le code du sport ;

- l'ordonnance n°2014-1329 du 6 novembre 2014 ;

- le décret n° 2018-1283 du 27 décembre 2018 ;

- le décret n°2020-1310 du 29 octobre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Mme A... a fait l'objet d'un contrôle antidopage, le 30 juin 2019, à l'occasion d'une manifestation de crossfit, intitulée " French Throwdown 2019 ". L'analyse effectuée a révélé la présence dans ses urines de LGD-4033 diOH, métabolite du LGD-4033 (ligandrol) figurant sur la liste des substances interdites en permanence, annexée au décret du 27 décembre 2018 portant publication de l'amendement à l'annexe I de la convention internationale contre le dopage dans le sport, adopté à Paris le 15 novembre 2018, qui la répertorie parmi les substances dites " non spécifiées ". Par décision du 2 novembre 2020, la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage a prononcé à l'encontre de Mme A... une sanction d'interdiction, pendant une durée de quatre ans, de participer directement ou indirectement à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, et des manifestations sportives autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée ou par une ligue sportive professionnelle ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou une ligue professionnelle ou l'un des membres de celles-ci, de prendre part à toute autre activité organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leurs membres, ou le comité national olympique et sportif français, ainsi qu'aux activités sportives impliquant des sportifs de niveau national ou international et financées par une personne publique, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes ayant pour objet la prévention du dopage et enfin, d'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 du code du sport ainsi que toute fonction d'encadrement ou toute activité administrative au sein d'une fédération agréée ou d'une ligue professionnelle ou d'un de leurs membres. Mme A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de cette décision.

Sur la régularité de la procédure disciplinaire :

3. En premier lieu, aucune disposition ni aucun principe n'impose que la décision de la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage mentionne les conditions de convocation de ses membres. Au demeurant, il résulte de l'instruction que les membres de la commission des sanctions ont été convoqués conformément aux exigences posées par les articles 2 et 4 du règlement intérieur de cette commission, le 27 octobre 2020, soit plus de cinq jours avant la séance du 2 novembre 2020, par un courrier électronique auquel était joint l'ordre du jour de la séance. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il ne ressort pas de la décision de sanction litigieuse que les membres de la commission auraient été régulièrement convoqués, dans les délais requis, et qu'ils auraient été informés de l'ordre du jour pour la séance au cours de laquelle le dossier de Mme A... a été examiné, ne peut être regardé comme propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.

4. En deuxième lieu, si l'article R. 232-95-1 du code du sport prévoit la possibilité pour la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage de mettre en place des moyens de conférence audiovisuelle à la demande des personnes à l'encontre desquelles une procédure disciplinaire est engagée, le président de cette commission peut par ailleurs décider d'organiser une délibération par visioconférence en application de l'article 2 de l'ordonnance du 6 novembre 2014 relative aux délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial. Ainsi, l'article 15-2 du règlement intérieur de la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage prévoit la possibilité de délibérer par visioconférence en cas d'urgence ou de nécessité absolue. A supposer que le recours à ce mode de délibération lors de la séance du 2 novembre 2020 au cours de laquelle le dossier de Mme A... a été examiné ne fût justifié ni par l'urgence ni par une nécessité absolue, la méconnaissance des dispositions de l'article 15-2 du règlement intérieur précité ne serait de nature à entacher d'illégalité la décision contestée que s'il résultait de l'instruction qu'un tel vice a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de cette décision ou qu'il a privé Mme A... d'une garantie. Si celle-ci conteste le principe du recours à la visioconférence et soutient avoir été privée, de ce fait, de la possibilité de communiquer de manière effective et confidentielle avec son avocat en méconnaissance des droits de la défense, il résulte de l'instruction que Mme A... n'a pas demandé la tenue d'une séance à laquelle elle aurait pu être présente physiquement, que la circonstance que son conseil n'a pas été à ses côtés résulte d'une décision de celui-ci alors même que le décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire autorisait les déplacements des particuliers pour se rendre chez un professionnel du droit et les avocats à se déplacer pour un motif professionnel, et, enfin, que Mme A... ou son conseil n'ont pas demandé à quitter provisoirement la visioconférence pour s'entretenir ensemble parallèlement. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que le recours à la visioconférence lors de la séance du 2 novembre 2020 n'a privé, en tout état de cause, la requérante d'aucune autre garantie et n'a pas eu d'incidence sur le sens de la décision de sanction contestée. Par suite, le moyen contestant le recours à la visio conférence ne peut être regardé comme propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.

