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09/12/2015 | FRANCE | N°367898

France | France, Conseil d'État, 8ème / 3ème ssr, 09 décembre 2015, 367898


Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 19 avril et 16 juillet 2013 et le 10 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Foncière le Charlebourg, dont le siège est 4, rue de Ventadour, à Paris (75001) ; la société foncière le Charlebourg demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12PA00387 du 5 février 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0911961 du 25 octobre 2011 du tribunal administratif de Paris rejeta

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Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 19 avril et 16 juillet 2013 et le 10 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Foncière le Charlebourg, dont le siège est 4, rue de Ventadour, à Paris (75001) ; la société foncière le Charlebourg demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12PA00387 du 5 février 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0911961 du 25 octobre 2011 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2004 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Esther de Moustier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Tiffreau, Marlange, de la Burgade, avocat de la société foncière Le Charlebourg ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Foncière le Charlebourg, qui était détenue à 99 % par la société Property Investment Holding (PIH) France, avait pour activité l'exploitation d'un immeuble situé à La Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine) ; que l'administration a remis en cause la déductibilité des honoraires correspondant à la refacturation partielle des honoraires, versés par la société PIH France à la société de droit néerlandais PIH BV, que la société Foncière le Charlebourg a versés à la société PIH France en vertu d'une convention d'assistance conclue entre les deux sociétés le 16 juillet 2002 ; que si la réintégration de ces honoraires dans les résultats de la société Foncière le Charlebourg a été neutralisée en matière d'impôt sur les sociétés, en raison de son appartenance à un même groupe fiscalement intégré, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont en revanche été réclamés à la société Foncière le Charlebourg au motif que le paiement des honoraires en cause ne correspondait pas à une dépense nécessaire à son exploitation ; que la société Foncière le Charlebourg, aux droits de laquelle est venue la société PIH France, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 février 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, confirmant le jugement du 25 octobre 2011 du tribunal administratif de Paris, a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi mis à sa charge ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens ou services sont nécessaires à l'exploitation. (...) " ; que lorsque l'administration, sur le fondement de ces dispositions, met en cause la déductibilité de la taxe ayant grevé l'acquisition d'un bien ou d'un service, il lui appartient, lorsqu'elle a mis en oeuvre la procédure de redressement contradictoire et que le contribuable n'a pas accepté le redressement qui en découle, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour soutenir que le bien ou le service acquis n'était pas nécessaire à l'exploitation ;

3. Considérant que la cour a relevé que la société Foncière le Charlebourg avait conclu avec la société PIH France le 16 juillet 2002 une convention de gestion portant sur la fourniture par la société PIH France de prestations, d'une part, d'assistance administrative et financière, relatives aux relations avec les banques, au contrôle et à la gestion de la trésorerie, à la supervision et à l'assistance des services comptables et administratifs et aux relations avec les administrations et organismes sociaux, d'autre part, d'assistance dans les relations avec le gestionnaire, couvrant la définition des travaux à effectuer, l'établissement des budgets de travaux, la définition des conditions de locations et le choix des locataires ; que la cour a également relevé que la société PIH France avait ensuite conclu le 23 novembre 2002 avec la société PIH BV une convention d'assistance portant, en contrepartie du versement annuel d'honoraires de 200 000 euros hors taxe, sur la fourniture par cette dernière à la société PIH France de prestations d'assistance au développement et d'assistance administrative et financière ; qu'elle a encore relevé que la société de droit britannique EPIC facturait à la société PIH BV, au titre des prestations de stratégie d'investissement, les dépenses effectuées notamment par son dirigeant M. B...et que la société Larix facturait à la société PIH BV en vertu d'une convention de " management agreement " du 18 octobre 2000 des prestations de nature administrative, juridique, comptable et financière et qu'il n'était pas contesté que ces prestations étaient refacturées à la société française par la société PIH BV ;

4. Considérant qu'après avoir relevé que la société avait recours à des prestataires extérieurs pour la tenue de la comptabilité et le conseil juridique et qu'il ressortait des pièces du dossier que les prestations réalisées par la société-mère de la société Larix, la société Vistra, consistaient à assurer le développement du groupe dans différents pays, dont la France, à optimiser la gestion de la trésorerie du groupe, à coordonner l'activité des filiales et à contrôler la tenue de la comptabilité, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits en jugeant que ces pièces, qu'elle n'a pas dénaturées, ne permettaient pas de regarder ces prestations comme étant réalisées dans le seul intérêt de l'entreprise PIH France ou de ses filiales ;

5. Considérant, en revanche, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les prestations facturées par la société PIH BV à la société PIH France, qui présentaient un intérêt pour l'exploitation propre de cette dernière, ne pouvaient être réalisées ni par son unique salariée, employée à temps partiel pour assurer essentiellement des fonctions de représentation, ni par les prestataires extérieurs, la société Saggel Gestion, le cabinet NSK et Me A..., auxquels étaient confiées des prestations distinctes des prestations visées par la convention d'assistance ; qu'en outre, la société requérante faisait valoir que la société EPIC fournissait des prestations pour le choix des investissements, des travaux à effectuer et le moment où vendre les actifs immobiliers ; que, par suite, en estimant au seul motif que la société requérante ne produisait pas la convention conclue entre la société PIH BV et la société EPIC définissant les prestations réalisées par celle-ci, que cette dernière ne réalisait pas de prestations d'assistance au profit de la société française mais en contrôlait seulement les décisions stratégiques, et en en déduisant qu'il n'était pas établi que ces prestations étaient réalisées dans l'intérêt de l'exploitation de la société Foncière le Charlebourg et que le paiement par cette dernière des honoraires en litige l'avait ainsi conduite à prendre en charge les frais du contrôle assuré sur sa propre gestion par sa société mère néerlandaise, la cour a entaché de dénaturation l'appréciation qu'elle a portée sur les faits de l'espèce ;

6. Considérant qu'en l'absence d'éléments permettant de déterminer la fraction des honoraires litigieux correspondant aux prestations assurées par la société EPIC de ceux assurés par la société Larix, il y a lieu, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, d'annuler l'arrêt attaqué dans sa totalité ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société PIH France, venue aux droits de la société Foncière le Charlebourg ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 5 février 2013 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la société Property Investment Holding France une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Property Investment Holding France et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème / 3ème ssr
Numéro d'arrêt : 367898
Date de la décision : 09/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 déc. 2015, n° 367898
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Esther de Moustier
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP TIFFREAU, MARLANGE, DE LA BURGADE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:367898.20151209
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