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23/06/2016 | FRANCE | N°378008

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 23 juin 2016, 378008


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2002 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0907034 du 10 mars 2011, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 11VE01848 du 6 février 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé contre ce jugement par M.A.dans le patrimoine du contribuable)

Par un po

urvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril et 18 juille...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2002 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0907034 du 10 mars 2011, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 11VE01848 du 6 février 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé contre ce jugement par M.A.dans le patrimoine du contribuable)

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril et 18 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le Traité instituant la Communauté européenne ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ses protocoles additionnels n°1 et n° 4 ;

- la convention entre la République française et la Confédération suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune du 9 septembre 1966 ;

- l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, fait à Luxembourg le 21 juin 1999 ;

- l'arrêt C-470/04 du 7 septembre 2006 de la Cour de justice des Communautés européennes ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., fondateur et dirigeant du groupe Buffalo Grill, a transféré son domicile en Suisse le 7 juin 2002 et est devenu résident de cet Etat ; qu'il a déclaré, conformément à l'article 167 bis du code général des impôts, une plus-value latente constatée sur des titres qu'il détenait dans la société SAIP et a obtenu un sursis de paiement de l'imposition correspondante ; qu'il a cédé ces titres en 2005 ; qu'à la suite d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'administration a rehaussé le montant de cette plus-value et mis à sa charge, au titre de l'année 2002, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de pénalités ; que M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 février 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 10 mars 2011 rejetant sa demande en décharge de ces impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 167 bis du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur en 2002 : " I. 1. Les contribuables fiscalement domiciliés en France pendant au moins six années au cours des dix dernières années sont imposables, à la date du transfert de leur domicile hors de France, au titre des plus-values constatées sur les droits sociaux mentionnés à l'article 150-0 A et détenus dans les conditions du f de l'article 164 B (...) / II. 1. Le paiement de l'impôt afférent à la plus-value constatée peut être différé jusqu'au moment où s'opérera la transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation des droits sociaux concernés. (...) / 3 (...) L'impôt acquitté localement par le contribuable et afférent à la plus-value effectivement réalisée hors de France est imputable sur l'impôt sur le revenu établi en France à condition d'être comparable à cet impôt (...) / III. A l'expiration d'un délai de cinq ans suivant la date du départ ou à la date à laquelle le contribuable transfère de nouveau son domicile en France si cet évènement est antérieur, l'impôt établi en application du I est dégrevé d'office en tant qu'il se rapporte à des plus-values afférentes aux droits sociaux qui, à cette date, demeurent dans le patrimoine du contribuable)(... " ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt en ce qui concerne la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ;

4. Considérant que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, compte tenu de l'objet et de la portée de l'article 167 bis du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur et de la marge d'appréciation dont disposent les Etats en cette matière, l'imposition des plus-values latentes à la date du transfert du domicile fiscal hors de France, assortie de la faculté de différer le paiement de cette imposition jusqu'à la transmission, au rachat, au remboursement ou à l'annulation des droits sociaux concernés, et alors même que ce sursis de paiement est subordonné à l'obligation de constituer des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor, ne porte pas atteinte au droit au respect des biens protégé par ces stipulations ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens de ces stipulations, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ;

6. Considérant qu'en jugeant que l'article 167 bis du code général des impôts ne pouvait être regardé comme incompatible avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, combinées avec l'article 1er de son premier protocole additionnel, au motif qu'il ne permet pas aux contribuables qui s'installent dans un Etat tiers à l'Union européenne de bénéficier d'un dégrèvement auquel peuvent prétendre des contribuables qui s'installent dans un Etat membre de l'Union européenne à la suite de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 11 mars 2004, les ressortissants des Etats tiers et ceux de l'Union européenne ne se trouvant pas dans une situation analogue, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 2-2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien " ;