5. En quatrième lieu, d'une part, il résulte de l'instruction que par un courrier recommandé avec demande d'avis de réception en date du 17 octobre 2019adressé à l'adresse communiquée par Mme A... lors de l'établissement du procès-verbal de contrôle du 30 juin 2019, l'Agence française de lutte contre le dopage a porté à la connaissance de celle-ci une copie du rapport d'analyse établi par le département des analyses et lui a indiqué qu'elle pouvait solliciter une analyse de contrôle sur le second échantillon, dit échantillon B. Ce courrier, qui a été retourné à l'agence le 18 novembre 2019 avec la mention " pli avisé et non réclamé " a été présenté le 21 octobre 2019. Mme A... doit par suite être regardée comme en ayant reçu notification à cette date. D'autre part, il résulte de l'instruction que par un courrier recommandé avec demande d'avis de réception en date du 18 décembre 2019adressé à la même adresse, l'agence a proposé à Mme A... d'entrer en voie de composition administrative. Ce courrier, qui a été retourné à l'agence le 8 janvier 2020 avec la mention " pli avisé et non réclamé " a été présenté le 21 décembre 2019. Mme A..., qui n'établit pas ne pas avoir disposé d'un délai de quinze jours pour retirer le pli en instance, doit être regardée comme en ayant reçu notification à cette date. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière faute pour Mme A... d'avoir pu demander une analyse de l'échantillon Bet d'avoir été informée de la procédure de composition administrative, ne peut être regardé comme propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.

Sur la régularité des opérations de contrôle et la matérialité des faits :

6. En premier lieu, si Mme A... soutient que les opérations de contrôle ont été réalisées après la plage horaire mentionnée sur l'ordre de mission établi par le directeur du département des contrôles de l'Agence française de lutte contre le dopage, il ressort, en tout état de cause, du procès-verbal de contrôle que Mme A... a été convoquée au poste de contrôle dans le créneau horaire indiqué.

7. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que le moyen soulevé par Mme A... tiré de ce que la personne chargée du contrôle antidopage n'était ni agréée ni assermentée manque en fait.

8. En troisième lieu, si Mme A... soutient que les opérations de contrôle auraient été irrégulières faute pour la personne chargée du contrôle d'avoir été du même sexe qu'elle en méconnaissance de l'article R. 232-53 du code du sport, il résulte de l'instruction que les prélèvements effectués sur la requérante ont été réalisés par un agent en formation de sexe féminin désigné pour assister, ainsi que le permet l'article R. 232-54 du même code, la personne chargée du contrôle, et à ce titre, autorisé à procéder aux prélèvements sous la responsabilité de celle-ci.

9. En quatrième lieu, Mme A... ne peut utilement se prévaloir de l'absence, sur le procès-verbal de contrôle, des mentions prévues par l'article R. 232-67-4 du code du sport dont les dispositions sont applicables en cas de prélèvements sanguins réalisés en vue de l'établissement du profil biologique institué par l'article L. 232-12-1 du même code, et non en cas de prélèvements destinés, comme en l'espèce, à la détection d'une substance ou d'une méthode interdite.

10. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que Mme A... n'a formulé, sur le procès-verbal de contrôle, aucune observation remettant en cause la régularité des opérations de prélèvement, que le laboratoire chargé des analyses n'a constaté aucune anomalie relative aux scellés et que la substance retrouvée dans les urines de Mme A... est une molécule de synthèse particulièrement stable. Par suite, les conditions et modalités d'acheminement des échantillons jusqu'au laboratoire sont sans incidence sur la présence de cette substance dans les prélèvements de la requérante.

11. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 10 ci-dessus que le moyen tiré de ce que les opérations de contrôle se seraient déroulées de manière irrégulière ne peut être regardé comme propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision de sanction du 2 novembre 2020.

