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14/06/2018 | FRANCE | N°408881

France | France, Conseil d'État, 6ème et 5ème chambres réunies, 14 juin 2018, 408881


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 408881, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 mars et 19 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association trinationale de protection nucléaire, M. H...C..., la société Südgetreide GMBH et CO KG, MM. E...B..., D...I...et G...A...et J...F...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 2016-DC-0551 de l'Autorité de sûreté nucléaire du 29 mars 2016 fixant les prescriptions relatives aux modalités de prélèvement et de consommation d'eau, de rejet d'effluen

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Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 408881, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 mars et 19 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association trinationale de protection nucléaire, M. H...C..., la société Südgetreide GMBH et CO KG, MM. E...B..., D...I...et G...A...et J...F...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 2016-DC-0551 de l'Autorité de sûreté nucléaire du 29 mars 2016 fixant les prescriptions relatives aux modalités de prélèvement et de consommation d'eau, de rejet d'effluents et de surveillance de l'environnement de l'installation nucléaire de base n° 75 exploitée par Électricité de France - Société Anonyme (EDF-SA) dans la commune de Fessenheim (Haut-Rhin) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 408893, par une requête et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 14 mars et 19 octobre 2017 et le 11 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association trinationale de protection nucléaire, M. H...C..., la société Südgetreide GMBH et CO KG, MM. E...B..., D...I...et G...A...et J...F...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 2016-DC-0550 de l'Autorité de sûreté nucléaire du 29 mars 2016 fixant les valeurs limites de rejet dans l'environnement des effluents de l'installation nucléaire de base n° 75 exploitée par Électricité de France - Société Anonyme (EDF-SA) dans la commune de Fessenheim (Haut-Rhin) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le traité instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique ;

- la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, signée à Espoo le 25 février 1991;

- la convention pour la protection du Rhin, signée à Berne le 12 avril 1999 ;

- le règlement (CE) du Conseil n° 1100/2007 du 18 septembre 2007 ;

- la directive n° 2000/60/CE du 23 octobre 2000 ;

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- le décret n° 2007-1557 du 2 novembre 2007 ;

- le décret n° 2016-846 du 28 juin 2016 ;

- l'arrêté du 2 février 1998 relatif aux prélèvements et à la consommation d'eau ainsi qu'aux émissions de toute nature des installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation ;

- l'arrêté du 9 août 2006 relatif aux niveaux à prendre en compte lors d'une analyse de rejets dans les eaux de surface ou de sédiments marins, estuariens ou extraits de cours d'eau ou canaux relevant respectivement des rubriques 2.2.3.0, 4.1.3.0 et 3.2.1.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement ;

- l'arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et de eaux destinées à la consommation humaine mentionnées aux articles R. 1321-2, R. 1321-3, R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique ;

- l'arrêté du 25 janvier 2010 relatif aux méthodes et critères d'évaluation de l'état écologique, de l'état chimique et du potentiel écologique des eaux de surface pris en application des articles R. 212-10, R. 212-11 et R. 212-18 du code de l'environnement ;

- l'arrêté du 7 février 2012 fixant les règles générales relatives aux installations nucléaires de base ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyrille Beaufils, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat de l'Association trinationale de protection nucléaire et autres et à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la société Electricité de France.

Considérant ce qui suit :

1. En vertu de l'article L. 593-7 du code de l'environnement, la création d'une installation nucléaire de base (INB) est soumise à autorisation. Selon les dispositions du II de l'article L. 593-14 du même code, toute " modification substantielle d'une INB, de ses modalités d'exploitation autorisées ou des éléments ayant conduit à son autorisation " est soumise à une nouvelle autorisation, le caractère substantiel de la modification étant apprécié suivant des critères fixés par décret en Conseil d'Etat au regard de son impact sur la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1. La nouvelle autorisation est accordée dans les conditions prévues aux articles L. 593-7 à L. 593-12, selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat. En vertu des dispositions de l'article L. 593 15 du même code, les modifications d'une INB ou de ses modalités d'exploitation autorisées qui, sans être substantielles, sont notables sont soumises, en fonction de leur importance, soit à déclaration auprès de l'Autorité de sûreté nucléaire, soit à autorisation par cette autorité. Ces modifications peuvent être soumises à la consultation du public selon les modalités prévues au titre II du livre Ier du code de l'environnement. Aux termes de l'article L. 593-10 du même code : " Pour l'application de l'autorisation, l'Autorité de sûreté nucléaire définit, dans le respect des règles générales prévues à l'article L. 593-4, les prescriptions relatives à la conception, à la construction et à l'exploitation de l'installation qu'elle estime nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1. Ces prescriptions peuvent notamment porter sur des moyens de suivi, de surveillance, d'analyse et de mesure. Elle les communique au ministre chargé de la sûreté nucléaire. / Elle précise notamment, s'il y a lieu, les prescriptions relatives aux prélèvements d'eau de l'installation et aux substances radioactives issues de l'installation. Les prescriptions fixant les limites de rejets de l'installation dans l'environnement sont soumises à l'homologation du ministre chargé de la sûreté nucléaire. ". Les articles 16, 26, 27 et 31 du décret du 2 novembre 2007 relatif aux INB et au contrôle, en matière de sûreté nucléaire, du transport de substances radioactives précisent les cas et conditions dans lesquels sont accordées ou déposées ces autorisations et déclarations. Enfin, les articles 18 et 25 de ce même décret fixent la procédure au terme de laquelle l'Autorité de sûreté nucléaire peut, pour l'application de l'autorisation accordée pour l'exploitation d'une INB, édicter, modifier ou compléter des prescriptions relatives à la conception, à la construction et à l'exploitation de l'installation qu'elle estime nécessaires à la protection de la sécurité, de la santé et de la salubrité publiques et à la protection de la nature et de l'environnement.

