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27/03/2015 | FRANCE | N°375602

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 27 mars 2015, 375602


Vu la procédure suivante :

La société Kanam Grund Kag a demandé à l'administration fiscale, par une réclamation du 23 décembre 2010, de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010 dans les rôles de la ville de Paris.

L'administration a soumis d'office cette réclamation au tribunal administratif de Paris en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1201695 du 19 décembre 2013, le tribunal a rejeté la deman

de de la société Kanam Grund Kag.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire ...

Vu la procédure suivante :

La société Kanam Grund Kag a demandé à l'administration fiscale, par une réclamation du 23 décembre 2010, de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010 dans les rôles de la ville de Paris.

L'administration a soumis d'office cette réclamation au tribunal administratif de Paris en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1201695 du 19 décembre 2013, le tribunal a rejeté la demande de la société Kanam Grund Kag.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 19 février 2014, 19 mai 2014 et 9 mars 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Kanam Grund Kag demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Mathieu Herondart, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de la société Kanam Grund Kag ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Kanam Grund Kag a donné mandat à la société Groupe d'études foncières et cadastrales, qui n'avait pas la qualité d'avocat, pour présenter une réclamation auprès de l'administration fiscale afin d'obtenir la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010 ; que, par un mémoire daté du 20 janvier 2012, l'administration fiscale, en application des dispositions de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, a soumis d'office cette réclamation au tribunal administratif de Paris, lequel l'a rejetée par un jugement du 19 décembre 2013 ; que la société Kanam Grund Kag se pourvoit en cassation contre ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie (...) du jour où l'affaire sera appelée à l'audience " ; qu'en vertu de l'article R. 732-1 de ce code, les parties peuvent présenter lors de l'audience des observations orales à l'appui de leurs conclusions écrites, soit en personne, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, soit par un avocat ; qu'aux termes de l'article R. 431-1 du même code : " Lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire " ; qu'aux termes de l'article R. 431-2 du même code : " Les requêtes et les mémoires doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d'une somme d'argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d'un litige né d'un contrat (...)" ; qu'en application de l'article R. 431-4, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, comme les litiges fiscaux, le 1° de l'article R. 431-5 permettant néanmoins aux parties de se faire représenter par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 ; qu'aux termes de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 431-4 et R. 431-5 du code de justice administrative, les requêtes au tribunal peuvent être signées d'un mandataire autre que ceux qui sont mentionnés à l'article R. 431-2 du même code. (...) " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R. 199-1 de ce livre : " L'administration peut soumettre d'office au tribunal la réclamation présentée par un contribuable. Elle doit en informer ce dernier " ; qu'aux termes, enfin, du second alinéa de l'article R. 200-3 du même livre : " La réclamation initiale du contribuable vaut requête au tribunal " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, si un contribuable peut se faire représenter par un mandataire qui n'a pas la qualité d'avocat pour présenter une réclamation devant l'administration fiscale et pour introduire sa demande devant le tribunal administratif dans un litige de plein contentieux fiscal, lorsque sa réclamation est soumise d'office par l'administration au tribunal administratif, valant ainsi demande introductive d'instance, les communications de mémoires et les différents actes de procédure, y compris l'envoi de l'avis d'audience, ne peuvent être accomplis qu'à l'égard du requérant ;

3. Considérant que, dès lors que la société Kanam Grund Kag n'était pas représentée par un avocat, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait méconnu l'article R. 711-2 du code de justice administrative en n'adressant pas l'avis d'audience à son mandataire doit être écarté ;

4. Mais considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6 (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 200-3 du livre des procédures fiscales : " Dans le cas où l'administration soumet d'office le litige à la décision du tribunal administratif, celui-ci est saisi par un mémoire établi et notifié dans les conditions prévues à l'article R. 200-4 " ; que, dès lors que la réclamation soumise d'office au tribunal administratif vaut demande introductive d'instance en application de ce même article, le mémoire par lequel l'administration saisit le tribunal constitue le premier mémoire du défendeur au sens de l'article R. 611-1 du code de justice administrative précité ; qu'il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer le premier mémoire d'un défendeur est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité ; qu'il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement aux mentions du jugement attaqué, le mémoire enregistré le 25 janvier 2012 au greffe du tribunal administratif de Paris par lequel l'administration fiscale a déféré d'office à ce tribunal la réclamation présentée pour la société Kanam Grund Kag n'a pas été communiqué à celle-ci ; que cette méconnaissance de l'obligation posée par l'article R. 611-1 du code de justice administrative ne saurait, eu égard à la motivation retenue par le premier juge, être regardée comme n'ayant pu avoir d'influence sur l'issue du litige ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la société requérante est fondée à soutenir que ce jugement a, pour ce motif, été rendu au terme d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Kanam Grund Kag au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 19 décembre 2013 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à la société Kanam Grund Kag au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Kanam Grund Kag et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 375602
Date de la décision : 27/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 mar. 2015, n° 375602
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mathieu Herondart
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:375602.20150327
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