Sur la proportionnalité de la sanction :

12. Aux termes de l'article L. 232-9 du code du sport, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle a été effectué le contrôle antidopage auquel a été soumise Mme A... : " I. - Est interdite la présence, dans l'échantillon d'un sportif, des substances figurant sur la liste mentionnée au dernier alinéa du présent article, de leurs métabolites ou de leurs marqueurs. Il incombe à chaque sportif de s'assurer qu'aucune substance interdite ne pénètre dans son organisme./ L'infraction au présent I est établie par la présence, dans un échantillon fourni par le sportif, d'une substance interdite, de ses métabolites ou de ses marqueurs, sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'usage de cette substance a revêtu un caractère intentionnel./ Les interdictions prévues au présent article ne s'appliquent pas aux substances et méthodes pour lesquelles le sportif dispose d'une autorisation d'usage à des fins thérapeutiques./La liste des substances et méthodes mentionnées au présent article est celle qui est élaborée en application de la convention internationale mentionnée à l'article L. 230-2 ou de tout autre accord ultérieur qui aurait le même objet et qui s'y substituerait. Elle est publiée au Journal officiel de la République française ". Aux termes de l'article L. 232-23 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - La commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage peut prononcer à l'encontre des personnes ayant enfreint les dispositions des articles L. 232-9 (...) ; (...) 2° Une interdiction temporaire ou définitive :/ a) De participer directement ou indirectement à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, et des manifestations sportives autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée ou par une ligue sportive professionnelle ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou une ligue professionnelle ou l'un des membres de celles-ci ;/b) D'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 ;/c) D'exercer les fonctions de personnel d'encadrement ou toute activité administrative au sein d'une fédération agréée ou d'une ligue professionnelle, ou de l'un de leurs membres ;/ d) Et de prendre part à toute autre activité organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leurs membres, ou le comité national olympique et sportif français, ainsi qu'aux activités sportives impliquant des sportifs de niveau national ou international et financées par une personne publique, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes ayant pour objet la prévention du dopage ". Aux termes de l'article L. 232-23-3-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - La durée des mesures d'interdiction mentionnées au 2° du I de l'article L. 232-23 à raison d'un manquement à l'article L. 232-9 (...) :1° Est de quatre ans lorsque ce manquement implique une substance non spécifiée. Cette durée est ramenée à deux ans lorsque le sportif démontre qu'il n'a pas eu l'intention de commettre ce manquement ;(...)/II. - Les substances spécifiées et les substances non spécifiées mentionnées au I, dont la présence dans l'échantillon d'un sportif, l'usage ou la possession sont prohibés par l'article L. 232-9, sont celles qui figurent à l'annexe I à la convention internationale mentionnée à l'article L. 230-2 ". Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 232-23-3-10 du même code : " La durée des mesures d'interdiction prévues aux articles L. 232-23-3-3 à L. 232-23-3-8 peut être réduite par une décision spécialement motivée lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient au regard du principe de proportionnalité ".

13. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 232-9 du code du sport citées au point 12 ci-dessus qu'en dehors des cas où le sportif se prévaut d'une autorisation pour usage à des fins thérapeutiques ou fait état d'une raison médicale dûment justifiée, la violation de l'interdiction qu'elles posent est établie par la seule présence, dans un prélèvement urinaire ou sanguin, de l'une des substances figurant sur la liste publiée en annexe du décret du 27 décembre 2018cité au point 2 ci-dessus, sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'usage de cette substance a revêtu un caractère intentionnel.

14. Il n'est pas contesté que les analyses, effectuées le 3 octobre 2019 sur l'échantillon A des urines de Mme A..., à la suite du contrôle antidopage du 30 juin 2019, ont fait ressortir la présence de LGD-4033 diOH, métabolite du LGD-4033, qui est une substance dite " non spécifiée " interdite en compétition, référencée parmi les agents anabolisants de la classe S1 figurant sur la liste annexée au décret du 27 décembre 2018 citée au point 13 ci-dessus.