2. Il résulte de l'instruction que la société EDF a déposé en 2012 auprès de l'Autorité de sûreté nucléaire une déclaration de modification des conditions d'exploitation de la centrale de Fessenheim, concernant notamment le changement du produit utilisé pour le conditionnement des circuits secondaires et la réalisation d'opérations de dragage et curage de prises d'eau dans le grand canal d'Alsace. Sur le fondement des dispositions de l'article L. 593-10 du code de l'environnement et de l'article 18 du décret du 2 novembre 2007, l'Autorité de sûreté nucléaire a, d'une part, par sa décision n° 2016-DC-0551 du 29 mars 2016, fixé les nouvelles prescriptions relatives aux modalités de prélèvement et de consommation d'eau, de rejet d'effluents et de surveillance de l'environnement de l'installation nucléaire de base n° 75 exploitée par Électricité de France sur le territoire de la commune de Fessenheim, d'autre part, par sa décision n° 2016-DC-0550 du même jour, qui est soumise à homologation ministérielle, fixé les nouvelles valeurs limites de rejet dans l'environnement des effluents de la même installation. Eu égard au caractère notable des modifications projetées par la société EDF, celles-ci ont été autorisées par une décision CODEP-DCN-2016-029357 du président de l'Autorité de sûreté nucléaire. Par deux requêtes, l'association trinationale de protection nucléaire et autres demandent au Conseil d'Etat, statuant comme juge du plein contentieux des mesures de police concernant les installations nucléaires de base, l'annulation des deux décisions n° 2016-DC-0551 et n° 2016-DC-0550 du 29 mars 2016. Ces requêtes présentant à juger des questions semblables, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur les fins de non-recevoir opposées par la société Electricité de France :

3. D'une part, l'association trinationale pour la protection nucléaire a produit, en réponse à la fin de non-recevoir opposée par la société Electricité de France, la délibération du 10 janvier 2017 autorisant son président à agir en justice contre les décisions attaquées. D'autre part, eu égard à son objet statutaire et à la portée des décisions attaquées, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour en demander l'annulation. Par ailleurs, eu égard notamment à l'objet des décisions attaquées, à l'activité qu'ils exercent ou à leur lieu de résidence M. H... C..., la société Südgetreide GMBH et CO KG, MM. E...B..., D...I...et G...A...et J...F...justifient également d'un intérêt suffisant leur donnant qualité pour demander l'annulation de ces décisions. Par suite, les fins de non-recevoir soulevées par la société Electricité de France doivent être rejetées.

Sur la régularité des décisions attaquées :

4. En premier lieu, il résulte des dispositions rappelées au point 1 que les décisions par lesquelles l'Autorité de sûreté nucléaire édicte des prescriptions relatives, d'une part, à la conception, à la construction et à l'exploitation de l'installation et, d'autre part, aux prélèvements d'eau de l'installation et aux substances radioactives issues de l'installation en application des articles L. 593-10 du code de l'environnement ainsi que des articles 18 et 25 du décret du 2 novembre 2007 précité sont distinctes, tant au regard de leur objet que des règles procédurales qui leur sont applicables, des décisions d'autorisation prises par l'Autorité de sûreté nucléaire en cas de modification notable de l'installation, prises sur le fondement des articles L. 593-15 du code et 26 du décret du 2 novembre 2007. Par suite, les divers moyens tirés de ce que la procédure d'autorisation comporterait, compte tenu de l'ampleur des modifications envisagées, des irrégularités, au motif, notamment, que la société aurait dû déposer une demande d'autorisation et non une déclaration, que l'étude d'impact était insuffisante, qu'une enquête publique aurait dû être organisée et que les règles régissant la consultation du public n'auraient pas été respectées doivent être, en tout état de cause, écartés comme inopérants, les décisions attaquées n'ayant ni pour objet ni pour effet d'autoriser des modifications notables de l'installation.

5. En deuxième lieu, les articles L. 593-8 et L. 593-14 du code de l'environnement, qui disposent que l'autorisation est délivrée par l'Autorité de sûreté nucléaire après l'accomplissement d'une enquête publique, ne sont pas applicables aux décisions de cette autorité fixant des prescriptions prises sur le fondement des dispositions de l'article L. 593-10. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces articles en raison de l'absence d'enquête publique ne peut donc qu'être écarté comme inopérant.

