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22/11/2019 | FRANCE | N°432648

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 22 novembre 2019, 432648


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 juillet et 4 novembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association APF France handicap demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le paragraphe n° 385 des commentaires administratifs publiés le 15 mai 2019 au bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-20 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.<

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Vu les autres pièces du dossier ;

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- la Constitution ;

- la directive 20...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 juillet et 4 novembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association APF France handicap demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le paragraphe n° 385 des commentaires administratifs publiés le 15 mai 2019 au bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-20 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des impôts ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- l'arrêt n° C-434/05 du 14 juin 2007 de la Cour de justice des Communautés européennes ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. A... de la Taille Lolainville, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 1° de l'article L. 7232-6 du code du travail mentionne, au nombre des modalités selon lesquelles il est loisible notamment aux personnes morales d'exercer des activités de services à la personne, " le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs ainsi que, pour le compte de ces dernières, l'accomplissement des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi de ces travailleurs ". Eu égard à ses écritures, l'association APF France handicap doit être regardée comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir du troisième alinéa du paragraphe n° 385 des commentaires administratifs publiés le 15 mai 2019 au bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) - impôts sous la référence BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-20 qui énonce que, afin de bénéficier de l'exonération prévue au 1° ter du 7 de l'article 261 du code général des impôts, les associations doivent satisfaire en particulier à la condition d'" assurer leur activité dans les conditions prévues aux 2° et 3° de l'article L. 7232-6 du code du travail " et précise que " les associations réalisant leur activité en application du 1° de l'article L. 7232-6 du code du travail ne sont pas éligibles à l'exonération prévue au 1° ter du 7 de l'article 261 du CGI ".

2. Pour intervenir au soutien des conclusions de l'association APF France handicap, l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux et l'Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles justifient d'un intérêt suffisant en considération de la nature et de l'objet du litige. Par suite, leurs interventions sont recevables.

3. En premier lieu, il ressort des mentions de la mise à jour du BOFiP - Impôts intitulée " TVA - recentrage de l'exonération des opérations effectuées par les associations autorisées ou agréées (CGI, art. 261, 7-1° ter ; loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, art. 71) ", publiée le 15 mai 2019 et accessible sur le site internet du BOFiP, que le moyen tiré de ce que l'instruction administrative en litige ne serait pas revêtue des nom, prénom, qualité et signature de son auteur manque en fait.

4. En second lieu, aux termes de l'article 132 de la directive du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les Etats membres exonèrent les opérations suivantes : / (...) g) les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à l'aide et à la sécurité sociales, y compris celles fournies par les maisons de retraite, effectuées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'État membre concerné ; / h) les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à la protection de l'enfance et de la jeunesse, effectuées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'État membre concerné (...) ". Il résulte de ces dispositions, éclairées en particulier par l'arrêt n° C-434/05 du 14 juin 2007 de la Cour de justice des Communautés européennes, qu'une prestation de services accessoire étroitement liée à l'aide et la sécurité sociales ou à la protection de l'enfance et de la jeunesse peut elle-même être exonérée de taxe sur la valeur ajoutée à la condition que, notamment, prestations principale et accessoire soient, l'une comme l'autre, réalisées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'Etat membre concerné.

5. Aux termes du 1° ter du 7 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 71 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 : " Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) Les prestations de services mentionnées au D de l'article 278-0 bis et au i de l'article 279, réalisées par des associations agréées en application de l'article L. 7232-1 du code du travail ou autorisées en application de l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles, et dont la gestion est désintéressée au sens du d du 1° du présent 7, au profit des personnes physiques ou des familles mentionnées aux 1°, 6°, 7° et 16° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, ainsi qu'au profit des personnes mentionnées au 1° de l'article L. 7232-1 du code du travail ".

6. D'une part, parmi les prestations de services d'aide à la personne exonérées par ces dispositions et qui, mentionnées au D de l'article 278-0 bis et au i de l'article 279 du code général des impôts, sont énumérées aux I et II de l'article 86 de l'annexe III à ce code, ne figure pas la prestation consistant à placer des travailleurs auprès de personnes physiques employeurs ainsi que, pour le compte de ces dernières, à accomplir des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi de ces travailleurs. D'autre part, interprétées à la lumière des g) et h) du 1 de l'article 132 de la directive du 28 novembre 2006, ces mêmes dispositions ne sauraient exonérer une prestation accessoire de placement de travailleur étroitement liée à une prestation principale d'aide à la personne lorsque cette dernière est exécutée par l'employé d'une personne physique, et que par conséquent, elle n'est pas elle-même le fait d'une association agréée en application de l'article L. 7232-1 du code du travail ou autorisée en application de l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles. Par suite, les prestations définies au 1° de l'article L. 7232-6 du code du travail ne sont pas éligibles à l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 1° ter du 7 de l'article 261 du code général des impôts. Dès lors, en se bornant à rappeler cette règle édictée par le législateur, les énonciations attaquées de l'instruction en litige n'en méconnaissent pas la portée, ne prévoient pas, dans le silence des textes, une règle nouvelle entachée d'incompétence, non plus qu'elles ne méconnaissent l'article 34 de la Constitution en vertu duquel la loi fixe les règles concernant notamment l'assiette des impositions de toute nature.

7. Il résulte de ce qui précède que l'association APF France handicap n'est pas fondée à demander l'annulation de l'instruction qu'elle attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les interventions de l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux et de l'Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles sont admises.

Article 2 : La requête de l'association APF France handicap est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association APF France handicap et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 432648
Date de la décision : 22/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 nov. 2019, n° 432648
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume de LA TAILLE LOLAINVILLE
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:432648.20191122
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