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11/04/2019 | FRANCE | N°406947

France | France, Conseil d'État, 6ème et 5ème chambres réunies, 11 avril 2019, 406947


Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision du 8 juin 2012 par laquelle le maire d'Urrugne (Pyrénées-atlantiques) a opposé un refus à leur demande de permis d'aménager en vue de la réalisation d'un lotissement de six lots sur le chemin d'Atexiloa et, d'autre part, la décision du 21 janvier 2013 par lequel le maire de la commune d'Urrugne a opposé un refus à leur demande de permis d'aménager en vue de la réalisation d'un lotissement de seize lots sur le chemin d'Atexiloa. Par

un jugement nos 1201347, 1300486 du 30 juin 2014, le tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision du 8 juin 2012 par laquelle le maire d'Urrugne (Pyrénées-atlantiques) a opposé un refus à leur demande de permis d'aménager en vue de la réalisation d'un lotissement de six lots sur le chemin d'Atexiloa et, d'autre part, la décision du 21 janvier 2013 par lequel le maire de la commune d'Urrugne a opposé un refus à leur demande de permis d'aménager en vue de la réalisation d'un lotissement de seize lots sur le chemin d'Atexiloa. Par un jugement nos 1201347, 1300486 du 30 juin 2014, le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du 8 juin 2012 et demandé à la commune de prendre, après une nouvelle instruction, une nouvelle décision sur la demande de permis d'aménager déposée le 14 mars 2012 et a rejeté la demande dirigée contre la décision du 21 janvier 2013.

Par un arrêt nos 14BX02570, 14BX02634 du 17 novembre 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appels de M. et Mme B...et de la commune d'Urrugne, d'une part, annulé ce jugement en tant qu'il avait annulé la décision du maire de la commune d'Urrugne du 8 juin 2012 et rejeté les demandes de M. et Mme A...tendant à l'annulation de cette décision et, d'autre part, rejeté l'appel de ces derniers dirigé contre le jugement en tant qu'il avait rejeté leur demande dirigée contre l'arrêté du 21 janvier 2013.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 janvier et 18 avril 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Urrugne la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, Robillot, avocat de M. et Mme B...et à la SCP Gaschignard, avocat de la commune d'Urrugne.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que par un arrêté du 8 juin 2012, le maire d'Urrugne a opposé un refus à la demande de permis d'aménager pour la création d'un lotissement de 6 lots sur le terrain de 4 hectares dont M. et Mme A...sont propriétaires. M. et Mme B...ont alors déposé une nouvelle demande de permis d'aménager pour la création sur le même terrain d'un lotissement de 16 lots, à laquelle le maire a opposé un refus par arrêté du 21 janvier 2013. Par un jugement en date du 30 juin 2014, le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 8 juin 2012 et rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 janvier 2013. Par un arrêt du 17 novembre 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur les appels de M. et Mme B...et de la commune d'Urrugne a, d'une part, annulé le jugement du 30 juin 2014 du tribunal administratif de Pau en tant qu'il avait annulé l'arrêté du maire d'Urrugne du 8 juin 2012 et rejeté la demande tendant à l'annulation de cet arrêté, d'autre part, rejeté la demande de M. et Mme A...tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif en tant qu'il a rejeté leur demande dirigée contre l'arrêté du 21 janvier 2013. M et Mme B...se pourvoient en cassation contre cet arrêt.

Sur l'arrêt en tant qu'il rejette les conclusions de M. et Mme B...dirigées contre l'arrêté du 21 janvier 2013 opposant un refus à leur demande de permis d'aménager en vue de la réalisation d'un lotissement de seize lots :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiquées s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Il ressort des pièces du dossier que si le second mémoire en défense présenté par la commune, enregistré le 29 septembre 2016, n'a pas été communiqué à M. et MmeB..., il ne contenait pas d'éléments nouveaux au sens de l'article R. 611-1 précité du code de justice administrative. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêt attaqué a été rendu au terme d'une procédure irrégulière en tant qu'il statue sur la requête d'appel de ces derniers doit être écarté.

3. En deuxième lieu, la cour a estimé que le classement du terrain de M. et Mme B...en zone 1AU par le plan local d'urbanisme de la commune n'était pas incompatible avec le régime d'urbanisation particulier au littoral résultant de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme alors en vigueur. S'il est soutenu que la cour a commis une erreur de droit en ne recherchant pas, par ailleurs, si le projet en cause était lui-même conforme à ce régime d'urbanisation, ce moyen, qui n'est pas d'ordre public, doit être écarté dès lors qu'il est nouveau en cassation.