6. En troisième lieu, l'arrêté du 9 août 2006 relatif aux niveaux à prendre en compte lors d'une analyse de rejets dans les eaux de surface ou de sédiments marins, estuariens ou extraits de cours d'eau ou canaux relevant respectivement des rubriques 2.2.3.0, 4.1.3.0 et 3.2.1.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement est pris pour l'application des dispositions des articles L. 214-2 et R. 214-1 du même code relatives aux activités, installations et usages ayant une incidence sur l'eau et les milieux aquatiques et marins. En vertu du deuxième alinéa de l'article L. 593-1 du code, les INB ne sont pas soumises aux dispositions de ses articles L. 214-1 à L. 214-6. L'article R. 214-3 du même code dispose, en outre, que sont seules applicables aux INB, en lieu et place des dispositions des articles R. 214-1 à R. 214-56 du code, celles du décret du 2 novembre 2007 précité. Il en résulte que l'arrêté du 9 août 2006 n'est pas applicable aux INB, qui sont régies, sur ce point, par l'arrêté du 7 février 2012 fixant les règles générales relatives aux installations nucléaires de base. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'arrêté du 9 août 2006 par la décision n° 2016-DC-0550 du 29 mars 2016 ne peut qu'être écarté comme inopérant.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 122-10 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'elle constate qu'un projet est susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement d'un autre Etat, membre de l'Union européenne ou partie à la Convention du 25 février 1991 sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière signée à Espoo, ou lorsqu'elle est saisie par l'Etat susceptible d'être affecté par le projet, l'autorité compétente pour prendre la décision d'autorisation, d'approbation ou d'exécution du projet lui notifie sans délai l'arrêté d'ouverture de l'enquête publique et lui transmet un exemplaire du dossier d'enquête. (...) ". Ces dispositions, qui régissent les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement d'un autre Etat, ne sont pas applicables aux décisions attaquées qui, ainsi qu'il a été dit au point 4, n'ont ni pour objet ni pour effet d'autoriser la société EDF, en sa qualité d'exploitant de la centrale nucléaire de Fessenheim, à procéder à des modifications de cette installation ou de ses modalités d'exploitation telles qu'elles ont été autorisées. Par suite, le moyen tiré de ce que les conditions d'organisation de la consultation du public auraient méconnu les dispositions de l'article R. 122-10 du code de l'environnement doit également être écarté comme inopérant.

8. En cinquième lieu, les dispositions de l'article L. 120-1-1 du code de l'environnement applicables à la date des décisions attaquées, désormais reprises à l'article L. 123-9 du même code, prévoient que : " I. - Sous réserve des dispositions de l'article L. 120-2, le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement est applicable aux décisions individuelles des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement qui n'appartiennent pas à une catégorie de décisions pour lesquelles des dispositions législatives particulières ont prévu les cas et conditions dans lesquels elles doivent, le cas échéant en fonction de seuils et critères, être soumises à participation du public. (...) / II. - Le projet d'une décision mentionnée au I ou, lorsque la décision est prise sur demande, le dossier de demande est mis à disposition du public par voie électronique. Lorsque le volume ou les caractéristiques du projet de décision ou du dossier de demande ne permettent pas sa mise à disposition par voie électronique, le public est informé, par voie électronique, de l'objet de la procédure de participation et des lieux et horaires où l'intégralité du projet ou du dossier de demande peut être consultée. (...) ".

9. D'une part, s'il est soutenu que la consultation organisée par l'Autorité de sûreté nucléaire du 7 au 23 avril 2015 sur les projets de décisions litigieuses aurait été, en raison de l'absence de mise à disposition du public d'une version imprimée du dossier soumis à la consultation, irrégulière, il résulte des dispositions de l'article L. 120-1-1 du code de l'environnement citées au point précédent que les projets soumis à la consultation du public sont, en principe, mis à sa disposition par voie électronique, sauf dans le cas où leur volume ou leurs caractéristiques ne permettent pas la mise à disposition par cette voie. Il ne résulte pas de l'instruction que le volume ou les caractéristiques des dossiers ne permettaient pas leur mise à disposition par voie électronique. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la consultation aurait été entachée d'irrégularité, faute pour le public d'avoir pu consulter une version imprimée des projets de décisions.

10. D'autre part, aucun texte ni aucun principe n'imposent que la consultation du public organisée sur le fondement de l'article L. 120-1-1 du code de l'environnement donne lieu à une information préalable des Etats membres de l'Union européenne ou des Etats parties à la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, signée à Espoo le 25 février 1991. Ainsi qu'il a été dit au point 7, les dispositions de l'article R. 122-10 du code de l'environnement, qui prévoient une telle information pour les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement d'un autre Etat, ne sont pas applicables aux décisions attaquées. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la procédure de consultation du public aurait été irrégulière pour ce motif.

