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28/02/2018 | FRANCE | N°418194

France | France, Conseil d'État, 28 février 2018, 418194


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 27 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Aude a décidé sa remise aux autorités allemandes responsables de l'examen de sa demande d'asile et, en second lieu, d'enjoindre au préfet de l'Aude, d'une part, d'enregistrer et d'instruire sa demande d'asile et, d'autre part, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jus

qu'à ce qu'il soit définitivement statué sur sa demande. Par une ord...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 27 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Aude a décidé sa remise aux autorités allemandes responsables de l'examen de sa demande d'asile et, en second lieu, d'enjoindre au préfet de l'Aude, d'une part, d'enregistrer et d'instruire sa demande d'asile et, d'autre part, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur sa demande. Par une ordonnance n° 1800536 du 9 février 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Par une requête, enregistrée le 15 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros à verser à son avocat, MeC..., au titre des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de son désistement du bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- sa demande est recevable en ce que l'inexécution de l'arrêté de transfert du 27 septembre 2017 dans le délai de six mois au terme duquel la France est devenue responsable de sa demande d'asile, constitue une circonstance nouvelle survenue depuis l'édiction de cet arrêté ;

- la condition d'urgence est remplie dès lors que l'arrêté contesté est en cours d'exécution et qu'il pourrait faire l'objet de mesures coercitives à la suite de sa convocation en préfecture le 16 février 2018 ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit d'asile, dans la mesure où n'ayant pas fait l'objet d'un transfert dans les six mois à compter de la décision tacite de l'Allemagne de prise en charge de sa demande d'asile, seule la France est, en vertu du règlement Dublin III du 26 juin 2013, responsable de sa demande d'asile ;

- le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que le requérant avait pris la fuite dès lors qu'il ne répondait pas aux convocations du préfet, alors que celles-ci ne lui avaient pas été délivrées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2018, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut, d'une part, au non-lieu à statuer sur la requête dès lors qu'elle a perdu son objet, M. B...étant invité à enregistrer sa demande d'asile le 2 mars 2018 et, d'autre part, au rejet du surplus de ses conclusions.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 26 février 2018, M. B...indique qu'il n'y a plus lieu à statuer sur ses conclusions à fin d'injonction mais maintient ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 relative à l'accueil des demandeurs d'asile ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M.B..., d'autre part, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur ;

Vu la lettre informant les parties de la radiation de l'affaire du rôle de l'audience publique du 27 février 2018 ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".

2. Le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié. S'il implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit, en principe, autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'article L. 742-3 de ce code prévoit que l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat puisse faire l'objet d'un transfert vers l'Etat qui est responsable de cet examen en application des dispositions du règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Ce transfert peut avoir lieu pendant une période de six mois à compter de l'acceptation de la demande de prise en charge, susceptible d'être portée à douze ou dix-huit mois dans les conditions prévues à l'article 29 de ce règlement si l'intéressé " prend la fuite ", cette notion devant s'entendre comme visant le cas où un ressortissant étranger non admis au séjour se serait soustrait de façon intentionnelle et systématique au contrôle de l'autorité administrative en vue de faire obstacle à une mesure d'éloignement le concernant.

3. M.B..., ressortissant somalien, relève appel de l'ordonnance du 9 février 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, en premier lieu, à suspendre l'exécution de l'arrêté du 27 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Aude a décidé sa remise aux autorités allemandes responsables de l'examen de sa demande d'asile et, en second lieu, à enjoindre au préfet de l'Aude, d'une part, d'enregistrer et d'instruire sa demande d'asile et, d'autre part, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur sa demande.

4. Toutefois, le 22 février 2018, soit postérieurement à l'introduction de sa requête, le préfet de l'Aude a convoqué M. B...le 2 mars 2018 en vue, d'une part, d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale et, d'autre part, de lui délivrer l'attestation de demandeur d'asile afférente. Dans ces conditions, les conclusions d'appel de M. B... tendant à ce que le juge des référés fasse usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, pas lieu d'y statuer.

5. S'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'admettre provisoirement M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle, il y a lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions qu'il a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de ces dispositions.

O R D O N N E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B...dirigées contre l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier du 9 janvier 2018 et tendant à ce que le juge des référés fasse usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à M. B...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 418194
Date de la décision : 28/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 fév. 2018, n° 418194
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP KRIVINE, VIAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:418194.20180228
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