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12/03/2018 | FRANCE | N°418557

France | France, Conseil d'État, 12 mars 2018, 418557


Vu la procédure suivante :

La société Laboratoire Philippe Auguste a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision du 19 janvier 2018 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France a retiré l'autorisation de fonctionnement, pour la réalisation d'examens de biologie médicale, qu'il lui avait accordée le 11 février 2016. Par une ordonnance n° 1801496/9 du 12 février 2018, le juge des référés du

tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Par une requête, e...

Vu la procédure suivante :

La société Laboratoire Philippe Auguste a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision du 19 janvier 2018 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France a retiré l'autorisation de fonctionnement, pour la réalisation d'examens de biologie médicale, qu'il lui avait accordée le 11 février 2016. Par une ordonnance n° 1801496/9 du 12 février 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Par une requête, enregistrée le 26 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Laboratoire Philippe Auguste demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de faire droit à ses conclusions présentées devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que la décision litigieuse fait obstacle à la poursuite de son activité et est ainsi susceptible, eu égard à sa situation économique et financière critique, de conduire à sa liquidation judiciaire et à la perte de leur emploi par ses treize salariés, de même qu'elle fait obstacle à tout projet de vente ou cession ;

- la décision litigieuse porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'entreprendre ;

- aucune disposition ne donne compétence au directeur général de l'agence régionale de santé pour retirer son autorisation de fonctionnement à un laboratoire d'analyses médicales et lui enjoindre de cesser immédiatement toute activité au motif qu'il ne dispose pas d'une accréditation de 50 % de son activité ;

- le directeur général de l'agence régionale de santé s'est à tort cru lié pour retirer l'autorisation de fonctionnement et enjoindre au laboratoire de cesser immédiatement toute activité, sans attendre l'issue du recours gracieux auprès du comité français d'accréditation ;

- la décision litigieuse est illégale faute d'avoir été précédée d'une procédure contradictoire ;

- en ce qu'elle porte interdiction générale et absolue d'exercer une activité, elle n'est ni nécessaire, ni adaptée, ni proportionnée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. A cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en considération les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée.

2. L'ordonnance du 13 janvier 2010 a remplacé l'autorisation, qui était jusqu'alors, en application du premier alinéa de l'article L. 6211-2 du code de la santé publique, nécessaire à un laboratoire d'analyses de biologie médicale pour fonctionner, par une accréditation, en l'absence de laquelle l'article L. 6221-1 du code de la santé publique prévoit désormais, depuis sa modification par cette ordonnance, qu'un laboratoire de biologie médicale ne peut réaliser d'examen de biologie médicale. L'article L. 6221-8 du même code permet seulement qu'un laboratoire de biologie médicale soit, par dérogation à ce principe d'interdiction, autorisé par le directeur général de l'agence régionale de santé à poursuivre certaines activités pour lesquelles son accréditation a été suspendue ou retirée pour répondre à des situations d'urgence ou à une insuffisance grave de l'offre locale pendant une durée maximale de trois mois renouvelable une fois. En dehors de cette hypothèse, la réalisation d'examens de biologie médicale par un laboratoire de biologie médicale ne disposant pas de l'accréditation prévue à l'article L. 6221-1 du code de la santé publique constitue, en vertu du 10° de l'article L. 6241-1 et de l'article L. 6241-2 de ce code, une infraction passible d'une amende administrative. Le I de l'article 7 de l'ordonnance du 13 janvier 2010 prévoit, à titre de dispositions transitoires, que, jusqu'au 31 octobre 2020, un laboratoire de biologie médicale privé doit, pour fonctionner, détenir, s'il n'est pas accrédité, l'autorisation administrative prévue antérieurement à cette ordonnance au premier alinéa de l'article L. 6211-2 du code de la santé publique, cette autorisation pouvant être retirée lorsque les conditions de sa délivrance cessent d'être remplies et produisant ses effets, selon le II du même article, jusqu'à l'accréditation du laboratoire et au plus tard au 1er novembre 2020. Enfin, le quatrième alinéa du même I de cet article dispose qu' " A compter du 1er novembre 2016, les laboratoires de biologie médicale ne peuvent fonctionner sans disposer d'une accréditation portant sur 50 % des examens de biologie médicale qu'ils réalisent. Toutefois, les laboratoires de biologie médicale qui, au 31 octobre 2016, ont déposé une demande d'accréditation portant sur 50 % des examens de biologie médicale qu'ils réalisent et sur au moins un examen par famille auprès de l'instance nationale d'accréditation mentionnée au I de l'article 137 de la loi n° 008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie sont autorisés à continuer à fonctionner après le 31 octobre 2016 jusqu'à ce que cette instance ait pris une décision sur leur demande, et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2017 ".

3. Il résulte de l'instruction devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris que le laboratoire de biologie médicale Philippe Auguste, qui avait été autorisé à fonctionner par décision du 11 février 2016 du directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, a vu sa demande d'accréditation rejetée le 22 décembre 2017 par le directeur général du comité français d'accréditation. En vertu des dispositions citées au point précédent, ce laboratoire ne pouvait légalement continuer à fonctionner à compter de cette date, faute de disposer d'une accréditation portant sur 50 % des examens de biologie médicale qu'il réalise. Dans ces conditions, le retrait, le 19 janvier suivant, par le directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, de l'autorisation de fonctionner qu'il avait précédemment accordée à ce laboratoire dans l'attente de son accréditation, à supposer même qu'il n'ait pas été imposé par le refus d'accréditation, n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, de nature à caractériser la condition d'urgence particulière prévue par l'article L. 521-2 du code de justice administrative, qui supposerait que la suspension demandée de l'exécution de l'acte litigieux soit de nature à sauvegarder, dans un délai de quarante-huit heures, la liberté fondamentale à laquelle il est allégué qu'il porte une atteinte grave et manifestement illégale.

4. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande et il y a lieu de rejeter sa requête selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du même code.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la société Laboratoire Philippe Auguste est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Laboratoire Philippe Auguste.

Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé et à l'agence régionale de santé d'Ile-de-France.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 12 mar. 2018, n° 418557
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE

Origine de la décision
Date de la décision : 12/03/2018
Date de l'import : 20/03/2018

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 418557
Numéro NOR : CETATEXT000036715419 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2018-03-12;418557 ?
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