11. En sixième lieu, aux termes de l'article 18 du décret du 2 novembre 2007 précité : " I. - Lorsque l'Autorité de sûreté nucléaire prévoit d'édicter, pour l'application du décret d'autorisation de création, des prescriptions à caractère technique relatives à la conception, à la construction ou à l'exploitation de l'installation nucléaire de base, elle en transmet le projet à l'exploitant, qui dispose de deux mois pour lui faire part de ses observations. / II. Lorsque les prescriptions envisagées sont relatives aux prélèvements d'eau, aux rejets d'effluents dans le milieu ambiant et à la prévention ou à la limitation des nuisances de l'installation pour le public et l'environnement, l'Autorité de sûreté nucléaire transmet le projet de prescriptions assorti d'un rapport de présentation au préfet mentionné au I de l'article 13 et à la commission locale d'information. / Le préfet soumet le projet de prescriptions et le rapport de présentation au conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques mentionné à l'article R. 1416-16 du code de la santé publique. (...). Le conseil départemental dispose d'un délai de trois mois pour émettre son avis, qui est transmis par le préfet à l'Autorité de sûreté nucléaire. / Dans le même délai, la commission locale d'information peut adresser ses observations à l'Autorité de sûreté nucléaire. ".

12. D'une part, il ne résulte pas des dispositions citées au point précédent, ni d'aucun principe ou d'aucune autre disposition que le public aurait dû disposer, dans le cadre de la consultation organisée sur le fondement des dispositions de l'article L. 120-1-1 du code de l'environnement citées au point 8, des avis ou observations du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques, de la commission locale d'information et de surveillance et de l'exploitant de la centrale. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que les documents mis à la disposition du public dans le cadre de la consultation organisée par l'Autorité de sûreté nucléaire auraient comporté des omissions ou inexactitudes qui auraient eu pour effet de nuire à l'information du public ou auraient été de nature à exercer une influence sur les résultats de la consultation et sur les décisions de l'Autorité de sûreté nucléaire. Par suite, le moyen tiré de ce que la consultation du public serait, en raison de l'absence de mise à disposition du public de certains documents, dont il est soutenu qu'ils auraient été essentiels à la compréhension des enjeux sanitaires et environnementaux, entachée d'irrégularité ne peut qu'être écarté.

13. En septième lieu, aux termes de l'article 37 du traité instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique : " Chaque État membre est tenu de fournir à la Commission les données générales de tout projet de rejet d'effluents radioactifs sous n'importe quelle forme, permettant de déterminer si la mise en oeuvre de ce projet est susceptible d'entraîner une contamination radioactive des eaux, du sol ou de l'espace aérien d'un autre État membre. / La Commission, après consultation du groupe d'experts visé à l'article 31, émet son avis dans un délai de six mois ". Il résulte de l'instruction que la Commission européenne a émis un avis le 5 avril 1979 sur les rejets de la centrale de Fessenheim. Ayant été informée du projet de nouvelles prescriptions, elle a indiqué, par courrier du 20 novembre 2014, qu'elle n'entendait pas émettre d'avis dès lors qu'elle avait déjà été consultée, que les prescriptions en cause n'étaient pas moins restrictives et qu'il n'y avait pas d'aggravation des conséquences potentielles des accidents, en renvoyant au a) du point 5 de sa recommandation n° 2010/635/Euratom du 11 octobre 2010. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 37 du traité instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique doit, en tout état de cause, être écarté.

14. Toutefois, en huitième lieu, aux termes de l'article L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Doivent (...) être motivées les décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Le II de l'article 4.1.2 de l'arrêté du 7 février 2012 fixant les règles générales relatives aux installations nucléaires de base dispose que : " Les rejets d'effluents ne peuvent dépasser les limites fixées aux articles 27, 31, 32, 34, et au 14° de l'article 33 de l'arrêté du 2 février 1998 susvisé dans sa version mentionnée en annexe I, sauf disposition contraire fixée par décision de l'Autorité de sûreté nucléaire prise en application du 2° du IV de l'article 18 du décret du 2 novembre 2007 susvisé, sur la base des justifications fournies par l'exploitant quant au caractère optimal des limites proposées et à l'acceptabilité de leurs impacts, et après avis du conseil départemental mentionné à l'article R. 1416-1 du code de la santé publique. ". Il résulte de ces dernières dispositions qu'elles imposent aux exploitants d'INB de respecter les valeurs limites de rejets d'effluents fixées par l'arrêté du 2 février 1998, sous réserve de dérogations accordées par l'Autorité de sûreté nucléaire. Par suite, conformément à l'article L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration cité ci-dessus, les dispositions de la décision attaquée par lesquelles l'Autorité de sûreté nucléaire fixe des valeurs limites de rejets d'effluents moins restrictives que celles que prévoit la réglementation en vigueur, qui n'ont pas un caractère réglementaire, doivent être motivées, à peine d'irrégularité.