4. En troisième lieu, en vertu de dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme alors en vigueur, désormais reprises à l'article L. 121-8 du même code : " L'extension de l'urbanisation doit se réaliser dans les communes littorales, soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ". Le règlement du plan local d'urbanisme de la commune applicable à la zone 1AU qui couvre le terrain d'assiette du projet permet une urbanisation " à l'occasion de la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction compatibles avec un aménagement cohérent de la zone dont les principes sont arrêtés dans le plan d'aménagement et de développement durable et le document d'orientations d'aménagement ", son article 1 AU 2 (2) autorisant : " a) les opérations d'ensemble (lotissements à usage d'habitation, ...), à condition qu'elles portent sur un nombre minimum de 6 lots (...), et sous réserve qu'elles respectent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone définies par le document d'orientations d'aménagement (...) ". Le document fixant les orientations d'aménagement du plan local d'urbanisme de la commune prévoit par ailleurs, pour le secteur de la route départementale n° 4, " la nécessité de maîtriser toutes les nouvelles constructions afin de limiter au maximum l'urbanisation déstructurée " et précise que la zone d'habitat individuel pourra " s'étendre sous la forme de hameaux permettant d'éviter la mosaïque décousue qui s'est créée ". Il en résulte que les dispositions du règlement de la zone 1 AU en cause n'ont pas pour objet de permettre la création de " hameaux nouveaux intégrés à l'environnement " au sens du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme mais d'en définir les modalités d'urbanisation future, et notamment de préciser les types d'opérations d'ensemble qui y sont admis. Dès lors, le moyen tiré de ce que la cour aurait dénaturé les faits en retenant que l'aménagement projeté ne pouvait " être rapproché de la notion de hameau intégré à l'environnement " doit être écarté comme inopérant.

5. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la cour a recherché, sans se limiter à l'assiette foncière du projet litigieux, si ce dernier répondait aux règles d'urbanisation du plan local d'urbanisme rappelées au point 4. Au vu de ces règles, elle n'a pas commis d'erreur de droit en se fondant sur la circonstance que le projet en cause ne procédait pas " d'une réflexion en rapport avec un aménagement cohérent de l'ensemble de la zone 1 AU ".

6. En cinquième lieu, en vertu de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme alors en vigueur, " Le règlement et ses documents graphiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, pour la création de lotissements et l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan. / Ces travaux ou opérations doivent en outre être compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement mentionnées à l'article L. 123-1-4 et avec leurs documents graphiques. "

7. Eu égard à la portée des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune applicables à la zone 1 AU citées au point 4, en particulier de l'article 1 AU 2 (2) autorisant certaines opérations d'ensemble telles les lotissements " sous réserve qu'elles respectent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone définies par le document d'orientations d'aménagement ", la cour n'a pas commis d'erreur de droit en recherchant si l'opération projetée répondait au principe d'un aménagement cohérent défini dans le document d'orientations d'aménagement.

8. En sixième lieu, la cour a relevé que les lots prévus par le projet étaient étirés en bande le long d'un chemin rural qui traverse un espace boisé classé que le lotissement ne présentait pas de cohérence avec la partie de la zone 1 AU située de l'autre côté du ruisseau qui la traverse et que le projet ne permettait pas de limiter l'urbanisation déstructurée de la zone. Ce faisant, la cour a porté sur les faits dont elle était saisie une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt en tant qu'il a rejette leur appel dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Pau en tant qu'il rejetait leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 janvier 2013.

Sur l'arrêt en tant qu'il rejette les conclusions de M. et Mme B...dirigées contre l'arrêté du 8 juin 2012 opposant un refus à leur demande de permis d'aménager en vue de la réalisation d'un lotissement de six lots :

10. En premier lieu, aux termes du 1er alinéa de l'article A. 424-1 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis (...) ". L'article A. 424-2 du même code, alors en vigueur, dispose que " L'arrêté prévu au premier alinéa de l'article A. 424-1 (...) / d) Vise les avis recueillis en cours d'instruction et leur sens ". La cour n'a cependant pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que l'arrêté du 8 juin 2012 ne vise pas les avis des services consultés par la commune est sans influence sur la régularité de la procédure, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est même pas allégué, que ces avis n'auraient pas été sollicités.

11. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'erreur de droit à avoir exigé du demandeur " une réflexion avec un aménagement cohérent de la zone 1 AU " doit être écarté dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 7, le règlement applicable dans cette zone autorise les opérations d'ensemble telles les lotissements " sous réserve qu'elles respectent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone définies par le document d'orientations d'aménagement ", lequel document pose le principe d'un aménagement cohérent. Par suite, la cour n'a pas plus commis d'erreur de droit en exerçant un contrôle de conformité par rapport aux orientations d'aménagement du plan local d'urbanisme auxquels renvoie le règlement applicable dans la zone.

12. En troisième lieu, la cour n'a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis en relevant que le projet comprenait six lots juxtaposés en bande le long du chemin rural et en estimant qu'il ne procédait pas d'une réflexion sur un aménagement d'ensemble de la zone, et ne répondait ainsi pas aux principes de l'aménagement cohérent définis dans le document d'orientations d'aménagement. La cour, qui s'est référée aux similitudes avec l'autre projet présenté par M. et Mme B...et à l'examen de sa situation au regard des dispositions du plan local d'urbanisme, a suffisamment motivé son arrêt sur ce point.

13. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a annulé le jugement du tribunal administratif de Pau du 30 juin 2014 en tant qu'il a annulé l'arrêté du maire d'Urrugne du 8 juin 2012, et rejeté leur demande présentée devant le tribunal tendant à l'annulation de cet arrêté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. et Mme B...contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 17 novembre 2016 doit être rejeté.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune d'Urrugne qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B...une somme de 3 000 euros à verser à la commune d'Urrugne, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme B...est rejeté.

Article 2 : M. et Mme B...verseront une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à la commune d'Urrugne.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B...et à la commune d'Urrugne.


Synthèse
Formation : 6ème et 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 406947
Date de la décision : 11/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 avr. 2019, n° 406947
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste de Froment
Rapporteur public ?: M. Stéphane Hoynck
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT, ROBILLOT ; SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:406947.20190411
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