8. Considérant que l'article 167 bis du code général des impôts prévoyait l'imposition immédiate, en cas de transfert du domicile fiscal du contribuable hors de France, des plus-values constatées sur les valeurs mobilières qu'il détenait lorsque l'ensemble des droits détenus par sa famille et lui-même dans les bénéfices d'une société avait dépassé 25 % de ces bénéfices au cours des cinq années précédentes ; que cet article n'avait ni pour objet, ni pour effet, de soumettre à de quelconques restrictions ou conditions l'exercice effectif, par les personnes qu'elles visent, de la liberté d'aller et venir, et notamment de quitter le territoire pour s'installer dans un autre Etat ; que, par suite, en jugeant que l'article 167 bis ne méconnaissait pas l'article 2-2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

9. Considérant, en dernier lieu, que M. A...n'a pas soulevé devant la cour le moyen tiré de ce que l'article 167 bis du code général des impôts méconnaîtrait les stipulations de l'article 14 de la convention combinées avec celles de l'article 2-2 de son protocole additionnel n° 4 ; que le moyen tiré de ce que la cour aurait insuffisamment motivé son arrêt en ne répondant pas à ce moyen ne peut donc qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt en ce qui concerne la convention fiscale conclue entre la France et la Suisse en date du 9 septembre 1966 :

10. Considérant qu'aux termes du 4 de l'article 4 de la convention fiscale conclue entre la France et la Suisse en date du 9 septembre 1966 : " Lorsqu'une personne physique a transféré définitivement son domicile d'un Etat contractant dans l'autre, elle cesse d'être assujettie dans le premier Etat aux impôts pour lesquels le domicile fait règle dès l'expiration du jour où s'est accompli le transfert du domicile. L'assujettissement aux impôts pour lesquels le domicile fait règle commence dans l'autre Etat à compter de la même date " ; qu'aux termes du 5 de l'article 15 de cette même convention : " Les gains provenant de l'aliénation de tous biens autres que ceux qui sont mentionnés aux paragraphes 1, 2 et 3 ne sont imposables que dans l'Etat dont le cédant est un résident " ;

11. Considérant que les stipulations du 5 de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse qui réservent à l'Etat de résidence l'imposition des plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières, qui ne relèvent pas du 2 ou du 3 de cet article, ne font pas obstacle à ce qu'une personne ayant son domicile fiscal en France soit imposée sur les plus-values constatées lorsqu'elle transfère son domicile fiscal hors de France ; que, par suite, M. A...qui, en application du 4 de l'article 4 de cette même convention, conservait la qualité de résident de France jusqu'à l'expiration du jour où s'est accompli le transfert de son domicile en Suisse, n'est pas fondé à soutenir que la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, a commis une erreur de droit en jugeant que l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse ne faisait pas obstacle à l'imposition de ses plus-values latentes ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt en ce qui concerne l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part :

12. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne, repris à l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " (...) les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans le territoire d'un autre Etat membre sont interdites. Cette interdiction s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un Etat membre établis sur le territoire d'un Etat membre " ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article 1 de l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, fait à Luxembourg le 21 juin 1999 : " L'objectif de cet accord, en faveur des ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne et de la Suisse, est : / a) d'accorder un droit d'entrée, de séjour, d'accès à une activité économique salariée, d'établissement en tant qu'indépendant et le droit de demeurer sur le territoire des parties contractantes (...) " ; que l'article 4 du même accord stipule que : " Le droit de séjour et d'accès à une activité économique est garanti sous réserve des dispositions de l'article 10 et conformément aux dispositions de l'annexe I " ; qu'aux termes de l'article 6 de ce même accord : " Le droit de séjour sur le territoire d'une partie contractante est garanti aux personnes n'exerçant pas d'activité économique selon les dispositions de l'annexe I relatives aux non actifs " ; que selon l'article 12 de l'annexe I de cet accord, un indépendant est une personne " désirant s'établir sur le territoire d'une autre partie contractante en vue d'exercer une activité non salariée " ; qu'enfin, l'article 16 de cet accord, intitulé "référence au droit communautaire", stipule que : " 1. Pour atteindre les objectifs visés par le présent accord, les parties contractantes prendront toutes les mesures nécessaires pour que les droits et obligations équivalant à ceux contenus dans les actes juridiques de la Communauté européenne auxquels il est fait référence trouvent application dans leurs relations. / 2. Dans la mesure où l'application du présent accord implique des notions de droit communautaire, il sera tenu compte de la jurisprudence pertinente de la Cour de justice des Communautés européennes antérieure à la date de sa signature. La jurisprudence postérieure à la date de la signature du présent accord sera communiquée à la Suisse. En vue d'assurer le bon fonctionnement de l'accord, à la demande d'une partie contractante, le comité mixte déterminera les implications de cette jurisprudence " ;

