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25/03/2016 | FRANCE | N°397661

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 25 mars 2016, 397661


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité (FPACS), représentée par son président, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 21 décembre 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social portant extension d'un accord conclu le 5 ma

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Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité (FPACS), représentée par son président, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 21 décembre 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social portant extension d'un accord conclu le 5 mai 2015 dans le cadre de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie, dès lors que l'arrêté litigieux, en mettant à la charge des agents cynophiles une contribution nouvelle avec un préfinancement sur six mois, préjudicie de manière grave et immédiate à leurs intérêts, notamment financiers ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté ;

- il est entaché d'irrégularité dès lors qu'il ne comporte pas la signature de son auteur ;

- il méconnaît la liberté contractuelle protégée par la Constitution et le droit de l'Union européenne en matière de concurrence en imposant aux agents cynophiles de recourir à un assureur qu'il désigne, sans avoir procédé à une véritable mise en concurrence avant de le choisir ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 912-1 du code de sécurité sociale qui, d'une part, imposent un appel à concurrence préalable, d'autre part, interdisent les clauses de désignation, enfin, proscrivent les clauses de refus d'adhésion ;

- il méconnaît le principe d'égalité entre agents en faisant dépendre les obligations de remboursement à la charge de l'employeur du temps de travail de l'agent au sein de l'entreprise.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2016, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et qu'aucun des moyens soulevés par la fédération requérante n'est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée.

La requête a été communiquée à l'Union des entreprises de la sécurité privée, au Syndicat national des entreprises de sécurité, au Syndicat national des employés de la prévention sécurité - CFTC, à la Fédération du commerce, de la distribution et des services - CGT ainsi qu'à la société HD-Courtage et à la société Vetassur.

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité, d'autre part, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, ainsi que l'Union des entreprises de la sécurité privée, le Syndicat national des entreprises de sécurité, le Syndicat national des employés de la prévention sécurité - CFTC, la Fédération du commerce, de la distribution et des services - CGT ainsi que la société HD Courtage et la société Vetassur ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 18 mars 2016 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Coudray, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité ;

- les représentants de la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité ;

- les représentants de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

- Me Blancpain, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'Union des entreprises de la sécurité privée ;

- le représentant de l'Union des entreprises de la sécurité privée ;

- le représentant de la société HD Courtage ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction jusqu'au mardi 22 mars 2016 à 14 heures ;

Par une mesure d'instruction supplémentaire, le juge des référés a demandé, à l'issue de l'audience, aux parties de produire, d'une part, l'ancien article 7 de l'accord avant sa modification du 5 mai 2015 et, d'autre part, des éléments permettant d'apprécier la rémunération perçue par les agents, notamment ceux travaillant à temps partiel, et les contraintes à leur charge.

Par deux mémoires, enregistrés les 18 et 21 mars 2016, l'Union des entreprises de sécurité privée conclut au rejet de la requête et produit un exemplaire complet de l'accord avant sa modification du 5 mai 2015, ainsi qu'un extrait du rapport de branche de septembre 2015 sur la rémunération des agents de sécurité cynophiles.

Par un mémoire, enregistré le 21 mars 2016, la Fédération professionnelle des agents cynophiles en sécurité persiste dans ses écritures.

Par un mémoire de production et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 et 21 mars 2016, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social maintient ses conclusions à fin de rejet de la requête et produit l'article 7 de la convention dans sa rédaction antérieure à la modification.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 21 mars 2016, la FPACS reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens. Elle soutient en outre que l'accord, qui ne prévoit qu'une protection très partielle au profit des animaux tant au regard de l'âge du chien que des risques de santé effectivement couverts, soumet son bénéfice à des conditions qui vont au-delà de ce que les textes exigent et reporte sur les salariés des charges financières difficilement supportables pour eux alors qu'elles devraient incomber aux seuls employeurs.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le code du travail ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 ;

- la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985, étendue par arrêté du 25 juillet 1985 ;

- l'accord du 5 mai 2015 portant sur les conditions d'exercice de l'emploi d'agent cynophile dans le cadre de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité ;

- l'arrêté du 21 décembre 2015 portant extension de l'accord du 5 mai 2015 ;

- le code de justice administrative ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné notamment à une condition d'urgence ; que l'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;

2. Considérant que l'accord du 5 mai 2015 à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, relatif aux conditions d'exercice de l'emploi d'agent de sécurité cynophile et étendu par l'arrêté du 21 décembre 2015 du ministre du travail de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, a notamment pour objet d'instaurer un régime d'assurance-mutuelle destiné à couvrir les frais de santé du chien ; qu'il prévoit à son article 3 que ce régime d'assurance, dont les prestations sont précisées dans des annexes de l'accord, est souscrit, auprès de l'organisme désigné en annexe de cet accord, par chaque agent cynophile qui s'acquitte de la prime d'assurance, laquelle fait l'objet d'une contribution de l'employeur dans des conditions définies par l'article 7 de la convention collective nationale, tel que modifié par l'article 5 de l'accord ; que l'article 7.1 de la convention collective nationale, modifié par cet accord, prévoit que chaque agent bénéficie d'une indemnité forfaire correspondant à l'amortissement des dépenses d'entretien, de matériel canin et de santé du chien d'un montant de 1,13 euro par heure de vacation effectuée par l'équipe homme-chien ; que son article 7.2 précise que le versement de cette indemnité est subordonné à la justification par l'agent de sécurité, chaque semestre, du paiement biannuel de la prime auprès du gestionnaire du régime d'assurance-mutuelle ;

3. Considérant que, pour justifier de l'urgence qui s'attacherait à la suspension de l'exécution de cet arrêté, la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité (FPACS) invoque le préjudice financier qui résulte pour les agents de sécurité cynophiles de l'obligation que l'accord du 5 mai 2015 étendu fait peser sur eux de faire l'avance, chaque semestre, de la prime biannuelle d'assurance-mutuelle dont le montant ne leur est intégralement remboursé par leur employeur qu'à la fin du semestre et pour autant qu'ils travaillent pendant un nombre d'heures au moins égal à 1 645 heures par an alors qu'en principe, les frais exposés par un salarié pour les besoins de l'entreprise doivent lui être intégralement remboursés ;

4. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que le montant annuel de la prime d'assurance s'établit à 331 euros, éventuellement majoré, et qu'ainsi le montant de la prime semestrielle dont chaque agent doit faire l'avance ne dépasse pas 180 euros ; que, dans ces conditions et compte tenu du remboursement mensuel qui intervient au travers de l'indemnité forfaitaire dont le montant a été majoré par l'accord, il n'apparaît pas que cette seule circonstance provoquerait une perte de rémunération telle qu'elle porterait une atteinte grave et immédiate à la situation financière des agents de sécurité cynophiles ; que, dans ces conditions, la condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité des dispositions contestées, la requête de la FPACS doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Fédération professionnelle des acteurs cynophiles en sécurité, à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, à l'Union des entreprises de la sécurité privée, au Syndicat national des entreprises de sécurité, au Syndicat national des employés de la prévention sécurité - CFTC, à la Fédération du commerce, de la distribution et des services - CGT, à la société Vetassur et à la société HD Courtage.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 397661
Date de la décision : 25/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 mar. 2016, n° 397661
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:397661.20160325
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