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27/02/2015 | FRANCE | N°365028

France | France, Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 27 février 2015, 365028


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge de l'obligation de payer les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1996, 1997 et 1998, ainsi que les pénalités correspondantes, qui lui ont été réclamées par commandements de payer des 10 avril et 27 mai 2008. Par un jugement nos 0803024-0804005 du 18 mai 2011, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à ces demandes.

Par un arrêt n° 11LY01708 du 6 novembre 2012, la cour administrative

d'appel de Lyon, sur l'appel du ministre chargé du budget, a annulé ce jugement e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge de l'obligation de payer les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1996, 1997 et 1998, ainsi que les pénalités correspondantes, qui lui ont été réclamées par commandements de payer des 10 avril et 27 mai 2008. Par un jugement nos 0803024-0804005 du 18 mai 2011, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à ces demandes.

Par un arrêt n° 11LY01708 du 6 novembre 2012, la cour administrative d'appel de Lyon, sur l'appel du ministre chargé du budget, a annulé ce jugement et rejeté les demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble.

Procédure devant le Conseil d'État

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 janvier et 8 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. B... demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11LY01708 du 6 novembre 2012 de la cour administrative d'appel de Lyon ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie-Gabrielle Merloz, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de M.B....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le comptable du Trésor de Tullins a délivré à l'encontre de M. B... des commandements de payer, les 10 avril et 27 mai 2008, pour avoir paiement de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1996, 1997 et 1998, ainsi que des pénalités correspondantes, qui lui avaient été notifiées en sa qualité de gérant et associé unique de l'EURL Café de la gare, à l'issue d'une vérification de la comptabilité de cette société. M. B... a formé opposition contre ces actes de poursuite en invoquant la prescription de l'action en recouvrement, puis a contesté les décisions de rejet du trésorier-payeur général de l'Isère devant le tribunal administratif de Grenoble. Celui-ci, par un jugement du 18 mai 2011, a fait droit à sa demande. Sur recours du ministre chargé du budget, la cour administrative d'appel de Lyon, par un arrêt du 6 novembre 2012, a annulé ce jugement et rejeté les demandes de M. B.... Ce dernier se pourvoit en cassation contre cet arrêt.

2. Aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. / Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription ". Aux termes de l'article L. 277 du même livre, dans sa rédaction applicable à la date de mise en recouvrement des impositions et pénalités faisant l'objet des commandements de payer litigieux, soit le 31 mars 2001 : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge peut, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. Le sursis de paiement ne peut être refusé au contribuable que s'il n'a pas constitué auprès du comptable les garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor. " Il résulte de la lettre même de ces dernières dispositions que l'octroi du sursis de paiement est subordonné au dépôt, par le contribuable, d'une réclamation contentieuse.

3. Pour écarter le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement des sommes en litige, la cour administrative d'appel de Lyon a jugé qu'un courrier du 21 juin 2001, dont le contribuable soutenait qu'il émanait de la seule EURL Café de la gare, devait être regardé comme une réclamation contentieuse ayant régulièrement sollicité en son nom le sursis de paiement de ces sommes. La cour s'est fondée, d'une part, sur les termes de ce courrier qui contestait les redressements notifiés à la fois au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'impôt sur le revenu et sollicitait " l'octroi des sursis aux paiements des cotisations contestées " et, d'autre part, sur la circonstance que M. B... avait ultérieurement constitué une garantie portant sur le montant des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu contestées. En statuant ainsi, alors que ces deux éléments ne suffisaient pas, par eux-mêmes, à écarter le moyen soulevé en défense par M. B..., tiré de ce que la réclamation du 21 juin 2001, émanant de l'EURL Café de la gare, ne contestait pas en son nom les cotisations d'impôt sur le revenu mises à sa charge par les rôles supplémentaires du 31 mars 2001, la cour a commis une erreur de droit. Son arrêt doit donc être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Le ministre ne conteste pas sérieusement, par les moyens qu'il invoque, que la réclamation contentieuse du 21 juin 2001, signée par un avocat au nom de l'EURL Café de la gare et contestant une partie des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, des rehaussements de bénéfices industriels et commerciaux et des pénalités notifiés par l'administration à la suite d'une vérification de la comptabilité de cette société, n'émanait ni de M. B..., ni d'un conseil agissant au nom de celui-ci en tant que personne physique assujettie à l'impôt sur le revenu. M. B... ne peut, dès lors, être regardé comme ayant sollicité à ce titre le sursis de paiement prévu par l'article L. 277 du livre des procédures fiscales. Par suite, l'administration ne peut valablement lui opposer l'interruption de la prescription de l'action en recouvrement prévue par le second alinéa de l'article L. 274 du même livre. Il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement qu'il attaque, le tribunal administratif de Grenoble a accordé à M. B... la décharge de l'obligation de payer les sommes résultant des commandements en litige.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros, à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 6 novembre 2012 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.

Article 2 : Le recours du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État présenté devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejeté.

Article 3 : L'État versera la somme de 3 500 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 365028
Date de la décision : 27/02/2015
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 27 fév. 2015, n° 365028
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:365028.20150227
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