14. Considérant que M. A...a soutenu devant la cour administrative d'appel qu'il était fondé à se prévaloir, en tant qu'indépendant, du droit d'établissement garanti par l'accord du 21 juin 1999, dès lors qu'il s'était établi en Suisse pour y exercer une activité économique en tant qu'indépendant, consistant dans la gestion de ses diverses participations, directes ou indirectes, dans plusieurs sociétés qu'il contrôlait ; qu'il faisait valoir qu'à la date de son départ, il avait des participations substantielles dans plusieurs sociétés de droit français, dont la société Soframotel, dont il détenait 89 % des actions, et la société SAIP, dont il possédait 99 % des actions et qui était elle-même la société holding de la société Buffalo Grill à 49,84 % ; qu'il détenait, par ailleurs, à titre personnel des actions de cette dernière société, ce qui lui conférait de manière directe et indirecte un pouvoir de contrôle sur celle-ci ;

15. Considérant que la cour a d'abord jugé, reprenant les termes de la décision n° 357576 du 29 avril 2013 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, qui concernait les impositions primitives dont M. A...avait fait l'objet au titre de la plus-value mentionnée au point 1 alors qu'il ne soutenait pas avoir l'intention d'exercer une quelconque activité économique ou salariée en Suisse, que les stipulations de l'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne, qui s'opposent à l'institution, par un Etat membre de l'Union européenne, de règles qui auraient pour effet d'entraver la liberté d'établissement de certains de ses ressortissants sur le territoire d'un autre Etat membre, ne peuvent être utilement invoquées par un contribuable ayant établi son domicile fiscal en dehors de l'Union européenne et que la Confédération suisse n'ayant pas adhéré au marché intérieur de l'Union, l'interprétation du droit de l'Union concernant la liberté d'établissement ne peut être automatiquement transposée à l'interprétation de l'accord du 21 juin 1999, en l'absence de stipulation expresse à cet effet dans l'accord lui-même ; qu'elle a ensuite jugé par un arrêt suffisamment motivé sur ce point que M. A..., en se bornant à indiquer qu'il détenait des participations substantielles dans plusieurs sociétés françaises, dont la société SAIP, au jour de son départ, et qu'il possédait encore ces titres, ne justifiait pas qu'il aurait transféré son domicile en Suisse pour y exercer une activité professionnelle et qu'il ne pouvait, dès lors, soutenir que l'article 167 bis du code général des impôts méconnaîtrait le principe de la liberté d'établissement prévu par l'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne que les stipulations de l'accord du 21 juin 1999 auraient, selon ses allégations, rendu applicable aux relations entre la France et la Suisse ; qu'elle a également suffisamment motivé son arrêt en ce qui concerne les modalités de calcul de la valeur vénale des titres ;

16. Considérant que, par l'arrêt du 7 septembre 2006, rendu dans l'affaire C-470/04, concernant un ressortissant des Pays-Bas ayant transféré son domicile de cet Etat au Royaume-Uni et qui était, au moment de ce transfert, l'actionnaire unique de trois sociétés à responsabilité limitée de droit néerlandais, la Cour de justice des Communautés européennes a jugé que peut se prévaloir de l'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne un ressortissant communautaire qui réside, depuis le transfert de son domicile, dans un Etat membre et qui détient la totalité des actions de sociétés établies dans un autre État membre ; que, par ce arrêt, la Cour a également jugé que cet article doit être interprété en ce sens que, en cas de transfert du domicile d'un contribuable hors de cet État membre, il s'oppose à ce qu'un État membre institue un régime d'imposition des plus-values qui conditionne l'octroi du sursis de paiement de cet impôt à la constitution de garanties et qui ne tient pas entièrement compte des moins-values susceptibles de se produire ultérieurement au transfert de domicile de l'intéressé et non prises en compte par l'Etat membre d'accueil ;

