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13/11/2020 | FRANCE | N°437859

France | France, Conseil d'État, 13 novembre 2020, 437859


Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 437859, par une requête, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 janvier, 16 avril et 28 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2019-1227 du 26 décembre 2019 relatif aux règles de gestion des directeurs généraux agents publics des établissements publics du réseau des chambres de commerce et d'industrie ;

2°)

de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 ...

Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 437859, par une requête, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 janvier, 16 avril et 28 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2019-1227 du 26 décembre 2019 relatif aux règles de gestion des directeurs généraux agents publics des établissements publics du réseau des chambres de commerce et d'industrie ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 437862, par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 22 janvier, 31 mars et 18 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la charte sociale européenne ;

- les conventions n°s 98 et 158 de l'Organisation internationale du travail du 1er juillet 1949 sur le droit d'organisation et de négociation collective ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive n° 2002/14/CE du 11 mars 2002 ;

- le code de commerce ;

- le code du travail ;

- la décision du 27 mai 2020 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par l'association des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie et par le syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 octobre 2020, présentée par le syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 octobre 2020, présentée par l'association des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même décret relatif aux règles de gestion des directeurs généraux agents publics des établissements publics du réseau des chambres de commerce et d'industrie. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Aux termes de l'article L. 711-16 du code de commerce : " CCI France assure l'animation de l'ensemble du réseau des chambres de commerce et d'industrie. / A ce titre : (...) 6° (...) / Elle détermine les conditions de recrutement et de rémunération des directeurs généraux sous contrat de droit privé, la procédure et les conditions de cessation de leurs fonctions ainsi que les modalités de leur indemnisation en cas de rupture de la relation de travail. Pour les directeurs généraux qui ont la qualité d'agent public, ces mêmes règles sont fixées par décret pris après avis de CCI France (...) ".

3. En premier lieu, les dispositions du décret attaqué concernent les directeurs généraux agents publics des établissements publics du réseau des chambres de commerce et d'industrie, qui n'ont pas la qualité de fonctionnaires. Les dispositions de l'article 34 de la Constitution, qui réservent à la loi la fixation des règles concernant les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l'Etat, ne peuvent par suite être utilement invoquées, et le moyen tiré de ce que le pourvoi règlementaire serait pour ce motif incompétent pour édicter le décret ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, dès lors que le décret attaqué ne concerne pas la détermination collective des conditions de travail, le huitième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ne peut être utilement invoqué à son encontre. En outre, aucune convention internationale, aucun texte de droit interne, ni aucun principe n'imposaient la consultation des représentants des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie sur l'élaboration des règles qu'il comporte.

5. En troisième lieu, les éléments invoqués par les requérants en ce qui concerne les conditions de rémunération et de cessation de fonction des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie ayant la qualité d'agents publics ne caractérisent aucune discrimination par rapport aux autres agents publics des chambres de commerce et d'industrie, ni aucune atteinte au principe d'égalité au regard de la situation des directeurs généraux sous contrat de droit privé.

6. En quatrième lieu, l'article 2 du décret attaqué dispose qu'il n'est applicable qu'aux procédures de nomination et de cessation de fonctions engagées après son entrée en vigueur. En outre, les agents publics étant placés vis-à-vis de leur administration dans une situation légale et réglementaire, les modifications apportées aux règles qui régissent leur emploi leur sont, en principe, et sauf dispositions contraires, immédiatement applicables. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du décret attaqué porteraient atteinte au principe de sécurité juridique et aux contrats en cours ne peut qu'être écarté.

7. En cinquième lieu, les dispositions du décret contesté, notamment celles du II et du 5° du IV de l'article D. 711-70-1 du code de commerce issues du décret attaqué, relatives respectivement à la fixation de la rémunération des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie ayant la qualité d'agents publics et au licenciement de ceux-ci, ne présentent aucune difficulté particulière d'interprétation et ne méconnaissent, par suite et en tout état de cause, pas l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi.

8. En sixième lieu, les dispositions du III de l'article D. 711-70-1 du code de commerce issues du décret attaqué, qui ne fixent pas de limites à la durée horaire du travail des directeurs généraux de chambres de commerce et d'industrie ayant la qualité d'agents publics, ne portent atteinte à aucune garantie, compte tenu de l'indépendance dont les intéressés disposent, en tant que cadres dirigeants, dans l'organisation de leur emploi du temps.

9. En septième lieu, les dispositions issues du décret attaqué ne sauraient être regardées comme méconnaissant la liberté syndicale, aux seuls motifs qu'elles ne prévoiraient pas de protection particulière pour les directeurs généraux titulaires d'un mandat syndical et en ce qu'elles prévoient que l'association des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie désigne les représentants des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie au sein de la commission mixte de conciliation instituée par le décret.

10. En huitième lieu, aucun principe général du droit ne fait obstacle à ce que l'indemnité de licenciement d'un directeur général de chambre de commerce et d'industrie puisse être réduite dans le cas où le licenciement est motivé par une insuffisance professionnelle ou par un comportement faisant obstacle au bon accomplissement de sa tâche.

11. En neuvième lieu, les dispositions du 6° du IV de l'article D. 711-70-1 du code de commerce, issues du décret attaqué, aux termes desquelles la suspension d'un agent contre lequel une procédure de révocation est engagée entraîne la suspension de l'intégralité du traitement, ne méconnaissent aucun principe général du droit ni aucune disposition législative applicable aux directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie ayant la qualité d'agents publics. Le moyen tiré de ce que les intéressés ne bénéficieraient dans ce cas d'aucune des garanties de la procédure disciplinaire manque en fait.

12. En dernier lieu, les dispositions du VI de l'article de l'article D. 711-70-1 du code de commerce, issues du décret attaqué, ne sauraient être regardées comme méconnaissant les dispositions de l'article 4 de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002, qui prévoient l'information et la consultation des travailleurs sur les décisions susceptibles d'entraîner des modifications importantes dans l'organisation du travail ou dans les contrats de travail, au seul motif qu'elles n'instituent aucune procédure de consultation des représentants des directeurs généraux en cas de suppression d'un poste.

13. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre, que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret attaqué. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de l'association des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie et du syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association des directeurs généraux des chambres de commerce et d'industrie, au syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie, au Premier ministre et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 13 nov. 2020, n° 437859
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil

Origine de la décision
Date de la décision : 13/11/2020
Date de l'import : 14/10/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 437859
Numéro NOR : CETATEXT000042520644 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2020-11-13;437859 ?
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