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02/11/2016 | FRANCE | N°404581

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 02 novembre 2016, 404581


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 19 et 25 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au juge des référés du Conseil d'Etat d'ordonner sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1) de suspendre l'exécution de la décision du jury du concours de recrutements de magistrats du second grade de la hiérarchie judiciaire prononçant l'exclusion, au titre de la session 2016 du concours complémentaire, du requérant lors d'une séance " disciplinaire " qu

i s'est tenue dans les locaux de l'Ecole Nationale de la Magistrature le 17...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 19 et 25 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au juge des référés du Conseil d'Etat d'ordonner sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1) de suspendre l'exécution de la décision du jury du concours de recrutements de magistrats du second grade de la hiérarchie judiciaire prononçant l'exclusion, au titre de la session 2016 du concours complémentaire, du requérant lors d'une séance " disciplinaire " qui s'est tenue dans les locaux de l'Ecole Nationale de la Magistrature le 17 octobre 2016 ;

2) d'enjoindre à l'Ecole nationale de la magistrature de lui fournir les copies notées sans altération ni modification ;

3) de prendre toute mesure utile afin de préserver ses droits ;

3) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est remplie, dès lors que la décision contestée préjudicie de manière grave et immédiate à sa situation en ce que, d'une part, les épreuves d'admissibilité commencent le 7 novembre 2016 et que, d'autre part, elle emporte un caractère irréversible et des conséquences pécuniaires non négligeables ;

- il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ;

- elle est entachée d'incompétence ;

- elle méconnaît le principe d'impartialité, le principe de légalité des délits et des peines et le principe d'égalité ;

- la décision litigieuse est entachée d'une dénaturation des faits ;

- la décision est fondée sur une discrimination à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2016, l'Ecole nationale de la magistrature soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et que les moyens soulevés ne sont pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance organique n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

- l'arrêté du 22 novembre 2001 relatif aux concours de recrutement de magistrats prévus par l'article 21-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

- Vu le décret du 22 novembre 2001 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M.B..., d'autre part, l'Ecole nationale de la magistrature ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 2 novembre 2016 à 14 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :

- M.B... ;

- la représentante de l'Ecole nationale de la magistrature ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. M. A...B...a été admis à concourir et à participer aux épreuves du concours de recrutement de magistrats de second grade de la hiérarchie judiciaire de l'Ecole nationale de la magistrature des 7, 8 et 9 septembre 2016. Lors de la dernière épreuve qui s'est tenue le 9 septembre 2016, le requérant, après avoir rendu sa copie, n'a pas été en mesure d'émarger malgré des demandes insistantes en ce sens auprès du personnel de surveillance du concours. Ne pouvant émarger, il a quitté la salle après avoir attendu 20 minutes. Dans un temps rapproché, M. B...a adressé ses excuses, par courriels, au service chargé de l'organisation du concours. Par lettre du 16 septembre 2016, le requérant a été informé qu'il était poursuivi pour manquement à la discipline du concours et qu'il était convoqué le 17 octobre 2016 à 9 heures à Bordeaux afin de faire valoir ses explications devant le jury. Ce courrier était accompagné d'un procès-verbal d'incident indiquant que " le requérant a refusé d'émarger lors de la restitution des copies, estimant avoir suffisamment attendu ". A l'issue de cette convocation et de l'audition de M. B..., le jury a prononcé son exclusion dudit concours. M. B...a été oralement informé de cette décision par la présidente du jury. Elle lui a, par la suite, été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception signée par la présidente du jury le 19 octobre 2016.

3. M. B...soutient que le jury qui l'a exclu du concours était irrégulièrement composé faute que sa présidente fût un magistrat hors hiérarchie en activité à la cour de cassation. Cependant il résulte, d'une part, des dispositions de l'article R 111-5 du code de l'organisation judiciaire que l'autorité désignant les membres d'un jury peut faire porter son choix sur un magistrat honoraire, et, d'autre part, que ceux-ci, en application de l'article 78 de l'ordonnance organique continuent après leur mise en retraite à être attachés à la juridiction à laquelle ils appartenaient. Dès lors, le moyen tiré de ce que la désignation de Mme C..., magistrat honoraire à la cour de cassation serait intervenue en méconnaissance des dispositions du décret du 22 novembre 2001 dont l'article 3 prévoit que la présidence du jury de recrutement à l'Ecole nationale de la magistrature est confiée à un magistrat hors hiérarchie à la cour de cassation ne peut être regardé comme sérieux. La circonstance que la présidente tienne des fonctions dans le collège d'une autorité administrative indépendante est sans incidence sur cette appréciation.

4. La présence de personnels de l'Ecole nationale de la magistrature assurant le secrétariat du jury lors de l'audition de M. B...par ce dernier n'a pu, par elle-même, dès lors qu'il n'est pas soutenu que la décision du jury n'aurait pas été effectivement prise par lui, vicier la régularité de la procédure suivie. La brièveté alléguée de l'audition opérée n'est pas plus de nature à affecter cette régularité dès lors que l'intéressé ne conteste pas avoir pu exposer librement les faits et arguments qu'il entendait porter à la connaissance du jury, ni n'allègue avoir été empêché de présenter des observations écrites ou d'être accompagné d'un conseil, la seule circonstance que ces droits légaux ne lui aient pas été expressément rappelés n'ayant pu affecter la régularité de son audition ni entacher la procédure suivie d'irrégularité. Les moyens d'irrégularité de la procédure ne sont donc pas plus sérieux.

5. Contrairement à ce que soutient l'intéressé, la sanction qui lui a été infligée est la première d'une échelle qui en comporte trois. Son principe n'est pas, en l'espèce et aux regards des objectifs poursuivis, disproportionné. L'intéressé ne pouvait méconnaître l'existence d'une obligation d'émargement, rappelée par de nombreux documents d'information, et mettant en oeuvre l'obligation faite à tout candidat par le 6e alinéa de l'arrêté du 22 novembre 2001 de se soumettre à toutes " vérifications nécessaires " sous peine de sanction. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de légalité des peines et de proportionnalité, s'agissant de sanctions administratives portant sur le comportement d'un candidat admis à concourir ne peut être regardé comme sérieux.

6. Il ne ressort pas du dossier que la mention du procès verbal d'incident en décrivant les faits comme un refus du requérant de signer la liste d'émargement après le dépôt de sa copie serait entachée d'une erreur matérielle.

7. M. B...soutient qu'il a été l'objet d'une discrimination mais n'assortit pas cette affirmation des précisions qui permettraient d'en apprécier la portée et par suite le sérieux du moyen qu'il en tire.

8. Enfin, la présidente du jury tenait de ses fonctions le pouvoir non de prendre la décision de sanction, dont il n'est pas contesté qu'elle a bien été prise par l'ensemble du jury en ayant délibéré, mais de notifier celle-ci à l'intéressé, qui ne peut en tout état de cause soutenir sérieusement que la signature de la lettre l'en informant par la seule présidente vicierait la régularité de la procédure suivie.

9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la question de l'urgence, que la requête ainsi que les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peut, qu'être rejetée.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A...B...et à l'Ecole Nationale de la Magistrature.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 404581
Date de la décision : 02/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 02 nov. 2016, n° 404581
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:404581.20161102
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