15. Or, la décision attaquée n° 2016-DC-0550 autorise l'exploitant de la centrale nucléaire de Fessenheim à déroger à certaines des valeurs limites de rejets d'effluents fixées par le II de l'article 4.1.2. de l'arrêté du 7 février 2012 précité, en ce qui concerne, respectivement, le pH des rejets liquides au paragraphe [EDF-FSH-164], les rejets d'hydrocarbures, de matières en suspension (MES), de demande chimique en oxygène (DCO), d'azote, de métaux totaux, de demande biologique en oxygène sur 5 jours (DBO5) et de phosphore au deuxième alinéa du paragraphe [EDF-FSH-168] et dans les tableaux de ce paragraphe, et les rejets thermiques au paragraphe [EDF-FSH-170]. Contrairement à ce qui est soutenu en défense, ni la mention dans la décision attaquée que ces dérogations sont prises sur le fondement du II de l'article 4.1.2 de l'arrêté du 7 février 2012, ni le renvoi dans ses motifs au dossier de déclaration de modifications déposé par la société Électricité de France ne permettent de regarder l'obligation de motivation de ces dérogations comme ayant été respectée en l'espèce. Ainsi, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête n° 408893 dirigés contre le paragraphe [EDF-FSH-170], les requérants sont fondés à demander l'annulation des dispositions dérogatoires mentionnées ci-dessus des paragraphes [EDF-FSH-164], [EDF-FSH-168] et [EDF-FSH-170] de la décision n° 2016-DC-0550, qui sont divisibles de ses autres dispositions.

16. En revanche, la circonstance que certaines dispositions de la décision n° 2016-DC-0550 seraient illégales est sans incidence sur la légalité de la décision n° 2016-DC-0551. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision n° 2016-DC-0551 serait illégale en raison de l'absence de motivation de certaines dispositions de la décision n° 2016-DC-0550 doit être écarté comme inopérant.

Sur le bien-fondé des décisions attaquées :

17. En premier lieu, les dispositions du point 7 de l'article 4 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, ont été transposées au VII de l'article L. 212-1 et au I bis de l'article R. 212-16 du code de l'environnement. Il n'est pas soutenu que cette transposition serait incomplète ou incorrecte. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par les décisions de police attaquées, de ces dispositions de la directive ne peut qu'être écarté comme inopérant.

18. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4.1.12 de l'arrêté du 7 février 2012 précité : " I. - Les rejets dans le sol et les eaux souterraines sont interdits, à l'exception des infiltrations éventuelles d'eaux pluviales dans les conditions définies aux articles 4.1.9 et 4.1.14 et des réinjections, dans leur nappe d'origine, d'eaux pompées lors de certains travaux de génie civil. / II. - Pour les substances ne figurant ni dans le tableau annexé à l'article R. 211-11-1 du code de l'environnement ni à l'annexe II de l'arrêté ministériel du 2 février 1998 susvisé dans sa version mentionnée en annexe I, des dispositions contraires peuvent être fixées par décision de l'Autorité de sûreté nucléaire prise en application du 2° du IV de l'article 18 du décret du 2 novembre 2007 susvisé, sur la base des justifications fournies par l'exploitant quant au caractère optimal de ces rejets et à l'acceptabilité de leurs impacts, et après avis du conseil départemental mentionné à l'article R. 1416-1 du code de la santé publique ".

19. D'une part, la décision n° 2016-DC-0551 n'a pas pour objet de fixer des valeurs limites de rejet des effluents. Par suite, il ne saurait être utilement soutenu que cette décision méconnaîtrait les dispositions de l'article 4.1.12 de l'arrêté du 7 février 2012 citées au point précédent au motif qu'elle se bornerait à prévoir une surveillance des eaux souterraines sans fixer de valeur limite des rejets d'effluents.

20. D'autre part, l'Autorité de sûreté nucléaire n'a pas, par sa décision n° 2016-DC-0550, mis en oeuvre la faculté, ouverte par les dispositions du II de l'article 4.1.12 de l'arrêté du 7 février 2012 citées au point 18, d'autoriser des rejets d'effluents dans les eaux souterraines. Ces derniers sont, par voie de conséquence, interdits en application du I de cet article. Ainsi, la surveillance des eaux souterraines prescrite par la décision n° 2016-DC-0551 ayant pour seul objet de s'assurer du respect de cette interdiction, il ne saurait être utilement soutenu que la prescription de cette surveillance aurait pour effet d'autoriser les rejets d'effluents dans les eaux souterraines. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision n° 2016-DC-0550 méconnaîtrait les normes de qualité de ces eaux prévues à l'article 4.1.12 de l'arrêté du 7 février 2012 au motif qu'elle ne fixerait pas de valeurs limites pour les rejets dans les eaux souterraines.

21. En troisième lieu, aux termes du I de l'article 4.1.2 de l'arrêté du 7 février 2012 précité : " I. - Les valeurs limites d'émission, de prélèvement d'eau et de rejet d'effluents de l'installation sont fixées sur la base des meilleures techniques disponibles dans des conditions techniquement et économiquement acceptables en prenant en considération les caractéristiques de l'installation, son implantation géographique et les conditions locales de l'environnement ". S'il est soutenu qu'elles méconnaîtraient ces dispositions, faute de prendre en compte le risque sismique et le risque d'inondation affectant la centrale de Fessenheim et les conséquences sur la pollution des eaux susceptibles d'en résulter, les décisions attaquées ont pour seul objet de réglementer les prélèvements d'eau nécessaires au fonctionnement normal de la centrale. Il ne résulte pas de l'instruction que ces décisions auraient, dans cette mesure, incorrectement pris en compte les caractéristiques de l'installation, son implantation géographique ou les conditions locales de l'environnement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du I de l'article 4.1.2 de l'arrêté du 7 février 2012 ne peut qu'être écarté.

