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23/11/2020 | FRANCE | N°446059

France | France, Conseil d'État, 23 novembre 2020, 446059


Vu la procédure suivante :

Mme E... A..., M. F... A..., Mme C... A... et Mme D... B... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, d'ordonner au département des Bouches-du-Rhône de cesser ou faire cesser immédiatement les travaux, intrusions et tous actes sur les parcelles cadastrées KM n° 165, KM n° 120, KM n° 122 et IV 8 appartenant aux requérants, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, jusqu'à parfait paiement des indemnités d'

expropriation et jusqu'à la régularisation de l'arrêté de cessibilité...

Vu la procédure suivante :

Mme E... A..., M. F... A..., Mme C... A... et Mme D... B... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, d'ordonner au département des Bouches-du-Rhône de cesser ou faire cesser immédiatement les travaux, intrusions et tous actes sur les parcelles cadastrées KM n° 165, KM n° 120, KM n° 122 et IV 8 appartenant aux requérants, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, jusqu'à parfait paiement des indemnités d'expropriation et jusqu'à la régularisation de l'arrêté de cessibilité par l'établissement d'un document d'arpentage permettant de délimiter les emprises expropriées, en deuxième lieu, d'ordonner au département des Bouches-du-Rhône de cesser ou faire cesser immédiatement les travaux et intrusions à quelque titre que ce soit sur le chemin de la propriété Loqui appartenant aux requérants, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et, en dernier lieu, de condamner le département des Bouches-du-Rhône à verser aux requérants la somme de 2 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation des préjudices subis du fait de la dégradation de leur propriété. Par une ordonnance n° 2007641 du 23 octobre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les consorts A... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 23 octobre 2020 ;

2°) de faire droit à leur demande de première instance ;

3°) d'enjoindre au département des Bouches-du-Rhône d'interrompre sans délai les travaux sur leur propriété, ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les requérants soutiennent que :

- l'ordonnance contestée est insuffisamment motivée faute pour le juge des référés de s'être prononcé sur le moyen tiré par eux de la méconnaissance de leur droit de propriété résultant de l'occupation irrégulière de terrains leur appartenant et de l'intégration du chemin d'accès à leur propriété aux travaux exécutés par le département des Bouches-du-Rhône ;

- elle est entachée d'erreur de droit et de dénaturation des pièces du dossier dès lors que, pour conclure que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, le juge des référés, d'une part, s'est fondé sur le temps mis par les requérants pour le saisir sans rechercher si la situation dont il était effectivement saisi présentait un caractère d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, et, d'autre part, s'est fondé sur la seule allégation de la partie défenderesse selon laquelle l'interruption des travaux litigieux avait été demandée aux entreprises intervenantes le 1er septembre 2020, sans s'assurer, qu'à la date où il statuait, les travaux étaient effectivement interrompus ou n'avaient pas été repris ;

- elle est également entachée d'erreur de droit et de dénaturation des pièces du dossier dès lors que le juge des référés de première instance a considéré, pour refuser de saisir le juge judiciaire afin de déterminer la propriété de l'assiette du chemin de Loqui, qu'il revenait aux requérants de procéder eux-mêmes à cette saisine, alors que leur propriété est établie par un jugement d'adjudication transcrit à la conservation des hypothèques daté du 9 mai 1919 et, sinon, par prescription trentenaire ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que les travaux sont toujours en cours d'exécution, un constat d'huissier daté du 13 octobre 2020 l'attestant ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à leur droit de propriété.

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. " En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Il résulte de l'instruction menée devant le premier juge que les consorts A... sont propriétaires d'un ensemble immobilier comprenant notamment deux parcelles anciennement cadastrées KM 120 et KM 165, séparées par un chemin dit " chemin de Loqui ", riveraines de la route départementale 18 dont l'élargissement au droit de cette propriété a été déclaré d'utilité publique par arrêté préfectoral du 4 août 2006. Les terrains concernés, comprenant une partie des parcelles précédemment citées, ont été déclarés cessibles par arrêté préfectoral du 7 mai 2015. Une ordonnance d'expropriation a ensuite été rendue le 22 juin 2015. Alors que les travaux d'élargissement de la voie départementale étaient en cours, les requérants ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, le 7 octobre 2020, en vue de faire cesser, d'une part, les emprises irrégulières sur les parties non expropriées des parcelles leur appartenant et, d'autre part, l'incorporation dans les travaux d'une partie du chemin de Loqui dont ils soutiennent qu'il constitue un chemin privé leur appartenant et n'a pas été compris dans les terrains expropriés. Par une ordonnance du 23 octobre 2020, le juge des référés a rejeté leur demande. Les consorts A... relèvent appel de cette ordonnance devant le juge des référés du Conseil d'Etat.

3. D'une part, s'agissant de l'utilisation irrégulière, par les engins de chantier, des parcelles leur appartenant, cadastrées n°s KV 197 et KV 199, si les requérants produisent un constat d'huissier en date du 13 octobre 2020 qui relève des traces récentes laissées par le passage d'un engin de chantier se prolongeant jusque sur leur propriété, il ne résulte pas de l'instruction que les atteintes ainsi portées à leur droit de propriété présentent, s'agissant de terrains exempts de toute construction, non clôturés et dont les documents joints au dossier montrent qu'ils se présentent, dans les parties concernées par les faits allégués, à l'état d'herbages et de broussailles, un caractère de gravité justifiant que soit ordonnée, en référé, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, l'injonction sollicitée.

4. D'autre part, s'agissant de l'inclusion d'une partie du chemin d'accès à la propriété des requérants dans les travaux d'élargissement de la route départementale, et à supposer même que soit admis le caractère de chemin privé de cette voie, les requérants, qui n'allèguent pas que l'accès à leur propriété sera supprimé ou même restreint, n'établissent pas davantage que l'atteinte qui serait portée à leur droit de propriété présenterait un caractère de gravité justifiant que soit ordonnée, en référé, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, l'injonction sollicitée.

5. Il résulte de ce qui précède que les consorts A... ne sont pas fondés à se plaindre que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, qui a suffisamment répondu à l'argumentation dont il était saisi, a rejeté leur demande.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du département des Bouches-du-Rhône qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête des consorts A... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme E... A..., première requérante dénommée, et au département des Bouches-du-Rhône.

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 446059
Date de la décision : 23/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 nov. 2020, n° 446059
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP BOUTET-HOURDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:446059.20201123
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