Vu la procédure suivante :
Par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés les 23 juin, 27 novembre 2015 et 11 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la circulaire du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche n° 2015-057 du 29 avril 2015 relative aux missions et obligations réglementaires de service des enseignants des établissements publics d'enseignement du second degré en tant qu'elle prévoit que, lorsque l'application des pondérations pour le décompte des maxima hebdomadaires de service donne lieu à l'attribution d'au plus 0,5 heure supplémentaire, l'enseignant pourra être tenu d'effectuer, en sus, une heure supplémentaire entière ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le décret n° 2014-940 du 20 août 2014 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
1. Considérant que, pour l'application du décret du 20 août 2014 relatif aux obligations de service et aux missions des personnels enseignants exerçant dans un établissement public d'enseignement du second degré, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a pris, le 29 avril 2015, une circulaire relative aux missions et obligations réglementaires de service de ces enseignants ; que M. B...se borne, par les moyens qu'il invoque, à contester l'interprétation du décret du 20 août 2014 qui figure au dixième alinéa du A du I de cette circulaire, et plus particulièrement la phrase : " Toutefois, lorsque l'application des pondérations donne lieu à l'attribution d'au plus 0,5 heure supplémentaire, l'enseignant pourra être tenu d'effectuer, en sus, une heure supplémentaire entière " ; que, par suite, ses conclusions doivent être regardées comme demandant uniquement l'annulation pour excès de pouvoir de cette phrase ;
2. Considérant que l'article 2 du décret du 20 août 2014 prévoit que les personnels enseignants du second degré doivent assurer, sur l'ensemble de l'année scolaire, un service d'enseignement et des missions liées au service d'enseignement ; que le I de cet article fixe les " maxima hebdomadaires " du service d'enseignement ; que les 1° et 3° de ce I prévoient un maximum de service de quinze heures pour les professeurs agrégés et de dix-huit heures pour les professeurs certifiés ; que les 2° et 4° de ce même I prévoient, pour les professeurs de la discipline d'éducation physique et sportive, un maximum de dix-sept ou vingt heures selon qu'ils sont ou non professeurs agrégés ; que le II de ce même article dispose que : " Les missions liées au service d'enseignement comprennent les travaux de préparation et les recherches personnelles nécessaires à la réalisation des heures d'enseignement, l'aide et le suivi du travail personnel des élèves, leur évaluation, le conseil aux élèves dans le choix de leur projet d'orientation en collaboration avec les personnels d'éducation et d'orientation, les relations avec les parents d'élèves, le travail au sein d'équipes pédagogiques constituées d'enseignants ayant en charge les mêmes classes ou groupes d'élèves ou exerçant dans le même champ disciplinaire (...) " ; qu'aux termes du III de l'article 4 de ce même décret : " Dans l'intérêt du service, les enseignants mentionnés aux 1°, 2°, 3° et 4° du I de l'article 2 du présent décret peuvent être tenus d'effectuer, sauf empêchement pour raison de santé, une heure supplémentaire hebdomadaire en sus de leur maximum de service " ; qu'enfin, pour tenir compte des spécificités de certaines des missions liées au service d'enseignement, les articles 6, 7 et 8 du décret prévoient que, " pour le décompte des maxima de service ", d'une part, " chaque heure d'enseignement réalisée " dans le cycle terminal de la voie générale et technologique ou dans les établissements relevant de l'éducation prioritaire inscrits sur une liste fixée par arrêté, " est affectée d'un coefficient de pondération de 1,1 ", d'autre part, que " chaque heure d'enseignement réalisée dans une section de technicien supérieur ou dans une formation technique supérieure assimilée (...) est affectée d'un coefficient de pondération de 1,25 " ;
3. Considérant que, d'une part, il résulte des articles 6 à 8 du décret du 20 août 2014 et, en particulier, du deuxième alinéa de l'article 6, relatif au décompte des heures d'enseignement dans le cycle terminal de la voie générale et technologique, qui dispose que : " Le service d'enseignement ne peut pas, du fait de cette pondération, être réduit de plus d'une heure par rapport aux maxima de service (...) ", que le mécanisme de pondération prévu par ces articles a pour objet de tenir compte des conditions particulières d'exercice des fonctions exercées par les enseignants dans certains cycles, sections, formations ou établissements en pondérant les heures d'enseignement effectuées tant pour déterminer le nombre d'heures d'enseignement qu'un enseignant est tenu d'accomplir au regard de son maximum de service que pour calculer le montant de la rémunération majorée versée à raison de l'éventuel dépassement de ce maximum ; que, d'autre part, il résulte du III de l'article 4 du même décret que le service d'enseignement qu'un enseignant peut être tenu d'accomplir peut excéder son maximum de service, fixé à l'article 2 du décret, dans la limite d'une heure ; que ces dispositions ne permettent pas d'imposer une heure d'enseignement supplémentaire entière à un enseignant qui accomplit déjà un service d'enseignement dont la durée, compte tenu notamment des pondérations, excède son maximum de service ; que, par suite, les dispositions impératives de la circulaire selon lesquelles, lorsque l'application des pondérations donne lieu à l'attribution d'au plus 0,5 heure supplémentaire, l'enseignant pourra être tenu d'effectuer, en sus, une heure supplémentaire entière, méconnaissent le sens et la portée du III de l'article 4 du décret du 20 août 2014 ; que, dès lors, le requérant est fondé à en demander l'annulation ;
4. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La circulaire n° 2015-057 du 29 avril 2015 du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, relative aux missions et obligations réglementaires de service des enseignants des établissements publics d'enseignement du second degré est annulée en tant qu'elle prévoit, au A de son I : " Toutefois, lorsque l'application des pondérations pour le décompte des maxima hebdomadaires de service donne lieu à l'attribution d'au plus 0,5 heure supplémentaire, l'enseignant pourra être tenu d'effectuer, en sus, une heure supplémentaire entière ".
Article 2 : Les conclusions présentées par M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.