22. En quatrième lieu, il résulte de la décision n° 2016-DC-0551 qu'elle a pour seule finalité de fixer des prescriptions, assorties de mesures de surveillance, qui encadrent les conditions dans lesquelles sont opérés les rejets d'effluents dans le grand canal d'Alsace, sans autoriser ceux-ci, ce qui est l'objet de la décision n° 2016-DC-0550. Dès lors, il ne saurait être utilement soutenu que les modalités de surveillance prescrites par cette décision, lesquelles ne sauraient avoir, par elles-mêmes, pour effet d'entraîner la détérioration d'une masse d'eau, seraient contraires aux objectifs environnementaux fixés par les dispositions du premier paragraphe de l'article 4 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau . Le moyen tiré de ce que la décision n° 2016-DC-0551 méconnaîtrait ces dispositions, lesquelles ont été, au demeurant, transposées à l'article L. 212-1 du code de l'environnement, ne peut dès lors qu'être écarté.

23. En cinquième lieu, aux termes des paragraphes 3 et 4 de l'article 2 du règlement du Conseil du 18 septembre 2007 instituant des mesures de reconstitution du stock d'anguilles européennes : " 3. Les États membres élaborent un plan de gestion de l'anguille pour chaque bassin hydrographique tel que défini au paragraphe 1. / 4. L'objectif de chaque plan de gestion est de réduire la mortalité anthropique afin d'assurer avec une grande probabilité un taux d'échappement vers la mer d'au moins 40 % de la biomasse d'anguilles argentées correspondant à la meilleure estimation possible du taux d'échappement qui aurait été observé si le stock n'avait subi aucune influence anthropique. Le plan de gestion des anguilles est établi dans le but de réaliser cet objectif à long terme ". Les dispositions du 4 de cet article sont applicables uniquement au plan de gestion de l'anguille que chaque Etat membre doit élaborer en application du 3, à l'exclusion de toute autre décision administrative. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision n° 2016-DC-0551 méconnaîtrait ces dispositions ne peut qu'être écarté comme inopérant.

24. En sixième lieu, il ne saurait être utilement soutenu que la décision n° 2016-DC-0550 méconnaîtrait les normes de qualité des eaux douces prévues par la directive du 6 septembre 2006 concernant la qualité des eaux douces ayant besoin d'être protégées ou améliorées pour être aptes à la vie des poissons, dès lors que ces dispositions de cette directive ont été abrogées au 21 décembre 2013 par la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau.

25. En septième lieu, d'une part, l'arrêté du 25 janvier 2010 relatif aux méthodes et critères d'évaluation de l'état écologique, de l'état chimique et du potentiel écologique des eaux de surface pris en application des articles R. 212-10, R. 212-11 et R. 212-18 du code de l'environnement, qui a pour objet, aux termes de son article 1er, de définir " les méthodes et critères servant à caractériser les différentes classes d'état écologique, d'état chimique et de potentiel écologique des eaux de surface en application des articles R. 212-10, R. 212-11 et R. 212-18 du code de l'environnement ", réglemente notamment les modalités de calcul des rejets de phosphore total. Toutefois, la circonstance que les prescriptions édictées par l'Autorité de sûreté nucléaire dans la décision n° 2016-DC-0550 ne comportent pas de disposition en matière de rejet de phosphore total ne saurait entacher d'illégalité cette décision en tant qu'elle concerne les rejets d'autres effluents. En outre, en vertu de l'article 4.1.2 de l'arrêté du 7 février 2012 précité, les limites maximales de rejets d'effluents sont déterminées par renvoi à l'arrêté du 2 février 1998, dont l'article 32 prévoit des valeurs limites de rejet pour le phosphore total. Par suite, la circonstance que la décision n° 2016-DC-0550 ne prévoit pas de prescription pour le phosphore total est également sans incidence sur sa légalité. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que cette décision, faute de fixer une valeur limite de rejet pour le phosphore total, méconnaîtrait les dispositions précitées de l'arrêté du 25 janvier 2010, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

26. D'autre part, les requérants ne sauraient utilement soutenir que la décision n° 2016-DC-0550 serait illégale en tant qu'elle ne fixe pas de valeur limite de rejet pour la demande biologique en oxygène à cinq jours (DBO5), dès lors que cette limite résulte des dispositions combinées de l'article 4.1.2 de l'arrêté du 7 février 2012 précité et de l'article 32 de l'arrêté du 2 février 1998 précité, qui prévoit que la fixation de valeurs limites différentes par un arrêté d'autorisation est une simple faculté.

27. En huitième lieu, d'une part, si les prescriptions de l'Autorité de sûreté nucléaire doivent, en vertu du 2° du IV de l'article 18 de l'arrêté du 2 novembre 2007 précité, " être compatibles avec les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux et les schémas d'aménagement et de gestion des eaux mentionnés aux articles L. 212-1 et L. 212-3 du même code ", le moyen tiré de ce que la décision n° 2016-DC-0550 serait incompatible avec les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhin-Meuse et celles du plan de gestion pour le district hydrographique international du Rhin n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. D'autre part, l'erreur matérielle affectant la mention du schéma directeur applicable dans les visas de ladite décision est sans influence sur sa légalité.

