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03/06/2015 | FRANCE | N°387142

France | France, Conseil d'État, 8ème ssjs, 03 juin 2015, 387142


Vu la procédure suivante :

M. G...et Mme E...D...ont saisi le tribunal administratif de Versailles de protestations tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 5 octobre 2014 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Saint-Rémy-l'Honoré (Yvelines).

Par un jugement n°s 1407196, 1407229, 1407251 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ces protestations.

Par une requête et deux mémoires en réplique enregistrés les 15 janvier, 5 mars et 27 avril 2015 au secrétar

iat du contentieux du Conseil d'Etat, M. F...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

M. G...et Mme E...D...ont saisi le tribunal administratif de Versailles de protestations tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 5 octobre 2014 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Saint-Rémy-l'Honoré (Yvelines).

Par un jugement n°s 1407196, 1407229, 1407251 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ces protestations.

Par une requête et deux mémoires en réplique enregistrés les 15 janvier, 5 mars et 27 avril 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. F...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à ses protestations ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi du 29 juillet 1881 ;

- le code électoral ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 mai 2015, présentée par M.F... ;

1. Considérant que, par un jugement du 17 juin 2014 devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé les opérations électorales des 23 et 30 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux de la commune de Saint-Rémy-l'Honoré (Yvelines) à l'occasion desquelles quatre listes s'étaient présentées ; qu'à l'issue du premier tour de scrutin des opérations électorales organisées le 5 octobre 2014, la liste " Un village pour vous " conduite par Mme C...a obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, soit 436 voix, contre 274 pour la liste " Ensemble pour Saint-Rémy-l'Honoré ", menée par Mme D... ; que M.F..., membre de cette dernière liste, relève appel du jugement du tribunal administratif de Versailles du 16 décembre 2014 qui a rejeté ses protestations ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 52-1 du code électoral : "Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite. / A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. / Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, cette interdiction ne s'applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l'organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu'il détient ou qu'il a détenus. Les dépenses afférentes sont soumises aux dispositions relatives au financement et au plafonnement des dépenses électorales contenues au chapitre V bis du présent titre" ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : " Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'annulation des élections municipales, MmeC..., maire de la commune, a fait diffuser un " flash spécial élections " daté du 23 juin, informant les habitants de la décision du tribunal administratif de Versailles, dont un extrait était cité, et précisant qu'il ne serait pas fait appel de ce jugement, qu'une délégation nommée par le préfet se substituerait dès le 19 juillet au conseil municipal et que de nouvelles élections se tiendraient entre septembre et octobre 2014 ; que s'il était également mentionné que les griefs invoqués contre la liste " Un village pour vous " avaient été écartés par le tribunal administratif et que Mme C...s'adresserait ultérieurement aux habitants " avec un statut de candidate", ce document, rédigé en termes mesurés, ne peut être regardé comme prohibé par les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;

4. Considérant que ni le format ni la périodicité du bulletin municipal " L'Essentiel ", diffusé les 4 et 5 juillet 2014, n'ont été modifiés par rapport aux deux précédents numéros du journal dont la parution a débuté en mai 2014 ; que les articles qu'il comportait, traitant de l'actualité de la commune, de sa vie associative et des travaux en cours, et l'éditorial du maire, qui rappelait l'état d'avancement de divers projets de la commune, n'excédaient pas l'objet habituel d'une telle publication et ne pouvaient être regardés comme présentant de manière particulièrement élogieuse les réalisations municipales ; que, si le maire y rappelait que, pour annuler les élections de mars 2014, le tribunal administratif n'avait retenu aucun grief contre la liste " Un village pour vous " et que " toute autre interprétation du jugement serait inexacte et diffamatoire ", cette publication ne peut être regardée comme constituant une utilisation de ce bulletin à des fins de propagande électorale ; que le moyen tiré de ce que le bulletin municipal diffusé le mois précédent méconnaîtrait l'article L. 52-1 du code électoral doit être écarté ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la liste conduite par Mme C... ne peut être regardée comme ayant bénéficié de dons prohibés par l'article L. 52-8 du code électoral ;

6. Considérant que le moyen tiré de ce que le bulletin municipal diffusé en juin 2014 méconnaîtrait les articles L. 52-1 et L.52-8 du code électoral est nouveau en appel et, par suite, irrecevable ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que, si M. F...soutient que le maire ou celui qui a assuré ses fonctions dans le cadre de la délégation spéciale n'a pas fait droit à sa demande, reçue le 16 juillet 2014, sollicitant la publication d'une réponse à l'éditorial du bulletin municipal diffusé les 4 et 5 juillet 2014, il résulte de l'instruction que l'intéressé n'y était pas nommé et qu'il n'a fait l'objet d'aucune mise en cause personnelle dans ce document ; que, si le requérant fait valoir qu'il était en droit de bénéficier du droit de réponse régi par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse, le juge administratif n'est pas compétent pour statuer sur de telles conclusions ; que la réservation d'un espace dans les bulletins municipaux à l'expression des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale n'est requise, aux termes de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales, que pour les communes d'au moins 3 500 habitants ; qu'enfin, M. F...était en mesure de s'expliquer sur les raisons de sa protestation et sur sa propre interprétation du jugement avant les élections qui ont eu lieu en octobre 2014 ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales : " Des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations, syndicats ou partis politiques qui en font la demande. / Le maire détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public. (...) " ;

9. Considérant que, si le requérant soutient que la liste " Ensemble pour notre village " n'a pu utiliser le foyer rural pour y tenir une réunion l'un des trois vendredis précédant le vote, cette circonstance n'est pas constitutive d'une irrégularité dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la liste conduite par le requérant aurait été privée de toute possibilité raisonnable d'obtenir une salle de réunion ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 52-3 du code électoral : " Chaque candidat, chaque binôme de candidats ou liste de candidats peut faire imprimer un emblème sur ses bulletins de vote " ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que plusieurs emblèmes soient imprimés sur les bulletins de vote d'une liste de candidats ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la déclaration de candidature de la liste de Mme C...a été enregistrée sous le nom de " A...village pour vous " ; que le bulletin de vote, qui comporte cette même dénomination, est ainsi conforme à l'article L. 269 du code électoral ; que, s'il associe à l'emblème de cette liste, celui, de dimension plus réduite, de la liste " Vivre notre village ", il est constant que la liste conduite par Mme C...comprenait deux candidats de cette dernière formation qui s'était présentée aux précédentes élections et dont elle bénéficiait du soutien ; que l'association de ces deux emblèmes, lesquels figuraient sur l'ensemble des documents de propagande, ne méconnaissait pas l'article L. 52-3 du code électoral, alors même que la formation " Vivre notre village " n'était pas un parti politique et n'a pas été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à créer une confusion entre des listes qui n'étaient pas concurrentes et à altérer la sincérité du scrutin ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les suffrages exprimés à l'aide de ce bulletin devraient être regardés comme nuls ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. F...doit être rejetée ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Mme C...qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. F...le versement d'une somme à Mme C...sur ce même fondement ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M.G..., à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 8ème ssjs
Numéro d'arrêt : 387142
Date de la décision : 03/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2015, n° 387142
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:387142.20150603
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