15. En second lieu, il résulte des dispositions combinées des articles L. 232-23 et L. 232-23-3-3 du code du sport citées au point 12 ci-dessus qu'un manquement aux règles antidopage sous forme de présence, dans l'échantillon d'un sportif, de substances interdites est sanctionné, s'agissant des substances qualifiées de " non spécifiées ", par une interdiction de participer aux manifestations sportives et d'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 du même code dont la durée est, en principe, de quatre ans ou de deux ans lorsque le sportif démontre qu'il n'a pas eu l'intention de le commettre. L'article L. 232-23-3-10 du même code permet de réduire ces durées de principe pour prendre en compte les circonstances propres à chaque espèce.

16. Il résulte de l'instruction que Mme A..., qui pratique le crossfit en amateur, à un haut niveau, n'apporte aucune explication utile sur les raisons susceptibles d'expliquer la présence d'un anabolisant de nouvelle génération dans ses urines ni ne fait état de circonstances particulières permettant de regarder, dans les circonstances de l'espèce, la sanction prononcée à son encontre comme disproportionnée. En particulier, si Mme A... soutient que la quantité de substance prohibée est très faible et que sa présence ne pourrait provenir que d'une ingestion involontaire résultant de l'absorption d'un complément alimentaire pour soulager des douleurs articulaires et tendineuses, elle n'apporte pas d'élément permettant d'établir la présence de cette substance dans le complément alimentaire qu'elle allègue avoir absorbé. Par ailleurs, si elle soutient que la sanction prononcée lui interdit d'exercer sa profession d'entraîneur sportif, la protection des pratiquants d'une activité physique ou sportive contre le dopage est de nature à justifier qu'un sportif sanctionné pour dopage ne puisse, pendant la durée de l'interdiction, enseigner, animer ou encadrer cette activité physique ou sportive ou entraîner ses pratiquants. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission des sanctions aurait prononcé une sanction disproportionnée n'est pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée.

Sur la date d'effet de la sanction :

17. Aux termes de l'article L. 232-23-3-11 du code du sport, dans sa rédaction applicable au litige : " La mesure d'interdiction prévue au 2° du I de l'article L. 232-23 prend effet à la date de la notification de la décision de la commission des sanctions (...)./ Cette mesure peut toutefois prendre effet à une date antérieure à celle de la notification de la décision de la commission des sanctions (...), pouvant aller jusqu'à la date du contrôle antidopage (...), lorsque la procédure disciplinaire dont fait l'objet l'intéressé est affectée d'un retard non imputable à ce dernier qui conduit à l'adoption d'une décision dans un délai déraisonnable (...) ".

18. Il résulte de l'instruction que l'Agence française de lutte contre le dopage a informé Mme A... le 17 octobre 2019 des résultats de ses analyses délivrés le 3 octobre 2019, lui a proposé d'entrer en voie de composition administrative le 18 décembre 2019 et l'a convoquée le 21 février 2020 pour se présenter devant la commission des sanctions le 23 mars 2020. Mme A... a demandé le 9 mars 2020 un report d'audience qui, compte tenu du contexte sanitaire et afin de permettre à l'intéressée d'obtenir le résultat de ses démarches auprès de La Poste, s'est finalement tenue le 2 novembre 2020, la procédure diligentée auprès des services postaux ayant été achevée le 1er septembre 2020. Dans ces conditions, la décision contestée n'a pas été prise dans un délai déraisonnable. Par suite, le moyen tiré de ce que c'est à tort que la commission des sanctions n'a pas fait bénéficier Mme A... des dispositions de l'article L. 232-23-3-11 du code du sport cité au point 17 ci-dessus n'est pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée.

19. Il résulte de tout de qui précède qu'aucun des moyens soulevés par Mme A... n'étant manifestement, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision litigieuse, il y a lieu, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'urgence, de rejeter sa requête, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par l'Agence française de lutte contre le dopage.

O R D O N N E :

------------------

Article 1er: La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par l'Agence française de lutte contre le dopage sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A... et à l'Agence française de lutte contre le dopage.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 447435
Date de la décision : 23/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 2020, n° 447435
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP ROUSSEAU, TAPIE ; SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:447435.20201223
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award