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17/06/2015 | FRANCE | N°370181

France | France, Conseil d'État, 1ère / 6ème ssr, 17 juin 2015, 370181


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 novembre 2006 par lequel le maire de la commune de Beausoleil (Alpes-Maritimes) a délivré un permis de construire à la SARL Olivier A...ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux contre ce permis. Par un jugement n° 0702558 du 4 mars 2010, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 10MA01583 du 2 mai 2013, la cour administrative d'appel de Marseill

e a rejeté l'appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Nice pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 novembre 2006 par lequel le maire de la commune de Beausoleil (Alpes-Maritimes) a délivré un permis de construire à la SARL Olivier A...ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux contre ce permis. Par un jugement n° 0702558 du 4 mars 2010, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 10MA01583 du 2 mai 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Nice par Mme C....

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 juillet 2013, 14 octobre 2013 et 30 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Beausoleil la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Combettes, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de MmeC..., à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de commune Beausoleil, et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la SARL Olivier A...;

1. Considérant, en premier lieu, que lorsque, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte des terrains, l'administration doit, avant d'accorder une autorisation de construire, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle d'assiette du projet et, le cas échéant, de l'existence d'une servitude de passage garantissant cette desserte, il ne lui appartient pas de vérifier la légalité des actes ayant permis la réalisation de cette desserte ou la validité de la servitude consentie ; qu'en revanche, dans les cas particuliers où, pour accorder l'autorisation de construire, l'administration se fonde sur la circonstance que, en raison de travaux en cours ou futurs, la desserte du terrain répondra à brève échéance et de manière certaine aux exigences légales, les motifs de légalité susceptibles de faire obstacle à la réalisation de ces travaux peuvent être utilement invoqués devant le juge de l'excès de pouvoir, au soutien de conclusions dirigées contre la décision d'autorisation ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article UB 3 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Beausoleil, dans son paragraphe 2.1.2 : " Pour être constructible, toute unité foncière doit faire partie d'un îlot desservi par une voie ouverte au public d'une largeur d'au moins 6 mètres, et avoir un accès automobile directement sur cette voie " ; que, devant les juges d'appel, Mme C...faisait valoir que la desserte du terrain d'assiette du permis de construire attaqué ne satisfaisait pas à ces prescriptions à la date de délivrance de ce permis et que l'élargissement envisagé du chemin d'accès existant méconnaissait l'article INA1 du règlement du plan d'occupation des sols, qui n'autorise dans la zone concernée que la réalisation d'ouvrages publics d'infrastructure ; qu'ainsi que la cour l'a relevé, la réalisation de ces travaux de desserte n'a été autorisée que le 23 janvier 2007, soit postérieurement à la délivrance du permis de construire attaqué ; que, dès lors, le moyen tiré de l'illégalité des travaux nécessaires d'élargissement de la voie de desserte pouvait être utilement invoqué devant le juge de l'excès de pouvoir, au soutien de conclusions dirigées contre la décision autorisant la construction litigieuse ; que, par suite, en estimant que ce moyen était inopérant, au motif que les travaux considérés n'avaient pas été autorisés par le permis attaqué mais par une décision distincte, la cour a commis une erreur de droit ;

3. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article II.3.1 du règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles de mouvements de terrain sur le territoire de la commune de Beausoleil, approuvé par arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 15 mai 2001, que, en " zone bleue " de risque moyen, " sont interdits : / Dans les zones exposées au risque de glissement et de reptation : / - toute action dont l'ampleur est susceptible de déstabiliser le sol : déboisement, excavation, remblais... / - le dépôt et le stockage de matériaux ou matériels de toute nature apportant une surcharge dangereuse, / - l'épandage d'eau à la surface du sol ou en profondeur à l'exception de l'irrigation contrôlée des cultures " ; qu'en l'absence de toute disposition du plan prévoyant les interdictions applicables, d'une part, aux zones exposées au seul risque de glissement et, d'autre part, aux zones exposées au seul risque de reptation, ces dispositions doivent être regardées comme applicables aux zones exposées à l'un ou l'autre de ces deux risques ; que, par suite, en jugeant que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions était inopérant, au motif que le terrain d'assiette du projet en litige était situé dans une zone exposée au seul risque de reptation et non de glissement, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, Mme C...est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

