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27/05/2015 | FRANCE | N°372314

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 27 mai 2015, 372314


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, deux mémoires complémentaires et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 septembre 2013, 1er août et 21 novembre 2014, et 13 février 2015, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la délibération du 20 juin 2013 par laquelle le jury de l'examen de classement des candidats aux fonctions de magistrat du premier et du second grade l'a déclaré inapte à l'exercice des fonctions judiciaires, d'autre part, la décision

du 31 juillet 2013 par laquelle la garde des sceaux, ministre de la justice, ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, deux mémoires complémentaires et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 septembre 2013, 1er août et 21 novembre 2014, et 13 février 2015, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la délibération du 20 juin 2013 par laquelle le jury de l'examen de classement des candidats aux fonctions de magistrat du premier et du second grade l'a déclaré inapte à l'exercice des fonctions judiciaires, d'autre part, la décision du 31 juillet 2013 par laquelle la garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté son recours hiérarchique contre la décision du 20 juin 2013 ;

2°) d'enjoindre à la ministre de la justice de statuer à nouveau sur sa demande et d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le décret n° 72-355 du 4 mai 1972 ;

- le décret n° 2001-1099 du 22 novembre 2001 ;

- le décret n° 2008-483 du 22 mai 2008 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une décision du 20 juin 2013, le jury de l'examen de classement des candidats aux fonctions de magistrat du premier et du second grade a déclaré M. B...A...inapte à l'exercice des fonctions judiciaires ; que par une décision du 31 juillet 2013, la garde des sceaux, ministre de la justice, s'est déclarée incompétente pour se prononcer sur le recours hiérarchique de M. A...dirigé contre cette décision ; que celui-ci demande l'annulation pour excès de pouvoir de ces deux décisions ;

Sur la délibération du jury du 20 juin 2013 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction issue de la loi du 5 mars 2007 : " Deux concours sont ouverts pour le recrutement de magistrats du second et du premier grade de la hiérarchie judiciaire. / (...) / Les candidats admis suivent une formation probatoire organisée par l'Ecole nationale de la magistrature comportant un stage en juridiction effectué selon les modalités prévues à l'article 19. Ils sont rémunérés pendant cette formation. / (...) / Le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature établit, sous la forme d'un rapport, le bilan de la formation probatoire de chaque candidat et adresse celui-ci au jury prévu à l'article 21. / Après un entretien avec le candidat, le jury se prononce sur son aptitude à exercer les fonctions judiciaires. / Les candidats déclarés aptes à exercer les fonctions judiciaires suivent une formation complémentaire jusqu'à leur nomination, dans les formes prévues à l'article 28, aux emplois pour lesquels ils ont été recrutés. Les dispositions de l'article 27-1 ne sont pas applicables. " ; qu'aux termes de l'article 5 du décret du 22 novembre 2001 relatif aux modalités du recrutement de magistrats prévu par l'article 21-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 : " Les candidats déclarés admis par le jury sont nommés par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, en qualité de stagiaires auprès de l'Ecole nationale de la magistrature. / Ils suivent une formation probatoire d'une durée de cinq mois. Elle comporte une formation d'un mois dispensée à l'Ecole nationale de la magistrature et un stage en juridiction d'une durée de quatre mois. / Le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature établit le bilan de la formation probatoire de chaque candidat qu'il adresse au jury prévu à l'article 21 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée dans le délai d'un mois suivant la date de fin de stage. / La décision de déclarer un candidat inapte à exercer les fonctions judiciaires est portée à la connaissance de l'intéressé, au cours d'un entretien individuel avec le président ou un membre du jury désigné par lui. " ;

3. Considérant que les dispositions citées au point précédent qui donnent compétence au jury mentionné à l'article 21 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, non d'émettre un simple avis, mais de se prononcer définitivement sur l'aptitude des candidats admis au concours de recrutement des magistrats du second et du premier grade de la hiérarchie judiciaire à exercer les fonctions judiciaires, ne laissent pas de place à l'intervention de la commission d'avancement dans le cours de cette procédure ; que le troisième alinéa de l'article 49-1 du décret du 4 mai 1972 impose néanmoins au jury de transmettre à la commission d'avancement, après entretien avec le candidat, " son avis sur l'aptitude de celui-ci à exercer les fonctions judiciaires " ; que, par conséquent, compte tenu des compétences attribuées au jury par l'article 21-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 pour le concours prévu à cet article, le dernier alinéa de l'article 49-1 doit être regardé comme étant applicable non à ce concours, mais seulement aux modalités directes d'intégration dans la magistrature prévues par les articles 22 et 23 de cette ordonnance ; que la circonstance que, depuis une modification introduite par l'article 45 du décret du 22 mai 2008, cette disposition figure à l'article 49-1 du décret du 4 mai 1972 dans un chapitre traitant du stage en juridiction commun aux candidats à l'intégration directe et à ceux issus du concours mentionné à l'article 21-1 est à cet égard sans incidence ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la commission d'avancement n'a pas été saisie par le jury de la liste des candidats déclarés aptes à l'exercice des fonctions judiciaires doit être écarté ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en décidant, au vu notamment des différentes appréciations et avis émanant des responsables chargés de l'encadrer et portant sur le stage en juridiction effectué par M. A...au tribunal de grande instance du Havre, de l'écarter de l'accès aux fonctions judiciaires, le jury, qui n'était pas lié par la circonstance que ni le directeur du centre de stage ni le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature n'ont expressément indiqué qu'ils estimaient que M. A...devait être déclaré inapte à l'exercice des fonctions judiciaires, ne s'est ni fondé sur des faits matériellement inexacts, ni n'a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision de la garde des sceaux du 31 juillet 2013 :

5. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance qu'une telle décision n'ait pas mentionné les voies et délais de recours contentieux est sans aucune incidence sur la légalité de celle-ci ;

6. Considérant que le jury prévu à l'article 21-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ne peut légalement, après avoir délibéré sur l'aptitude des candidats à exercer les fonctions judiciaires à l'issue de la formation probatoire qu'ils ont reçue, se livrer à une nouvelle appréciation sur le recours d'un candidat ; qu'il n'en est autrement que si ce recours vise à la réparation d'une erreur matérielle ou d'un vice de procédure ; que, par suite, après que le jury s'est prononcé sur une telle aptitude, le garde des sceaux, ministre de la justice, ne peut légalement, sur le recours hiérarchique d'un des candidats, ni se livrer lui-même à une nouvelle appréciation, ni demander au jury de le faire ; qu'il peut seulement se borner à transmettre au jury toute demande portant sur une erreur matérielle ou un vice de procédure qui lui est adressée ; que, dès lors, le ministre en se déclarant, par une décision d'ailleurs suffisamment motivée, incompétent pour se prononcer sur le recours hiérarchique de M.A..., qui ne portait ni sur la rectification d'une erreur matérielle, ni sur la réparation d'un vice de procédure, n'a pas commis d'erreur de droit ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions qu'il attaque ; que, par suite, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., à la garde des sceaux, ministre de la justice et au directeur de l'Ecole nationale de la magistrature.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 372314
Date de la décision : 27/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 mai. 2015, n° 372314
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste de Froment
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:372314.20150527
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