28. En neuvième lieu, aux termes de l'article 5 de la convention pour la protection du Rhin, signée à Berne le 12 avril 1999 : " Afin d'atteindre les objectifs cités à l'article 3 et en observation des principes cités à l'article 4, les Parties contractantes s'engagent : / (...) / 4. A engager sur leur territoire les actions autonomes qu'elles jugent nécessaires et à assurer pour le moins de : / " a) Soumettre le rejet d'eaux usées susceptible d'avoir un impact sur la qualité des eaux à une autorisation préalable ou à une réglementation générale où sont fixées des limites des émissions ". Ces stipulations, qui ont pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et requièrent l'intervention d'actes complémentaires pour produire des effets à l'égard des particuliers, ne sauraient être utilement invoquées à l'appui du présent recours. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision n° 2016-DC-0550 méconnaîtrait ces stipulations ne peut qu'être écarté.

29. En dixième lieu, le moyen tiré de ce que la concentration maximale en acide borique dans l'ouvrage de rejet fixée par la décision n° 2016-DC-0550 méconnaîtrait les limites de qualité des eaux destinées à la consommation humaine fixées par l'arrêté du 11 janvier 2007 du ministre de la santé et des solidarités relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine mentionnées aux articles R. 1321-2, R. 1321-3, R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique et serait, pour ce motif, entachée d'erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté comme inopérant, dès lors que ledit arrêté n'a pas pour objet de régir les rejets d'effluents par les installations nucléaires de base.

30. Enfin, les moyens tirés de ce que la décision n° 2016-DC-0550 serait entachée de détournement de procédure et de détournement de pouvoir, qui ne sont étayés par aucun argument ou élément sérieux, ne peuvent être accueillis.

31. Il résulte de tout ce qui précède que l'association trinationale de protection nucléaire et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision n° 2016-DC-0551. Ils sont fondés, en revanche, à demander l'annulation de la décision n° 2016-DC-0550, seulement dans la mesure précisée au point 15.

Sur les effets dans le temps de l'annulation :

32. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment, d'une part, à l'intérêt économique et énergétique qui s'attache à la poursuite de l'exploitation de la centrale de Fessenheim et, d'autre part, au fait que le maintien en vigueur temporaire des valeurs limites annulées par la présente décision, pour le seul motif d'une absence de motivation, n'entraîne pas de risques particuliers pour les intérêts visés par l'article L. 593-1 du code l'environnement ou pour d'autres intérêts publics ou privés, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, juge du plein contentieux des mesures de police concernant les installations nucléaires de base, d'autoriser la société EDF à rejeter dans l'environnement les effluents en cause produits par l'installation nucléaire de base n° 75 dans la commune de Fessenheim en respectant les valeurs limites annulées jusqu'à ce que l'Autorité de sûreté nucléaire prenne, au plus tard le 1er octobre 2018, une nouvelle décision prescrivant des valeurs limites pour ces effluents.

Sur les frais exposés dans l'instance :

33. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 3 000 euros à verser aux requérants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, en revanche, de mettre à la charge de ces derniers une somme à verser à la société Electricité de France au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête n° 408881 est rejetée.

Article 2 : Le paragraphe [EDF-FSH-164] (alinéas 1 et 2), le deuxième alinéa du paragraphe [EDF-FSH-168], le tableau du a de ce même paragraphe et les 7ème à 11ème lignes du tableau du b de ce même paragraphe, ainsi que le paragraphe [EDF-FSH-170] de l'annexe à la décision n° 2016-DC-0550 sont annulés.

Article 3 : La société Electricité de France demeure autorisée à rejeter dans l'environnement les effluents produits par l'installation nucléaire de base n° 75 dans la commune de Fessenheim dans le respect des valeurs limites qui étaient fixées par les dispositions annulées à l'article 2 de la présente décision jusqu'à ce que l'Autorité de sûreté nucléaire prenne, au plus tard le 1er octobre 2018, une nouvelle décision prescrivant des valeurs limites pour ces effluents.

Article 4 : L'Etat versera à l'association trinationale de protection nucléaire et autres une somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête n° 408893 est rejeté.

Article 6 : Les conclusions présentées par la société Electricité de France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à l'association trinationale de protection nucléaire, représentant unique désigné pour l'ensemble des requérants, à l'Autorité de sûreté nucléaire, à la société Electricité de France et au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire.


Synthèse
Formation : 6ème et 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 408881
Date de la décision : 14/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ENERGIE - INSTALLATIONS NUCLÉAIRES - ARRÊTÉ DE L'ASN FIXANT LES VALEURS LIMITES DE REJET DANS L'ENVIRONNEMENT D'UNE INB - POUVOIR DU JUGE DE PLEINE JURIDICTION DES INB LORSQU'IL PRONONCE L'ANNULATION D'UNE TELLE MESURE DE POLICE - FACULTÉ D'AUTORISER LUI-MÊME - À TITRE PROVISOIRE - LA POURSUITE DE L'EXPLOITATION - DANS L'ATTENTE D'UNE NOUVELLE MESURE - EXISTENCE [RJ1].