6. Considérant qu'il résulte de l'examen de la minute du jugement attaqué que ce dernier a bien visé et analysé les conclusions et mémoires présentés par les parties au litige, ainsi que l'exige l'article R. 741-2 du code de justice administrative ; que, par suite, le motif tiré de ce que le jugement serait irrégulier pour ce motif doit être écarté ;

Sur la légalité du permis de construire du 27 novembre 2006 :

En ce qui concerne les moyens relatifs à la demande de permis de construire :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain, soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation dudit terrain pour cause d'utilité publique. / (...) / Lorsque la construction est subordonnée à une autorisation d'occupation du domaine public, l'autorisation est jointe à la demande de permis de construire " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué des parcelles AH n° 1 et AH n° 2 et que si la parcelle AK n° 113, qui appartenait initialement à l'Etat, est contiguë à ce terrain, elle n'en fait pas partie ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de construction contesté nécessiterait un aménagement permanent d'une dépendance du domaine public ; que, dès lors, le demandeur n'avait pas à joindre une autorisation d'occupation du domaine public à l'appui de sa demande de permis de construire ; que, si l'appelante se prévaut d'un courrier du maire de la commune de Beausoleil daté du 27 février 2008 faisant état d'un empiètement de la clôture de M. A...sur le domaine public, cette circonstance, postérieure à la délivrance du permis de construire litigieux, est sans incidence sur la légalité de ce dernier ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : / (...) 2º Le plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions, des travaux extérieurs à celles-ci et des plantations maintenues, supprimées ou créées ; / 3º Les plans des façades ; / (...) 5º Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe. Les points et les angles des prises de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse ; / 6º Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords (...) ; / 7º Une notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet. A cet effet, elle décrit le paysage et l'environnement existants et expose et justifie les dispositions prévues pour assurer l'insertion dans ce paysage de la construction, de ses accès et de ses abords (...) " ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les documents constituant le volet paysager du dossier de demande de permis de construire, et notamment sa notice de présentation, décrivent le paysage et l'environnement existant, précisent ses accès et ses abords, et présentent le parti architectural retenu pour assurer l'insertion dans ce paysage ; que les espaces boisés classés situés à proximité du projet, sa dimension paysagère ainsi que les autres constructions environnantes sont également pris en considération ; que les plans joints au dossier font apparaître l'existence de trois niveaux de sous-sols et permettent de calculer la hauteur de la construction projetée ; que si la notice paysagère n'est accompagnée que d'un plan de coupe, présentant l'une seulement des façades du bâtiment, et si les documents du volet paysager destinés à permettre d'apprécier, en ce qui concerne les plantations, la situation à long terme, comportent des insuffisances, les différents documents joints à la demande de permis, dont le caractère frauduleux ne ressort pas des pièces du dossier, ont mis l'autorité administrative à même d'apprécier l'insertion de la construction projetée dans son environnement ainsi que son impact visuel ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies, des plantations d'alignements. / Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements (...) " ;

12. Considérant que la requérante soutient que trois murs de 1,20 mètres, chacun bordant l'allée ouest du projet, ainsi que trois escaliers, empiéteraient sur un espace boisé classé ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces empiétements seraient de nature à compromettre la conservation ou la protection des boisements ayant fait l'objet d'un classement par le plan d'occupation des sols de la commune ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :

13. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au permis attaqué : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 562-4 du code de l'environnement : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme " ;

14. Considérant que les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, destinées notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés à certains risques naturels et valant servitude d'utilité publique, s'imposent directement aux autorisations de construire, sans que l'autorité administrative soit tenue de reprendre ces prescriptions dans le cadre de la délivrance du permis de construire ; qu'il incombe toutefois à l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme, si les particularités de la situation qu'il lui appartient d'apprécier l'exigent, de préciser dans l'autorisation, le cas échéant, les conditions d'application d'une prescription générale contenue dans le plan ou de subordonner, en application des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, la délivrance du permis de construire sollicité à d'autres prescriptions spéciales, si elles lui apparaissent nécessaires, que celles du plan de prévention des risques naturels prévisibles ;