17. Considérant qu'il convient de déterminer, avant de statuer sur le pourvoi de M. A..., si :

1° le droit d'établissement en tant qu'indépendant, tel qu'il est défini par les articles 1 et 4 de l'accord du 21 juin 1999 et par l'article 12 de son annexe I, peut être regardé comme équivalent à la liberté d'établissement garantie aux personnes ayant une activité non salariée par l'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne devenu l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

2° dans cette hypothèse, compte tenu des stipulations de l'article 16 de l'accord, il y aurait lieu d'appliquer la jurisprudence issue de l'arrêt C-470/04 du 7 septembre 2006, postérieure à cet accord, dans l'hypothèse d'un ressortissant d'un Etat membre ayant transféré son domicile en Suisse qui se borne à conserver les participations qu'il détenait dans des sociétés relevant du droit de cet Etat membre, lesquelles lui confèrent une influence certaine sur les décisions de ces sociétés et lui permettent d'en déterminer les activités, sans soutenir envisager d'exercer en Suisse une activité indépendante différente de celle qu'il exerçait dans l'Etat membre dont il était le ressortissant et consistant en la gestion de ces participations ;

3° dans l'hypothèse où ce droit ne serait pas équivalent à la liberté d'établissement, il devrait être interprété de la même manière que la Cour de justice de l'Union européenne l'a fait pour la liberté d'établissement dans son arrêt C-470/04 du 7 septembre 2006 ;

18. Considérant que ces questions sont déterminantes pour la solution du litige que doit trancher le Conseil d'Etat ; qu'elles présentent une difficulté sérieuse ; qu'il y a lieu, par suite, d'en saisir la Cour de justice de l'Union européenne en application de l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, jusqu'à ce que celle-ci se soit prononcée, de surseoir à statuer sur le pourvoi de M.A... ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il est sursis à statuer sur le pourvoi de M. A...jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne se soit prononcée sur les questions préjudicielles suivantes :

" 1° Le droit d'établissement en tant qu'indépendant, tel qu'il est défini par les articles 1 et 4 de l'accord du 21 juin 1999 et par l'article 12 de son annexe I, peut-il être regardé comme équivalent à la liberté d'établissement garantie aux personnes ayant une activité non salariée par l'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne devenu l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne '

2° dans cette hypothèse, compte tenu des stipulations de l'article 16 de l'accord, y aurait-il lieu d'appliquer la jurisprudence issue de l'arrêt C-470/04 du 7 septembre 2006, postérieure à cet accord, dans l'hypothèse d'un ressortissant d'un Etat membre ayant transféré son domicile en Suisse qui se borne à conserver les participations qu'il détenait dans des sociétés relevant du droit de cet Etat membre, lesquelles lui confèrent une influence certaine sur les décisions de ces sociétés et lui permettent d'en déterminer les activités, sans soutenir envisager d'exercer en Suisse une activité indépendante différente de celle qu'il exerçait dans l'Etat membre dont il était le ressortissant et consistant en la gestion de ces participations '

3° dans l'hypothèse où ce droit ne serait pas équivalent à la liberté d'établissement, devrait-il être interprété de la même manière que la Cour de justice de l'Union européenne l'a fait pour la liberté d'établissement dans son arrêt C-470/04 du 7 septembre 2006 ' "

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M.A..., au ministre des finances et des comptes publics et au président de la Cour de justice de l'Union européenne.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 378008
Date de la décision : 23/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2016, n° 378008
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Karin Ciavaldini
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:378008.20160623
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