29-03-005 Annulation, par le juge de pleine juridiction des installations nucléaires de base (INB), d'une décision de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) du 29 mars 2016 fixant les valeurs limites de rejet dans l'environnement des effluents de l'INB n° 75 exploitée par Electricité de France - Société anonyme (EDF-SA) dans la commune de Fessenheim.,,,Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment, d'une part, à l'intérêt économique et énergétique qui s'attache à la poursuite de l'exploitation de la centrale de Fessenheim et, d'autre part, au fait que le maintien en vigueur temporaire des valeurs limites annulées, pour le seul motif d'une absence de motivation, n'entraîne pas de risques particuliers pour les intérêts visés par l'article L. 593-1 du code l'environnement ou pour d'autres intérêts publics ou privés, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, juge du plein contentieux des mesures de police concernant les INB, d'autoriser la société EDF à rejeter dans l'environnement les effluents en cause produits par l'INB n° 75 dans la commune de Fessenheim en respectant les valeurs limites annulées jusqu'à ce que l'ASN prenne, au plus tard le 1er octobre 2018, une nouvelle décision prescrivant des valeurs limites pour ces effluents.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - INSTALLATIONS NUCLÉAIRES (VOIR : ENERGIE) - POUVOIR DU JUGE LORSQU'IL PRONONCE L'ANNULATION D'UNE MESURE DE POLICE CONCERNANT UNE INB - FACULTÉ D'AUTORISER LUI-MÊME - À TITRE PROVISOIRE - LA POURSUITE DE L'EXPLOITATION - DANS L'ATTENTE D'UNE NOUVELLE MESURE - EXISTENCE - CAS D'UN ARRÊTÉ DE L'ASN FIXANT LES VALEURS LIMITES DE REJET DANS L'ENVIRONNEMENT D'UNE INB [RJ1].

44-03 Annulation, par le juge de pleine juridiction des installations nucléaires de base (INB), d'une décision de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) du 29 mars 2016 fixant les valeurs limites de rejet dans l'environnement des effluents de l'INB n° 75 exploitée par Electricité de France - Société anonyme (EDF-SA) dans la commune de Fessenheim.,,,Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment, d'une part, à l'intérêt économique et énergétique qui s'attache à la poursuite de l'exploitation de la centrale de Fessenheim et, d'autre part, au fait que le maintien en vigueur temporaire des valeurs limites annulées, pour le seul motif d'une absence de motivation, n'entraîne pas de risques particuliers pour les intérêts visés par l'article L. 593-1 du code l'environnement ou pour d'autres intérêts publics ou privés, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, juge du plein contentieux des mesures de police concernant les INB, d'autoriser la société EDF à rejeter dans l'environnement les effluents en cause produits par l'INB n° 75 dans la commune de Fessenheim en respectant les valeurs limites annulées jusqu'à ce que l'ASN prenne, au plus tard le 1er octobre 2018, une nouvelle décision prescrivant des valeurs limites pour ces effluents.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - POUVOIRS DU JUGE DE PLEIN CONTENTIEUX - POUVOIR DU JUGE LORSQU'IL PRONONCE L'ANNULATION D'UNE MESURE DE POLICE CONCERNANT UNE INB - FACULTÉ D'AUTORISER LUI-MÊME - À TITRE PROVISOIRE - LA POURSUITE DE L'EXPLOITATION - DANS L'ATTENTE D'UNE NOUVELLE MESURE - EXISTENCE - CAS D'UN ARRÊTÉ DE L'ASN FIXANT LES VALEURS LIMITES DE REJET DANS L'ENVIRONNEMENT D'UNE INB [RJ1].

54-07-03 Annulation, par le juge de pleine juridiction des installations nucléaires de base (INB), d'une décision de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) du 29 mars 2016 fixant les valeurs limites de rejet dans l'environnement des effluents de l'INB n° 75 exploitée par Electricité de France - Société anonyme (EDF-SA) dans la commune de Fessenheim.,,,Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment, d'une part, à l'intérêt économique et énergétique qui s'attache à la poursuite de l'exploitation de la centrale de Fessenheim et, d'autre part, au fait que le maintien en vigueur temporaire des valeurs limites annulées, pour le seul motif d'une absence de motivation, n'entraîne pas de risques particuliers pour les intérêts visés par l'article L. 593-1 du code l'environnement ou pour d'autres intérêts publics ou privés, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, juge du plein contentieux des mesures de police concernant les INB, d'autoriser la société EDF à rejeter dans l'environnement les effluents en cause produits par l'INB n° 75 dans la commune de Fessenheim en respectant les valeurs limites annulées jusqu'à ce que l'ASN prenne, au plus tard le 1er octobre 2018, une nouvelle décision prescrivant des valeurs limites pour ces effluents.


Références :

[RJ1]

Rappr., s'agissant des pouvoirs du juge de pleine juridiction des installations classées, CE, 15 mai 2013, Société ARF, n° 353010, T. pp. 714-800.


Publications
Proposition de citation : CE, 14 jui. 2018, n° 408881
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyrille Beaufils
Rapporteur public ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Avocat(s) : SCP BOUTET-HOURDEAUX ; SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:408881.20180614
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