15. Considérant, en premier lieu, s'agissant du risque d'inondation, qu'il ressort des pièces du dossier que le vallon des Moneghetti ne constitue pas un cours d'eau au niveau du terrain d'assiette du projet de construction, en raison de l'absence totale d'alimentation en dehors de l'écoulement pluvial du bassin versant, mais est qualifié de " vallon sec " ; qu'il résulte d'études hydrauliques du 20 avril 2006, modifiée le 6 octobre 2006, et du 11 avril 2006, que le vallon passe au travers d'un ouvrage enterré dont la capacité hydraulique limitée ne permet d'assurer, pour un événement pluvieux rare, que le transit d'une partie du débit exceptionnel ; qu'afin de protéger les personnes et les biens des écoulements torrentiels, ces études ont préconisé, d'une part, l'aménagement d'un chenal d'évacuation dimensionné pour assurer le transit d'une crue bi-centennale et, d'autre part, afin de tenir compte de l'augmentation des débits ruisselés imputable aux nouvelles imperméabilisations des sols, la création d'un bassin écrêteur de débits ; que l'arrêté litigieux a accordé le permis de construire en l'assortissant de la prescription du strict respect par le demandeur des préconisations de ces études hydrauliques ;

16. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les études hydrauliques en cause seraient insuffisamment précises, non concluantes ou contradictoires ; que l'insuffisance de l'ouvrage enterré en cas de débit excédentaire, mise en évidence par un avis du préfet des Alpes-Maritimes du 14 décembre 1999, a été prise en compte en prévoyant l'aménagement du chenal de décharge et d'un bassin écrêteur de crue ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'aménagement du chenal de décharge préconisé par l'étude complémentaire du 6 octobre 2006 aurait pour effet d'exposer la propriété de la requérante à un risque d'inondation ou serait de nature à exposer à un tel risque les résidents de la construction projetée ; que les conséquences de l'imperméabilisation des sols induits par le projet de construction ont été prises en compte par l'aménagement d'un bassin écrêteur de débits ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les services d'incendie et de secours seraient dans l'impossibilité d'intervenir en cas d'inondation, ni que la présence de l'ouvrage enterré du vallon de Moneghetti serait de nature à aggraver l'instabilité du sol ;

17. Considérant, en deuxième lieu, s'agissant du risque de mouvement de terrain, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de construction est situé dans une zone de risque moyen exposée au risque de reptation et de ravinement léger, où le plan de prévention des risques naturels prévisibles de mouvements de terrains sur le territoire de la commune de Beausoleil interdit toute action, notamment d'excavation ou de remblai, dont l'ampleur est susceptible de déstabiliser le sol et impose que tous les rejets d'eaux soient évacués dans les réseaux collectifs existants ou dans un exutoire adapté insusceptible d'érosion ;

18. Considérant, d'une part, que si le permis de construire litigieux autorise une construction comportant trois niveaux de sous-sols, ceux-ci correspondent à la déclivité naturelle du sol ; qu'il est assorti de la prescription du strict respect des principes généraux de reconnaissance de sol, de fondations, de terrassements et de drainage prescrits par l'avis géologique et géotechnique préliminaire émis le 21 octobre 2004 par un bureau d'études techniques et joint à la demande de permis ; que cet avis est favorable au projet sous réserve de conditions relatives notamment aux matériaux et à la disposition des fondations, aux modalités d'exécution des excavations, terrassements et remblais et aux caractéristiques des dispositifs drainants ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans ces conditions, les travaux autorisés seraient de nature à déstabiliser le sol ;

19. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard notamment aux dispositifs prévus, mentionnés au point 16, le projet satisfait aux prescriptions du plan de prévention des risques naturels prévisibles relatives aux rejets d'eau ;

20. Considérant, en dernier lieu, que si une partie du terrain d'assiette est exposée à des risques de chutes de blocs, il ressort des pièces du dossier que les blocs rocheux dont la requérante fait état ne sont pas situés à l'aplomb du projet mais plus à l'est et qu'ils sont sécurisés par des ouvrages réalisés lors de la construction de la route nationale et du viaduc ;

21. Considérant, par suite, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Beausoleil aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en délivrant le permis de construire litigieux ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme :

22. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au permis attaqué : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

23. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si la partie du vallon des Moneghetti située au sud de la moyenne corniche, où se situe le terrain d'assiette du projet, présentait encore, à la date de délivrance du permis, un paysage à dominante naturelle comprenant des restanques, des oliveraies et une végétation de fond de vallon, il faisait déjà l'objet d'une urbanisation diffuse sans véritable organisation ; que le projet se compose de trois corps de bâtiments adaptés à la déclivité du terrain ; que le permis a été assorti de prescriptions tenant à la hauteur des arbres à la plantation et à l'utilisation de matériaux destinés à améliorer leur intégration dans le site, résultant de l'avis de l'architecte des Bâtiments de France ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de construction serait de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinants et des paysages ainsi qu'à la conservation des perspectives depuis la moyenne corniche et le viaduc ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le maire de Beausoleil aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-21 en délivrant le permis attaqué ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité du plan d'occupation des sols de Beausoleil approuvé le 9 décembre 1991 :

24. Considérant qu'en vertu de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du permis litigieux, le plan d'occupation des sols de la commune de Beausoleil devait déterminer " les conditions permettant d'assurer : / 1° L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural, d'une part, et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction restée applicable au plan d'occupation des sols de la commune : " Les plans d'occupation des sols (...) doivent (...) : / 1° Délimiter des zones urbaines ou à urbaniser prenant notamment (...) en considération (...) l'existence de risques naturels prévisibles et de risques technologiques, la présence d'équipements spéciaux importants. (...) / Ils peuvent, en outre : / (...) 4° Fixer pour chaque zone ou partie de zone, en fonction notamment de la capacité des équipements collectifs existants ou en cours de réalisation et de la nature des constructions à édifier, un ou des coefficients d'occupation des sols qui déterminent, éventuellement pour chaque nature de construction, la densité de construction qui est admise (...) " ; qu'il résulte du I de l'article R. 123-18 du même code, dans sa rédaction applicable au plan : " Les documents graphiques doivent faire apparaître les zones urbaines et les zones naturelles. / Ces zones (...) sont : / 1. Les zones urbaines, dites "Zones U", dans lesquelles les capacités des équipements publics existants ou en cours de réalisation permettent d'admettre immédiatement des constructions et, éventuellement, à l'intérieur de ces zones, la localisation des terrains cultivés à protéger et inconstructibles en application de l'article L. 123-1 (9°) ; / 2. Les zones naturelles, équipées ou non, dans lesquelles les règles et coefficients mentionnés ci-dessus peuvent exprimer l'interdiction de construire (...) " ;

25. Considérant, en premier lieu, que selon le rapport de présentation du plan d'occupation des sols de la commune de Beausoleil approuvé le 9 décembre 1991, le territoire de la commune, " par sa situation de balcon littoral, est un site d'exception, offrant des perspectives de vue remarquables " ; que ce rapport prévoit les " protection et mise en valeur de la majeure partie des vallons qui coupent la commune du Nord au Sud ", comme le vallon de Moneghetti, la " limitation des espaces constructibles au nord de la moyenne corniche " ainsi que les " protection et mise en valeur des espaces naturels par le classement en zone inconstructible du cadre paysager de la commune (Mont des Mules, zones vertes au SDAU) " ; qu'il distingue trois niveaux d'occupation spatiale : le niveau le plus bas, situé de la mer jusqu'à la moyenne corniche, où se développe la partie centrale de l'agglomération, en prolongement de la Principauté de Monaco, un niveau intermédiaire, au dessus de la moyenne corniche, avec une zone de mitage pavillonnaire et, enfin, au niveau supérieur, une zone naturelle restée vierge ; que, concernant la zone basse, il précise que " la partie dense de l'agglomération peut s'étendre sans dommage jusqu'au niveau de la moyenne corniche en dehors des espaces verts " ; qu'il résulte du plan de zonage que les parcelles d'assiette du projet se situent en contrebas de la moyenne corniche et que, si elles s'intercalent entre des espaces boisés classés, elles ne se situent pas à l'intérieur de la " coulée verte " correspondant au fond du vallon ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le classement des parcelles d'assiette du projet contesté en zone UBc où, en l'absence de coefficient d'occupation des sols, l'emprise au sol est limitée à 40 % et la hauteur des constructions à 15 mètres, entrerait en contradiction avec les objectifs fixés par le plan d'occupation des sols ;

26. Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles d'assiette du projet de construction contesté seraient exposées à des risques naturels qui justifieraient, par leur importance, leur classement en zone naturelle ; qu'elles se situent en aval de la moyenne corniche, dans une zone marquée par une urbanisation diffuse, à proximité immédiate du centre de la commune, lequel s'inscrit dans le prolongement du territoire très densément urbanisé de la principauté de Monaco ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le plan d'occupation des sols serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation en tant qu'il classe ces parcelles en zone UBc, correspondant à des " secteurs bénéficiant d'une situation intéressante par rapport au site, qui doivent être urbanisés sous la forme d'îlots aérés et largement plantés " et qu'il fixe l'emprise au sol et la hauteur maximales des constructions ;

27. Considérant que Mme C...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, qui ne sont pas applicables au territoire de la commune de Beausoleil, non plus que de celles de l'article L. 371-1 du code de l'environnement issues d'une loi postérieure au permis attaqué ; qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir, par la voie de l'exception, que le plan d'occupation des sols de la commune serait illégal dès l'origine ou le serait devenu ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article UB3 du règlement du plan d'occupation des sols relatif à la desserte du terrain d'assiette du projet :

28. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article UB3 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Beausoleil, relatif aux accès et voirie : " (...) pour être constructible, toute unité foncière doit faire partie d'un îlot desservi par une voie ouverte au public d'une largeur d'au moins 6 mètres (...) " ;

29. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si à la date du permis de construire litigieux, le chemin de la Saint-Jean, permettant d'accéder au terrain d'assiette du projet contesté, ne disposait pas dans toute sa longueur d'une largeur d'au moins 6 mètres, la société Olivier A...a joint à sa demande de permis de construire une attestation, établie le 23 juin 2006, par laquelle le directeur de l'association syndicale autorisée des propriétaires riverains du vallon des Moneghetti supérieur s'engageait à réaliser les travaux de mise en conformité et de sécurisation de la portion de cette voie permettant l'accès au projet litigieux ; que le maire pouvait légalement se fonder sur la circonstance que, en raison de ces travaux, la desserte du terrain répondrait à brève échéance et de manière certaine aux exigences légales ;

30. Considérant qu'en l'absence d'indications contraires, la référence faite par un plan d'occupation des sols à la largeur de la voie publique doit, en principe, s'entendre comme comprenant non seulement la partie de la chaussée ouverte à la circulation des véhicules mais aussi la partie de l'emprise réservée au passage des piétons ; que le plan d'occupation des sols de la commune de Beausoleil ne comprend pas d'indication contraire ; qu'il ressort des pièces du dossier que la largeur de la voie d'accès résultant des travaux à la réalisation desquels s'est engagée l'association syndicale autorisée sera au total de 6 mètres ;

31. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle AK n° 113, qui appartenait initialement à l'Etat, satisfaisait déjà à l'exigence d'une largeur minimale de six mètres ; que, par suite, la circonstance qu'elle ne figure pas au nombre des parcelles pour lesquelles a été pris l'engagement de réalisation des travaux d'élargissement est dépourvue d'incidence sur la légalité du permis litigieux ;

32. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, d'une part, les travaux d'aménagement de la voie d'accès au terrain d'assiette du projet de construction auraient pour effet de porter atteinte aux espaces boisés classés et, d'autre part, que la voie ne pourrait pas être ouverte au public et ainsi constituer un ouvrage public que l'article INA1 du règlement du plan d'occupation des sols autorise dans la zone considérée ;

33. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le permis qu'elle attaque méconnaîtrait les dispositions de l'article UB3 du règlement du plan d'occupation des sols ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article UB6 du règlement du plan d'occupation des sols :

34. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1-4 de l'article UB6 du règlement du plan d'occupation des sols : " Lorsqu'une construction est implantée le long de la RN7 (moyenne corniche) : toute construction doit être implantée à une distance d'au moins 14 mètres de l'axe de la RN7 " ; que selon le lexique annexé à ce règlement : " Est considéré comme construction tout élément bâti dont l'édification nécessite un permis de construire et qui engendre la création d'une surface hors oeuvre brute quantifiable " ;

35. Considérant que la requérante fait valoir que le projet comporte la réalisation d'un mur acrotère pour le soutien d'un accès piétonnier au bâtiment A à une distance de 11,4 mètres de l'axe de la moyenne corniche ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que, d'une part, le bâtiment A est situé à plus de 14 mètres de cet axe et que, d'autre part, le mur en cause, qui ne peut être regardé comme une construction au sens du règlement du plan d'occupation des sols, ne fait pas partie intégrante du bâtiment A ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'article UB 6 aurait été méconnu ;

En ce qui concerne la violation des dispositions de l'article UB7 du règlement du plan d'occupation des sols :

36. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article UB7 du règlement du plan d'occupation des sols relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives que " toute construction doit être implantée à une distance d'au moins 4 mètres de ces limites séparatives " ; que ces dispositions, dont l'objet est lié à des préoccupations d'hygiène, d'urbanisme et de protection du voisinage, ne s'appliquent pas à la partie souterraine d'un bâtiment qui ne dépasse pas le niveau du sol naturel ;

37. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les différents éléments situés à moins de quatre mètres de l'une des limites séparatives soit existaient antérieurement à la délivrance du permis de construire, soit sont enterrés et ne dépassent pas le niveau du sol naturel, soit ne peuvent être regardés comme des constructions au sens du règlement du plan d'occupation des sols et ne font pas partie intégrantes des constructions projetées ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article UB7 du règlement du plan d'occupation des sols doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article UB10 du règlement du plan d'occupation des sols relatif à la hauteur des constructions :

38. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1, consacré à la " hauteur absolue " des bâtiments, de l'article UB10 du règlement du plan d'occupation des sols : " 1.1.1 - La différence d'altitude entre tout point d'une construction et le point le plus élevé du terrain naturel, pris le long des limites séparatives de l'unité foncière, ne peut excéder 15 mètres. / 1.1.2 - En aval de la Route Nationale 7 : le point le plus haut de toute construction ne peut dépasser le demi-plan incliné, d'une pente de 10 % par rapport à l'horizontale, défini par la limite d'emprise de la RN7 (moyenne corniche), au niveau du sol, en direction de la mer " ;

39. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions que la détermination de la hauteur absolue d'un bâtiment s'effectue en prenant en compte le point le plus élevé du terrain naturel pris le long des limites séparatives ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de masse et du plan dénommé " application réglementaire ", que le point le plus haut du terrain naturel le long de la limite séparative est à la cote 147,60 et que le point le plus élevé de la construction atteint la cote 159,20 ; qu'ainsi, la construction projetée n'excède pas la hauteur maximale de 15 mètres ;

40. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des cotes du plan " application réglementaire " que la construction ne dépasse pas la droite tracée selon le demi-plan incliné d'une pente de 10 % par rapport à l'horizontale défini par la limite d'emprise de la RN7 ; qu'il ne résulte pas du plan de la façade ouest, seul invoqué par la requérante, que les indications de distance et de hauteur portées sur le plan " application réglementaire " seraient inexactes ;

41. Considérant que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions du paragraphe 1.1 de l'article UB10 du règlement du plan d'occupation des sols doit être écarté ;

42. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par la SARL OlivierA..., que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Beausoleil du 27 novembre 2006 ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

43. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Beausoleil, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C...le versement à la commune de Beausoleil et à la SARL Olivier A...d'une somme de 2 000 euros chacune, au titre des frais exposés par elles tant en appel qu'en cassation, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 2 mai 2013 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par Mme C...devant cette cour est rejetée.

Article 3 : Mme C...versera à la commune de Beausoleil et à la SARL OlivierA... une somme de 2 000 euros chacune au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de Mme C...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme B...C..., à la commune de Beausoleil et à la SARL OlivierA....


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 17 jui. 2015, n° 370181
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Combettes
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Formation : 1ère / 6ème ssr
Date de la décision : 17/06/2015
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 370181
Numéro NOR : CETATEXT000030750192 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2015-06-17;370181 ?
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